Cas ■ «Ce pays et gangrené par le racisme !» Celui qui s'exprime ainsi n'est pas un jeune beur qui peine à trouver du travail, mais un haut cadre de l'Etat français. I Il s'agit de Zahir Kedadouche, le désormais ex-ambassadeur de France auprès de la principauté d'Andorre. Après s'être vu refuser plusieurs affectations en raison de son nom pas très gaulois, ce fils d'émigrés algériens a décidé de démissionner avec fracas du Quai d'Orsay. Dans une lettre qu'il a adressée au président François Hollande, cet ancien footballeur n'y est pas allé avec le dos de la cuillère pour dénoncer les agissements de certains responsables du ministère des Affaires étrangères. C'est là où «j'ai rencontré le racisme le plus abject», a-t-il écrit dans cette lettre datée du 5 mars 2014. Après s'être interdit de s'exprimer pendant la période des élections municipales de mars dernier, M. Kedadouche qui dit que cette affaire de discrimination «dépasse largement» son cas personnel, est sorti de son silence récemment en adressant un message on ne peut plus clair aux hautes autorités françaises : les valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité sont bafouées par ceux-là mêmes qui sont censés veiller à leur application. Dans un entretien accordé au Nouvel Observateur, le seul ambassadeur issu de l'émigration sur les 32 nommés par l'actuel président français lors de sa première année à l'Elysée, a indiqué «pousser un cri pour défendre un combat citoyen», tout en s'inquiétant pour le «Mustapha» lambda, qui n'a pas la «capacité de se défendre» comme lui. Ce qui le révolte le plus, c'est le fait que ce soit «l'élite de l'administration du Quai d'Orsay qui décide qu'on ne peut pas nommer un Français d'origine étrangère sur certains postes au regard de la communauté supposée, et c'est là que c'est grave». «Lorsque j'ai demandé à être affecté à Anvers, on m'a fait comprendre que l'extrême-droite y était extrêmement présente et que cela pouvait gêner les relations avec la France», a-t-il raconté au micro de la radio Europe 1. Ses supérieurs lui auraient également signifié que sa demande ne pouvait être satisfaite en raison de l'implantation d'une forte communauté juive dans cette ville belge. «On m'a dit que je devais changer à cause de mon nom», a-t-il encore déclaré. Réagissant à ces accusations qu'il a qualifiées d'«inacceptables», le Quai d'Orsay a catégoriquement nié l'existence de pratiques racistes au sein de ses services. Le département de Laurent Fabius considère «comme un atout et une force de pouvoir compter parmi ses cadres des personnes issues de la diversité». M. Kedadouche est-il fou pour proférer de telles accusations si elles n'étaient pas fondées ? Si tel est le cas, comment le ministère des Affaires étrangères l'a-t-il nommé au poste d'ambassadeur ?