Le président du Conseil national de l'Ordre des médecins algériens trouve que la justice a «la main lourde» vis-à-vis des médecins auteurs d'erreurs médicales. Plaidant pour la dépénalisation de la faute médicale, il rappelle que la médecine n'est pas une science exacte et le praticien, même s'il faute, n'est pas un délinquant. De plus en plus de médecins sont poursuivis devant les instances judiciaires pour des erreurs médicales plus ou moins «lourdes». Les citoyens, qui s'estiment victimes, n'hésitent plus, depuis quelques années, à demander réparation. Une évolution que le président du Conseil national de l'Ordre des médecins algériens juge «positive». «Le citoyen a pris l'habitude de se plaindre, je trouve que c'est bien. Toutes les voies sont possibles au citoyen dans une République comme la nôtre de faire valoir son droit», a estimé Mohamed Bekkat Berkani qui s'exprimait ce matin sur les ondes de la Chaîne III. Sauf que le président du Conseil de l'ordre regrette quelque peu le fait que l'organisme qu'il dirige est quelque peu occulté dans le traitement des affaires de ce genre. La vérité est que les citoyens qui supposent être victimes de fautes médicales, préfèrent s'en remettre aux instances judiciaires qui, elles, peuvent leur accorder des dédommagements substantiels ou carrément condamner les fautifs à des peines de prison, contrairement au Conseil de l'ordre qui ne peut qu'infliger des «avertissements ou des blâmes» ou, dans le pire des cas, prononcer l'interdiction provisoire ou définitive d'exercer. Ce qui fait qu'en huit ans, seules 500 plaintes ont été traitées par le Conseil national et les différents conseils de l'ordre régionaux, révèle M. Bekkat qui estime que ce chiffre est loin de refléter la réalité et l'ampleur des erreurs médicales. L'orateur s'élève particulièrement contre cette tendance des juridictions à se montrer sévères avec les médecins incriminés. «On a constaté que la justice à la main trop lourde vis-à-vis du médecin qui, même s'il se trompe, n'est pas un délinquant», tranche-t-il en rappelant que «la médecine n'est pas une science exacte» et que le praticien «n'est pas tenu par l'obligation de résultat». Continuant son plaidoyer en faveur de la profession, M. Bekkat estime que le Conseil de l'ordre doit être associé au traitement des plaintes déposée auprès de la justice, d'autant plus que c'est la loi qui le prévoit. «Dans la loi 90/17, une disposition dit que vu la complexité de l'acte médical, la justice peut demander l'avis du Conseil de l'ordre. Nous pensons qu'elle devrait plus souvent demander l'avis du Conseil de l'ordre pour voir si la plainte en elle-même est recevable», suggère-t-il. «Or, regrette-t-il, les procureurs généraux et les juges d'instruction se sont complètement désintéressés de la profession» qui, pourtant, «peut se porter partie civile» aux yeux de la loi et en dépit du fait que «seuls les professionnels peuvent dire si le médecin a fauté ou non, vu la complexité de l'acte médical». l Evoquant la question des praticiens du secteur public qui exercent simultanément dans les cliniques privées, le président du Conseil de l'ordre national des médecins a estimé que la pratique est illégale. «C'est totalement interdit. C'est un délit de détournement de malade», regrettant que cela se passe «au vu et au su des autorités de la santé». «On accepte les règles du jeu dans le public et on va en chercher d'autres quand on est dans le privé. Il est temps de séparer. On ne peut pas être public et privé en même temps, c'est clair», a-t-il dit tout en appelant les citoyens à «assumer leurs responsabilités en signalant ce genre de dépassements. A la décharge de certains médecins, M. Bekkat a signalé que «cela se fait parfois par manque d'équipements dans le secteur public. Il faut, donc, donner au secteur public la place qui lui revient car c'est notre assurance à nous tous Algériens», a-t-il suggéré.