Tensions ■ Après la perte de la Crimée absorbée par la Russie, l'Ukraine restait confrontée ce matin à une menace de sécession de l'Est russophone où les pro-russes ont proclamé une «république souveraine» et réclamé leur rattachement à la Russie. Les forces de l'ordre ont arrêté quelque 70 séparatistes pro-russes qui s'en prenaient au bâtiment de l'administration locale à Kharkiv, dans l'est de l'Ukraine, a annoncé ce matin l'antenne locale du ministère de l'Intérieur. Les «séparatistes» qui «prennent les armes, qui envahissent des bâtiments, seront traités comme le prévoient la Constitution et les lois, comme des terroristes et des criminels», a déclaré ce matin le président ukrainien par intérim Olexandre Tourtchinov. Les activistes pro-russes, qui étaient entrés dimanche dans le bâtiment, l'avaient quitté dans la nuit après des négociations et la venue sur place du ministre de l'Intérieur, Arsen Avakov. Mais la situation était restée très tendue toute la journée d'hier, avec plus d'un millier de manifestants pro-russes massés sur la place. Des échauffourées avec des contre-manifestants pro-européens, moins nombreux, avaient émaillé la journée. Dans la soirée, des manifestants pro-russes ont lancé des cocktails molotov sur le bâtiment de l'administration, mettant le feu à deux bureaux du rez-de-chaussée, selon les responsables locaux du ministère. L'incendie a rapidement été maîtrisé. Après ces incidents, les forces de l'ordre ont lancé «une opération anti-terroriste qui a totalement sécurisé l'immeuble de l'administration locale», selon ces sources, ajoutant qu'aucun coup de feu n'a été tiré. Sur sa page Facebook, M. Avakov avait écrit dans la nuit : «L'opération anti-terroriste a commencé. Le centre ville est bouclé. N'ayez pas peur». Un député, Nikolaï Kniajitski, qui a pu s'entretenir avec M. Avakov, a indiqué sur sa page Facebook que l'opération avait été menée par une unité spéciale des forces de l'Intérieur (unités militaires dépendant du ministère de l'Intérieur, ndlr), les «Jaguar». «Ils (les Jaguar) sont prêts à intervenir à l'Est, pour neutraliser les criminels», a-t-il écrit, dans une référence apparente à la ville de Donetsk, où des séparatistes tiennent toujours l'administration locale et ont proclamé hier une «république souveraine», réclamant leur rattachement à la Russie. La tension s'est en effet brusquement aggravée depuis dimanche quand des manifestants pro-russes se sont emparés de bâtiments officiels dans plusieurs villes de l'Est ukrainien, descendant les drapeaux ukrainiens bleu et jaune pour hisser le blanc-bleu-rouge russe. Ayant reçu l'ordre d'éviter tout incident sanglant, la police les avait laissé passer après quelques échauffourées. Mise en garde de Moscou La Russie a appelé ce matin les autorités ukrainiennes à cesser des préparatifs d'intervention dans les régions pro-russes de l'Est, mettant en garde contre la perspective d'une guerre civile. Le ministère russe des Affaires étrangères affirme aussi que des membres d'une société privée américaine participent à cette opération. «Selon nos informations, des unités des forces de l'Intérieur et de la Garde nationale ukrainienne affluent dans les régions du sud-est de l'Ukraine, notamment à Donetsk, avec des combattants du groupe armé illégal Pravy Sektor», un mouvement ultranationaliste ukrainien, a déclaré le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué diffusé ce matin. «La tâche leur a été confiée d'écraser par la force la contestation des habitants du sud-est du pays contre la politique des autorités de Kiev», ajoute la diplomatie russe. «Le fait que participent à cette opération environ 150 spécialistes américains du groupe militaire privé Greystone, qui ont revêtu l'uniforme de l'unité (ukrainienne) Sokol suscite une inquiétude particulière», déclare le ministère des Affaires étrangères.