Avis - Le paysage musical algérien est saturé de chansons raï ; les autres styles sont relégués au second rang, notamment le chaâbi. Le chaâbi, qui, à une certaine époque, était un genre prisé par la jeunesse parce qu'il renvoyait à la culture populaire, a été longtemps éclipsé par les vagues successives d'interprètes de la chanson raï. «La chanson chaâbie, qui a connu de grands moments de gloire, a été reléguée aux oubliettes avec l'émergence de la chanson raï», regrettera Yacine Ouabed, poète et parolier, connu pour ses poèmes inspirés du terroir et aussi pour avoir écrit de belles chansons pour le regretté Kamel Messaoudi, dont Edenya qui fut le premier poème chanté par ce dernier en 1994. Celui qui a su conquérir les cœurs des passionnés de poésie populaire, se montre optimiste quant à l'avenir de la chanson chaâbie. Il va jusqu'à dire : «Aujourd'hui, après avoir déserté ses espaces culturels, le chaâbi revient et il reprendra la place qui lui est la sienne.» Et ce, grâce notamment au Festival national de la chanson chaâbie qui œuvre, depuis la première édition qui remonte à 2006, de promouvoir sur la scène nationale ce patrimoine musical à la dimension historique, culturelle et esthétique. «Le chaâbi n'est plus confiné dans l'Algérois son bastion historique, mais des jeunes de tout le territoire s'intéressent de près à cette musique», se félicite-il. «Le Festival de la chanson chaâbie en est une preuve, il a permis de découvrir de nouveaux talents.» Yacine Ouabed, pour qui «le succès d'une chanson reste tributaire de trois critères à savoir, des belles paroles, une belle mélodie et surtout une belle interprétation», estime que ce festival reste un acquis parce qu'il a permis l'émergence – et la confirmation – de jeunes talents, issus des quatre coins de l'Algérie. C'est un festival ouvert et profitable à tous. Il a démontré, au fil des éditions, que le chaâbi est ancré dans toutes les régions de l'Algérie. Le festival permettra de promouvoir et de développer ce genre populaire dans son texte classique comme dans sa forme modernisée. Car le festival est ouvert à toutes les propositions, et toutes sont prises en considération, soutenues et encouragées. Yacine Ouabed, qui ne rate pas une occasion pour rendre hommage à tous ceux qui ont beaucoup apporté à ce patrimoine populaire, qu'est le chaâbi, estime, en outre, que le chaâbi, en tant que genre musical, appartient à tous et doit suivre son temps, répondre aux aspirations de chaque génération pour qu'il puisse, de ce fait, se renouveler sans pour autant perdre de son authenticité. Et de dire : «Le chaâbi appartient à tout le peuple comme son nom l'indique, à l'image d'El-Badji, Lahbib Hachelaf... Ils ont été les premiers à avoir ouvert la voie de l'innovation dans ce domaine musical, que certains considèrent comme une chasse gardée.» Le regretté El-Hadj El-Hachemi Guerouabi avait dit : «Il n'y a pas d'école Guerouabi, que chacun adopte son style.» Cette phrase est restée célèbre. Ainsi, tous ces noms ont joué un rôle important, voire aussi bien magistral que significatif dans l'enrichissement de la chanson chaâbie qui a réussi à conquérir le public et les amateurs de ce genre populaire tant au niveau national que maghrébin. Chacun l'avait adapté selon son inspiration du moment et, surtout, selon sa sensibilité. Cela a donc donné une empreinte nouvelle à ce patrimoine.