Ce matin, à l'heure où nous mettons sous presse, des informations éparses mais que nous n'avons pas eu le temps de vérifier, nous parvenaient faisant état de la reprise des émeutes dans des quartiers d'Alger comme El-Harrach et Bachdjarrah. Hier soir, jusqu'aux environs de 3 heures du matin, la capitale et d'autres villes du pays ont vécu des heures de violence inouïe où les jeunes ont donné libre cours à leur colère, incendiant et saccageant tout se qui se trouvait sur leur chemin. De violentes émeutes ont éclaté pour la deuxième nuit consécutive dans ce quartier populaire. Selon plusieurs témoignages recueillis sur place, ces émeutes ont débuté en fin d'après midi, à environ 18 h, dans plusieurs rues et ruelles de ce quartier et ne se sont arrêtées que vers 3 h du matin. Des jeunes en colère contre la cherté de la vie, l'augmentation des prix de plusieurs produits alimentaires de large consommation et la dégradation de leurs conditions de vie en général, se sont attaqués à plusieurs agences automobiles à Triolet et à la rue Mizon. Au moins trois sièges de concessionnaires automobiles ont été saccagés et incendiés. Au niveau de Triolet, à quelques mètres du carrefour où se trouve un barrage fixe, deux grandes concessions automobiles ont été incendiées. Il s'agit des marques Renault et Geely. A 9h 30 ce matin, plusieurs véhicules du constructeur français, incendiés à l'intérieur comme à l'extérieur de cette agence, se trouvaient encore là. Quelques-uns, dont les roues ont été volées et les vitres brisées, gisaient encore en pleine rue créant un grand embouteillage. A quelques mètres du siège de Renault, une autre agence de véhicules asiatiques à savoir Geely n'a pas été épargnée. En effet, plusieurs de ses véhicules ont été incendiés. Des dizaines de passants étaient rassemblés pour voir ce spectacle qui rappelle les événements d'octobre 1988. «Je savais qu'il y avait eu des émeutes hier soir, mais je n'imaginais pas une telle violence», s'est étonné un vieux de passage. A une question sur la réaction de policiers en faction au moment du déroulement de ce grand saccage, un jeune du quartier nous a dit : «La police est intervenue à environ minuit en lançant des bombes lacrymogènes sur les manifestants. A ce moment-là tout avait été déjà brûlé.» Les gaz lacrymogènes ont d'ailleurs touché quelques personnes qui vivaient en pleine rue sous des tentes au quartier Saïd-Touati. Plusieurs vieilles femmes et des enfants ont été évacués à l'hôpital lamine-Debaghine de Bab El-Oued. La grande surface Dubaï très connue dans le quartier a été également saccagée. Des manifestants munis de barres de fer et d'autres d'armes blanches ont défoncé le rideau du local. Une fois à l'intérieur, ils ont saccagé le système de vidéo surveillance et ont prix une importante somme d'argent. Plusieurs d'entre eux ont volé des téléviseurs, des chaînes stéréo, DVD, démodulateurs et autres objets de valeur. A l'intérieur de la supérette le propriétaire n'en croyait pas ses yeux. Quelques étagères sont quasiment vides et des débris de verre partout. «Je ne comprends pas pourquoi ils m'ont fait ça. Pourtant juste à côté de mon local, il y a une agence de la CAAT qui n'a pas été touchée», nous a-t-il dit. Interrogé sur les pertes matérielles, il a souligné qu'elles s'éléveraient à de plus de 100 millions de centimes. A la rue Mizon, l'agence de voiture de marque DFM a été également complètement saccagée. Plusieurs véhicules ont été incendiés à l'intérieur et à l'extérieur de cette agence. Le reste d'un bureau jeté «gisait» sur le trottoir, des débris de verre jonchent la rue sur des dizaines de mètres et des centaines de document sont éparpillés çà et là. Le plus curieux c'est que tout était paisible ce matin. En effet, les habitants de ce quartier vaquaient le plus normalement du monde à leurs occupations quotidiennes, certains faisaient leurs emplettes, d'autres se dirigeaient vers leurs lieux de travail, alors que les étudiants et élèves rejoignaient leurs écoles et université.