Décision n Le président français François Hollande a officialisé, hier soir, sa volonté de prolonger jusqu'à fin mai, l'état d'urgence instauré en France après les attentats djihadistes qui ont fait 130 morts et plusieurs centaines de blessés le 13 novembre à Paris. Le chef de l'Etat «a annoncé que, face à la menace terroriste, le gouvernement présenterait au Conseil des ministres du 3 février 2016, un projet de loi prolongeant l'état d'urgence pour une durée de trois mois», selon une déclaration de l'Elysée. Cette décision ne faisait aucun doute depuis plusieurs jours. M. Hollande, qui a consulté cette semaine les principaux dirigeants et partis politiques du pays, l'avait jugée mercredi «plus que probable», selon le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone. Décrété le 13 novembre, au soir des pires attentats commis en France depuis la Seconde Guerre mondiale, l'état d'urgence doit théoriquement s'achever le 26 février. L'état d'urgence renforce les pouvoirs de la police, en permettant les assignations à résidence, les perquisitions administratives de jour comme de nuit, ou l'interdiction de rassemblements, le tout sans contrôle d'un juge. La question de sa prolongation fait débat dans le pays, où des magistrats, des partis de gauche et des associations de défense des droits de l'Homme et des libertés publiques s'inquiètent d'un risque de pérennisation de ce régime d'exception. «François Hollande ne nous a rassurés que sur un seul point : c'est l'idée que l'état d'urgence serait prolongé tant que dure la menace de Daech, qui n'est pas fondée», a ironisé hier vendredi, le numéro un communiste, Pierre Laurent. Il faisait référence à l'émoi suscité dans la matinée par un entretien du Premier ministre socialiste Manuel Valls à la BBC. Dans cette interview enregistrée la veille en marge du Forum économique mondial de Davos (Suisse), le chef du gouvernement a estimé que la France pouvait «utiliser tous les moyens» face au terrorisme «jusqu'à ce qu'on puisse en finir avec Daech». Ces déclarations ont été interprétées par certains opposants comme une volonté de maintenir l'état d'urgence pendant des années, une intention que les services du chef du gouvernement ont catégoriquement démentie. Mardi dernier, des experts des Nations unies ont recommandé à la France de ne pas le prolonger, estimant qu'il imposait des «restrictions excessives et disproportionnées aux libertés fondamentales». Indépendamment de la question de sa durée, François Hollande veut graver dans la Constitution française le régime de l'état d'urgence et ses conditions d'application, par le biais d'une révision qui sera soumise au Parlement le mois prochain. R. I. /Agences 1 000 perquisitions par mois Depuis son entrée en vigueur, l'état d'urgence a permis de procéder à près de 400 assignations à résidence et 3 000 perquisitions. Pour la première fois, le Conseil d'Etat, la plus haute juridiction administrative française, a décidé hier vendredi, de suspendre l'une de ces assignations à résidence et condamné l'Etat à verser 1 500 euros à l'homme concerné. La Ligue française des droits de l'Homme a saisi, mercredi passé, cette instance, en demandant de mettre fin à tout ou en partie des contraintes de l'état d'urgence.