Résumé de la 2e partie n Baudouin Godefroy saute dans sa voiture et fonce vers le domicile de M. Beloncle... Sébastien Beloncle garde pourtant son sang-froid. -Monsieur Godefroy, je vois que vous êtes bouleversé par mes conclusions. Mais croyez bien que j'ai longuement examiné le rapport de l'expert géomètre. Vous n'êtes ni le premier ni le dernier à commettre des erreurs concernant le cadastre. Une erreur de trois mètres n'est pas mortelle. Et pourtant si : cette erreur sera mortelle. — Godefroy est là, la bave aux lèvres. M. Beloncle hausse légèrement le ton : — Je vous conseille de quitter mon domicile où vous n'avez strictement rien à faire. Profitez donc de votre tournée par ici pour aller consulter votre médecin de famille : il vous prescrira très probablement un antidépresseur. Vous allez retrouver votre calme et tout rentrera dans l'ordre. J'ai bien l'honneur... Une fois Godefroy parti, M. Beloncle éprouve le besoin de réfléchir un peu. Il appelle son épouse et lui dit : — Je crois que j'ai affaire à un fou furieux. J'ai vu dans son regard que pour quelques mètres de thuyas il est prêt à tuer... Puis, il confie ses inquiétudes aux autorités de justice. On lui répond comme de bien entendu que quelques mots prononcés sous le coup de la colère ne doivent pas prêter à conséquence : — M. Godefroy n'est ni un ivrogne ni un repris de justice. Il fait partie des notabilités de Beautonville... Il va se calmer. Nous ne pouvons pas l'interpeller : pas de casier judiciaire, pas d'antécédents psychiatriques. Tout va rentrer dans l'ordre. Félix Petitpont oublie un peu,de son côté, cette contrariété. La haie de thuyas prospère raisonnablement et sépare M. Godefroy des ruminants gourmands qui ont tous retrouvé leurs grasses prairies. Petitpont voit arriver l'été d'un cœur serein. — Yvette, les cerisiers sont pleins à craquer. C'est le moment de se régaler. Je vais aller en cueillir un plein panier avant que les merles ne bouffent tout. — Ah ! Tu vas encore aller faire l'acrobate dans les branches. Tu devrais te contenter d'emporter une échelle. Inutile de grimper jusqu'en haut. Celles du bas sont tout aussi bonnes. Félix hausse les épaules avec un sourire. Depuis qu'il est haut comme ça, il a l'habitude de monter dans ses cerisiers qui étaient autrefois ceux de son père. Alors... Félix Petitpont sort donc de chez lui et part vers son destin. Un destin idiot, si l'on peut dire, car cet homme un peu corpulent mais dans la force de l'âge, grimpe dans un cerisier, se laisse tenter par quelques grappes rutilantes qui brillent au soleil au bout d'une branche. La branche casse avec un bruit sec. Petitpont dégringole et tombe mal sur une pierre qui devait être là depuis des centaines d'années. Il a juste le temps de comprendre qu'il vient de se briser la colonne vertébrale. On ne le retrouvera mort qu'en fin d'après-midi, quand Mme Petitpont, vaguement inquiète, montera à bicyclette jusqu'au pré. Autour du cadavre du boucher les bœufs et les vaches, indifférents, broutent. Tout le village est présent aux obsèques du malheureux Félix. Tout le village sauf Baudouin Godefroy. Mme Godefroy apparaît discrètement au cimetière, à l'insu de son époux. (à suivre...)