Descartes interprète aussi son rêve comme un avertissement. Il croyait posséder la science et marcher droit, mais voilà qu'il vacille et qu'il ne tient pas sur son côté droit, symbole de sa volonté. Il croyait les autres dans l'erreur, mais voilà qu'ils marchent droit et qu'ils jouissent, contrairement à lui, d'une grande stabilité. Pour le célèbre philosophe, le message du rêve est clair : c'est lui qui est dans l'erreur et les autres qui sont dans la vérité, il doit donc revoir sa démarche intellectuelle. Il interprète le vent violent comme le souffle de l'esprit, bon ou mauvais. Le fait qu'il soit repoussé vers l'église et le collège indique qu'il a encore des choses à apprendre et qu'il doit faire preuve de plus d'humilité. Les ténèbres du deuxième rêve, puis le coup de tonnerre qui fait jaillir des étincelles, c'est l'opposition entre l'inconscience et la conscience, l'ignorance et le savoir. C'est pour le philosophe une prise de conscience, un jaillissement qui annonce son œuvre scientifique et philosophique. Le dernier rêve est presque un rêve lucide. Descartes est angoissé par le sens qu'il doit donner à sa vie. Les pages qui manquent au dictionnaire indiquent que le savoir est incomplet et qu'il doit être complété. Et c'est ce qu'il va s'atteler à faire toute sa vie ! Des psychanalystes ont tenté, eux aussi, d'analyser ces rêves. Ainsi, Francis Paschle, dans Rêve, symbole et interprétation (1981), voit dans ces rêves des rêves d'angoisse : ils expriment la peur d'un monde chargé de menaces qu'il faut censurer. Quant à Freud, il a jugé que les rêves de Descartes sont des rêves «d'en haut» et qu'ils pouvaient être créés aussi bien pendant l'état de veille que dans le sommeil.