Ce mot, introduit maintenant il y a plus de deux décennies, est devenu célèbre : il serait même entré dans le dictionnaire? Disons tout de suite que c?est une célébrité dont nous nous serions bien passés, mais les mots, comme les hommes, ne choisissent pas leur destin ! Le mot fait partie du vocabulaire de l?économie, du moins de l?économie informelle. Comme la peinture abstraite dite informelle, le trabendo est libre, spontané, n?obéissant à aucune loi, à aucune règle préétablie, ne suivant aucune procédure préalable, bref, échappant à tout circuit de contrôle. Ces caractéristiques font du trabendo un système hors la loi, aussi, ceux qui s?y adonnent devraient-ils se cacher comme s?ils étaient porteurs d?une maladie honteuse ou d?une tare. Mais dans la réalité, c?est le contraire qui se produit. Le trabendisme (nous verrons plus loin l?origine de ce mot et d?autres de la même famille) se pratique au grand jour. «Wasch hiya khedemt-ek ?» (Quel est ton métier ?), demande-t-on à ce jeune, il répond aussitôt : «Nekhdem trabendo», (Je fais du trabendo). Il peut répondre, par une sorte de pudeur, nbeznes (je fais du business) autrement dit, je suis dans les affaires, mais l?autre aura compris : il fait du trabendo ! Dans certains milieux, dans certaines bouches, le mot a même pris de la valeur. Faire du trabendo signifie que l?on manipule de l?argent, beaucoup d?argent, que l?on voyage, que l?on peut rendre service en procurant le produit que l?on cherche, etc. Bien entendu, il y a le grand et le petit trabendo. Le grand, c?est celui des grosses légumes qui brassent des milliards et inondent le marché de produits qu?ils parviennent, on ne sait par quel miracle, à faire entrer (c?est le cas des nababs du pétard et de la fusée à la veille du Mouloud). Le petit trabendo, c?est celui des jeunes dés?uvrés qui vont, une fois par mois, en Syrie, en Turquie ou en Italie, remplir leurs cabas de chiffons et de cosmétiques bas de gamme, pour les revendre dans les marchés ou sur les? trottoirs !