Résumé de la 113e partie - Christiane ayant contracté un refroidissement, Denys demande à Marcelle d'aller au château pour veiller sur elle... J'ai trouvé enfin l'admirable transition qui va me permettre de passer en quelques semaines du domaine du rêve à celui de la réalité qui achèvera moralement cette femme encombrante. — En la soignant, j'ai eu tout le loisir d'examiner de près son corps : il est harmonieux, racé, mais tout de même moins attrayant, à mon avis, que celui de Mme Boitard ! Dès mon retour, tout à l'heure, je me suis mise nue, une fois de plus, devant la glace de cette armoire et j'ai pu constater avec plaisir que mon corps, tout décharné et amaigri qu'il soit par le mal qui le mine, n'est pas très éloigné, comme constitution générale, de celui de Christiane... Si son corps a plu à Denys, il n'y a aucune raison pour qu'il n'en soit pas de même du mien ! — Pendant cette semaine où j'étais à peu près seule avec elle, j'aurais pu l'achever d'une manière très simple : en lui faisant des enveloppements froids. A l'heure actuelle elle serait probablement morte. Mais c'était risqué : Denys passait la voir matin et soir, parfois même trois fois par jour... Il n'aurait tout de même pas été assez enfant pour ne pas se douter de quelque chose et puis Christiane, qui a toujours gardé sa lucidité, aurait pu lui dire les soins bizarres que je lui prodiguais. Il m'a paru plus subtil de passer, aux yeux de Christiane et de Denys, pour celle qui se dévoue nuit et jour et arrache la malade au mal. Ainsi mon autorité sur elle et surtout sa confiance ont pris des proportions illimitées... Aujourd'hui elle n'est plus en danger immédiat, mais elle est loin d'être guérie ! Ce n'est que maintenant que je vais pouvoir faire de l'excellente besogne... Si elle avait été emportée en quelques jours par sa double pleurésie, elle n'aurait pas eu le temps de souffrir moralement. Je veux qu'elle souffre autant que moi, plus que moi si c'était possible ! Enfin - et c'est la raison la plus forte pour laquelle je n'ai pas voulu l'achever aussi vite - Denys aurait toujours conservé dans son cœur le deuil d'une maîtresse enlevée à son affection par une maladie foudroyante, tandis que si c'est elle qui l'abandonne sans raison apparente, son chagrin d'amant se transformera en rancune... De la rancune au désir de se venger, il n'y a qu'un pas : la meilleure vengeance pour Denys sera de remplacer l'infidèle. Je serai là... — Ce soir, j'ai besoin de repos. Je suis très fatiguée. Mon bras gauche s'ankylose de plus en plus : je vais me faire une nouvelle piqûre de morphine. J'espère être mieux demain pour retourner auprès de Christiane qui est veillée cette nuit par sa femme de chambre. Elle aussi sera détendue, plus apte à m'écouter. Et je lui parlerai avec gentillesse, avec une extrême douceur, comme deux femmes seules peuvent converser entre elles... (A suivre...)