Résumé de la 74e partie ■ Chantal choisit de quitter le «Saint-John» la dernière pour observer la procession de miséreux qui, comme elle, étaient atteints de la la lèpre... Parmi ces sœurs, l'une d'elles s'était détachée, toute frêle, pour monter sur le navire... Chantal sentit ses jambes défaillir, mais elle se raidit et s'adossa à la paroi vitrée de la cabine, regardant fixement la forme blanche et éthérée qui s'avançait... Et ses yeux se remplirent de larmes quand elle entendit une voix très douce lui dire : — Je vous attendais... La petite sœur lui avait pris le bras pour l'aider à descendre de ce «Saint-John» sur lequel elle aurait voulu mourir... Toutes deux, terminant la triste procession, avancèrent lentement sur le débarcadère. Au moment où elles passèrent devant le groupe d'Européens, une nouvelle ombre blanche se détacha : — Ma Mère, lui dit Marie-Ange, voici celle qui nous a été annoncée... — Mademoiselle, continua la Supérieure de la Mission à l'intention de Chantal, vous êtes ici chez vous, pour vous reposer et pour guérir. Nous nous verrons plus longuement demain... Sœur Marie-Ange va vous accompagner jusqu'à votre demeure où tout est prêt pour vous recevoir. Vos bagages y seront presque en même temps que vous. Chantal n'avait plus la force de remercier, ni même de prononcer une parole. Cette Mère Marie-Joseph, qui venait de lui parler, lui rappelait la Mère Dorothée.. Toutes ces religieuses doivent se ressembler ! pensa-t-elle... Toutes, à l'exception de Marie-Ange qui, elle, était vraiment d'une radieuse beauté. Il y avait aussi, dans le petit groupe, un prêtre : le Père Rivain, l'aumônier de Makogaï... Ainsi qu'un curieux personnage, portant col en celluloïd et lunettes d'or, le Révérend David Hall, le pasteur wesleyen de l'île. Il y avait enfin trois autres hommes qui s'inclinèrent au passage de la jeune femme : c'était le médecin-chef, le Dr Watson, accompagné de ses deux assistants, dont l'un était un grand garçon blond et pâle rappelant l'interne de l'hôpital Saint-Louis et l'autre un Fidjien qui avait dû acquérir le droit d'être appelé «Docteur» après de patientes études. Marie-Ange s'était arrêtée devant les médecins, mais, sur un petit signe du Dr Watson, elle poursuivit son chemin en soutenant toujours Chantal. Le signe du médecin-chef ne voulait-il pas dire : «Conduisez-la vite dans sa nouvelle demeure, elle en a le plus grand besoin ! N'avons-nous pas, avec la lèpre, des années devant nous pour l'examiner ?» Autant la traversée sur le «Saint-John» avait paru désespérément longue à Chantal, autant la marche, au bras de Marie-Ange, lui parut courte. — Voilà votre demeure, reprit la voix douce quand elles furent arrivées devant une maison basse, toute blanche, entourée d'une terrasse et couverte par un toit de chaume. (A suivre...)