Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Pour le 43e président des Etats-Unis, les événements du 11 septembre constituent une renaissance politique, voire une découverte de soi. De «looser» au «winner» il n?y a qu?un pas à franchir. Pour George W. Bush ce fut la révélation. Chapeau donc à Ben Laden qui a donné naissance à une bête politique que l?Amérique entière vénère. Pourtant, rien ne le présageait à un tel destin. Comme Helmut Kohl, George W. Bush s?est fait une spécialité politique d?être sous-estimé. Souvent moqué par ses adversaires pour ses difficultés occasionnelles de prononciation portant une image de fils à papa surtout porté, dans sa jeunesse, sur l?alcool, les jolies filles et le base-ball, il a cependant démontré ses qualités politiques dès 1994, quand il triomphe d?un redoutable adversaire, Ann Richard, pour devenir un gouverneur du Texas très populaire. En effet, «quand George W. Bush se présenta en 1994 au poste de gouverneur du Texas, même ses parents s?attendaient à ce qu?il perde». Ainsi commence le portrait que dressa le New York Times du candidat républicain à la Maison-Blanche, en l?an 2000. Trois ans plus tard, tout a changé. L?ex-looser a changé de stature. Les milliers de morts du World Trade Center à New York ont rassemblé une nation entière autour de son chef. Un président qui, pour la première fois, fut à la hauteur de ce que les Américains attendaient de lui. En lançant la guerre contre le terrorisme, il fait la quasi-unanimité aux Etats-Unis, avec des scores de popularité historiques de 75 à 80%. Il a découvert sa mission. Né en 1946, deuxième fils d?un président des Etats-Unis à atteindre la plus haute fonction du pays, George W. Bush a repris à son compte la volonté paternelle d?en découdre avec l?Irak. Bush junior ne se limite pas uniquement à terminer le travail entamé par son père quelques années plus tôt. Il cultive aussi la différence avec l?ensemble de sa famille. Car le président américain se présente volontiers comme l?incarnation des forces du bien et revendique haut et fort sa foi de «chrétien évangélique». Dans Avec l?aide de Dieu (Odile Jacob), il raconte sa «rédemption». Noceur et alcoolique jusqu?à la quarantaine, il se convertit à la sobriété sous l?influence de Laura, qu?il épouse et dont il a deux filles (des jumelles). «On ne peut comprendre le président sans d?abord appréhender sa foi», explique Peter Wehner, l?un des auteurs de ses discours dans l?équipe de la Maison-Blanche. Chrétien «évangélique», George W. est un méthodiste ? une dénomination protestante directe et simple, à la différence de l?église épiscopalienne de ses parents. «Je prie tous les jours. Je lis la Bible le matin. Naturellement, je crois à la séparation de l?Eglise et de l?Etat, mais ma foi est importante pour moi», confie-t-il à l?hebdomadaire US News & Wold Report. 40 millions d?Américains se définissent aujourd?hui comme «évangéliques». Leur poids en politique est essentiel. Autre différence par rapport à ses parents : George W. Bush, bien que né en Nouvelle-Angleterre, est vraiment un Texan, ou comme disent les New-Yorkais un «Red Nex», ce qui veut dire «cou rouge», allusion moqueuse faite aux éleveurs de bétail. Il avait deux ans quand ses parents ont déménagé à Odessa, puis à Midland, dans l?ouest de cet Etat. Là où son père manifestait la retenue de bon ton d?un Yankee de bonne famille, W. B. a des instincts politiques plus populaires et souvent plus justes. Révélé au monde alors que lui ignore tout de celui-ci, sa victoire en trois semaines sur le régime de Saddam Hussein constitue sans doute un pas important vers un second mandat, encore lui faudrait-il revenir rapidement aux affaires qui préoccupent en priorité les Américains, à commencer par la relance économique.