Pathologie La jeune princesse souffrait d'une curieuse maladie : la mélancolie. C'était au temps où Tlemcen s'appelait Agadir... Agadir, c'est un mot berbère qui vient du phénicien et qui signifie «rempart» : la ville était, en effet, entourée d'un rempart qui la protégeait contre les incursions des tribus nomades. La légende rapporte qu'à la fin du VIIe siècle de l'ère chrétienne, un roi du nom de Dilak régnait sur Agadir. Il était, comme il convient à un roi de légende, immensément riche mais il manquait quelque chose à son bonheur : sa fille unique souffrait d'une maladie qu'aucun médecin de l'époque n'avait pu guérir : la mélancolie... La fille, dit la légende, s'appelait Choumissa. C'est évidemment un nom d'origine arabe, signifiant soleil ou éclat de soleil, donné après coup : elle devait donc, si elle n?avait jamais existé, porter un autre nom, de sens équivalent : Tafukt, en berbère de la région, soleil, ou Helia, nom grec de même sens, puisqu?on était, à l'époque, en période byzantine. Mais qu'importe le nom : Choumissa, Tafukt ou Hélia était merveilleusement belle. Elle avait la peau satinée, de grands yeux bleus et une longue chevelure dorée, pareille aux blés qui poussaient dans les champs de Tlemcen... Mais comme nous l'avons vu la jeune fille était affectée de mélancolie. Il n'y avait plus de sourire sur ses lèvres, elle se nourrissait très peu, picorant comme un oiseau et elle ne parlait presque plus, elle ne faisait que soupirer, et ne cessait de dépérir... ? Ma fille, ma fille disait le roi, les larmes aux yeux, de quoi souffres-tu ? ? Père, répondait-elle, je n?ai mal nulle part ; ? Peut-être te manque-t-il quelque chose que tu voudrais posséder, ? Il ne me manque rien père ? Les serviteurs que j'ai mis à ta disposition, te servent-ils comme il convient ? ? Oui, père, ils sont attentifs à mes moindres désirs ! ? Peut-être que le palais où tu résides n'est pas suffisamment grand ? ? Il l'est, père ! et puis, à quoi me servirait un grand palais, je ne me sens bien que dans ma chambre, où je puis penser et rêver... ? Justement, je veux t'enlever à ta chambre, je veux que tu sortes, que tu joues et t'amuses comme les jeunes filles de ton âge ! ? Père, laisse-moi rêver et méditer ! Ces entretiens désolent le souverain qui ne sait comment faire pour guérir sa fille. A chaque fois qu'il entend parler d'un médecin ou d'un magicien réputé, il le fait venir au palais : ? Tire ma fille de sa mélancolie, lui disait-il, et je te couvrirai d'or ! Mais il suffit, au médecin ou au magicien de s'entretenir avec la jeune fille pour dire au roi : ? Hélas, Votre Majesté, votre fille est atteinte d'un mal profond : elle guérira, mais il faudra beaucoup de temps et de patience pour la tirer de cet état ! ? Et quelle chose pourrait l'aider à guérir ? ? Rapprochez-la de la nature, entourez-la de fleurs et d'oiseaux... La beauté des fleurs et celles des animaux pourraient l'émouvoir... (à suivre...)