Expression n De son vivant, il était et continue d'être considéré, après sa disparition en 1991, comme «l?une des consciences les plus claires, l?un des repères majeurs de la culture algérienne vivante». Mohamed Khadda, connu pour son engagement pour la promotion de la culture algérienne, notamment à travers la peinture, se révèle comme un personnage actif de tous les combats de la créativité artistique. Pionnier dans la (re)naissance et le développement de la peinture au Maghreb, notamment en Algérie, Mohamed Khadda n?avait cessé de réfléchir à un art nouveau et authentique, de s?interroger sur une nouvelle manière d?approcher l?art, d?où le besoin de le réinventer et de l?inscrire dans une nouvelle logique, la sienne, un raisonnement régi, cultivé et nourri par son intuition et sa personnalité. Mohamed Khadda décidait alors d?opter pour la rupture avec le conventionnel figuratif et de réfuter le mimétisme, et du coup il conférait à son art toute sa teneur et sa maturité plastique ? et même philosophique. Il décidait de camper son travail, outre dans la rupture, dans le renouveau et la créativité. Son art s?est voulu ouvert assimilant des langages appropriés à une représentation de la psychologie humaine, et récupérant des motifs et des signes inspirés de l?ancestrale mémoire algérienne. Sa peinture est, en effet, un monde de représentation dans une vision privilégiant essentiellement une figuration abstraite d?une existence figurative : l?artiste nous fait découvrir dans un monde abstrait un monde d?écriture, une écriture qui se fait cependant au gré d?une pulsion affective. Toutefois, il ne se fatigue pas, ni ne s?encombre de grammaire pour illustrer ses tableaux, expliquer, raisonner, légitimer son écriture. Il se suffit de son imagination débordante, tout en couleur et en graphie, une imagination spontanée, démonstrative, mais surtout de sa poétique pour se lancer dans une réécriture d?une écriture déjà canonisée, justifiée. L?écriture se fait d?une manière telle qu?elle revêt de nouvelles proportions esthétiques : il n?est plus question d?un alphabet arabe ou d?une calligraphie berbère mais plutôt d?une écriture inspirée où se mêlent deux modes de représentations riches et variées, à la fois opposés et complémentaires, et entrant dans une relation dialogique, définissant dans un même espace l?échange interculturel. C?est-à-dire une écriture hybride, semblable. Il est question, en effet, dans la peinture de Khadda de signes et de caractères décomposés, mélangés, puis combinés, recomposés autrement, comme s?il s?agissait d?anagrammes, dans un style emprunté à l?étrange, à l?onirisme, réécrivant ainsi de mille façons le réel : rêves, impressions et résurgences se côtoient, se complètent et se signifient dans une spatialité qui s?avère énigmatique, symbolique. Ainsi, la lettre, qui se mue en entité organique, autonome, en une présence matérielle, se révèle dans sa symbolique en mouvement continuel. «Elle se veut mouvante, vibration, liée au rythme de la respiration de l?homme et au battement de son pouls, elle dit, simule, suggère tout à la fois», écrivait Mohamed Khadda. l Plusieurs activités culturelles sont prévues en mai prochain, en hommage à l'artiste Mohamed Khadda, décédé il y a quinze ans, le 4 mai 1991. Cette manifestation s'ouvrira par une exposition au musée des Beaux-Arts intitulée «Pour un art nouveau», qui réunira une centaine d??uvres de l'artiste provenant de la collection privée de Mohamed Khadda, de la collection du Musée national des Beaux-Arts et de la collection du musée Zabana ainsi que de diverses collections privées. Cette exposition, dont le vernissage aura lieu le 3 mai et qui s'étalera jusqu'au 15 du même mois, sera précédée d'une conférence de presse à la bibliothèque du musée, en présence de l'épouse du défunt, Mme Najet Belkaïd Khadda, ainsi que des représentants d'autres institutions culturelles. La Bibliothèque nationale abritera, pour sa part, une exposition d'affiches du 23 au 30 mai, alors que des journées d'étude consacrées à la place de Mohamed Khadda dans l'art du XXe siècle, sont prévues les 23 et 24 mai prochain. Cette manifestation sera clôturée le 11 juin par la pose d'une plaque commémorative à l'entrée de l'atelier de l'artiste, au centre d'Alger.