Stratagème - Il fait courir le bruit que la femme était en réalité un homme. Outre son indéniable talent, la carrière du compositeur Ennio Morricone ou du moins sa fulgurante ascension a commencé à partir du film ‘La Bataille d'Alger' tourné et réalisé par Pontecorvo. Pour son premier long métrage l'Algérie a donc choisi des maîtres chacun dans sa matière. La musique des films ‘Pour une poignée de dollars ‘ ou par exemple ‘le Bon la brute et le truand' ne fera que confirmer pus tard le génie de Morricone. Et le succès de ‘La Bataille d'Alger' a été tel que le Pentagone l'a projeté dans sa salle privée et nous ne parlons pas des innombrables prix et oscars qu'il a raflés un peu partout dans le monde. Mais revenons un peu sur les conditions de travail qui ont entouré, ce chef-d'œuvre. Blague ou humour noir, mais il paraît qu'à la vue du drapeau français qui flottait sur un édifice pour les besoins de la projection, un octogénaire aurait dit à ses petits enfants : «Ne vous ai-je pas dit que la France reviendrait un jour pour nous coloniser ?» Mais dérision mise à part, il semblerait que les techniciens de Pontecorvo aient rencontré d'énormes difficultés sur le plateau parce qu'il manquait toujours une pièce au décor, un détail aux costumes, un texte au raccord d'autant que les curieux, les centaines de curieux gênaient tout le monde. C'est à cause de cette promiscuité imposée pour la circonstance que le cameraman, un Italien semble-t-il de Calabre, va inventer un astucieux stratagème. Après quelques mois de tournage éprouvant, il demandera à son épouse de le rejoindre à Alger. Devant les multiples attentions auxquelles elle aura droit et comme il était de nature suspicieuse comme tous les Calabrais, il fera courir le bruit autour de lui que cette femme était en réalité un homme travesti. Il semblerait que depuis ce jour et curieusement les petites attentions disparaîtront pour ne laisser chez les uns et les autres qu'un sentiment de dégoût. La parenthèse étant fermée et quelques années se sont passées et voilà que par le plus grand des hasards un technicien algérien de l'équipe rencontre à Paris le cameraman. — Et votre ami lui demandera-t-il, comment va-t-il ? — De quel ami parles-tu ? — Du travesti qui est venu te voir à Alger. Eclatant de rire par la belle blague qu'il avait inventée et qu'il avait oubliée, il lui avouera : «C'était ma femme ce travesti, ma femme qui était au courant de la combine.»