Dans le cadre de son programme d'activités annuelles, l'association «La ballade littéraire» de Béjaïa organise, aujourd'hui et demain au Théâtre régional de la ville, un colloque international autour de l'insurrection de 1871. Dirigés par Tassadit Yacine, membre du laboratoire d'anthropologie sociale au Collège de France et directrice d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales de Paris, les travaux de ce colloque aspirent à mettre en lumière cet événement historique d'envergure qui a profondément marqué la résistance algérienne face au colonialisme français. Cette insurrection qu'on baptisa «la révolte des Mokrani» est la plus importante insurrection contre le pouvoir colonial français depuis le début de la conquête de l'Algérie en 1830. Plus de 250 tribus se soulevèrent. Cette révolte fut menée par le cheikh El Mokrani, son frère Boumezrag El Mokrani et le cheikh El Haddad, chef de la confrérie des Rahmaniya. La répression de cette révolte fut terrible et féroce. De nombreux villages ont complètement été détruits et les survivants déplacés. Il y a également eu destruction des institutions cultuelles comme les zaouïas, des impositions répressives, des séquestres collectifs des terres et la déportation de centaines d'Algériens vers la Nouvelle-Calédonie, la Guyane française et la Corse. Une véritable tragédie dont le traumatisme est inscrit au fer rouge dans l'inconscient collectif et sera transmis de génération en génération par la littérature et la poésie orale. Plusieurs conférences sont au programme du colloque dont celles intitulées «Surmonter la tragédie coloniale et construire un avenir solidaire par l'information et la culture» de GeorgesMorin, «Au delà de 1871 : comment devient-on un insurgé ?» de Tassadit Yacine, «L'année 1871, de la commune de Paris au soulèvement en Kabylie» de Benjamin Stora, «Insurrection de Mokrani et conséquences dans la région de Lakhdaria ex-Palestro» de Raphaëlle Branche, «1871, Résistances anti-coloniales» d'Abdelmadjid Merdaci, «Un point d'historiographie : 1871 Mokrani et Cheikh Ahadad» de Fouad Soufi, «L'insurrection de 1871, la morale de l'histoire» de Slimane Zeghidour, «La révolte à Djidjelli Ouanassa» de Siari Tengour, «At Muqran, histoire d'une dynastie et d'un pouvoir politique» de Mouloud Kourdache, «Colonisation et dépossession : le vol des terres, Algérie, Nouvelle-Calédonie, Madagascar» de Françoise Vergès, «Histoire des déportés algériens en Nouvelle-Calédonie» de Mehdi Lallaoui, «1871, stupeur et désarroi dans la poésie kabyle» d'Abdelhak Lahlou, «Nécessité d'une mémoire, au service de l'égalité et de la diversité : l'exemple de l'immigration» de Samya Messaoudi et «1871 dans les mémoires villageoises (région de Tazmalt)» de Rachid Oulebsir. En marge des conférences, il est également prévu une exposition du photographe Salah Oudaha, ainsi qu'une pièce de théâtre, Les trois exils, un texte écrit par Benjamin Stora et présenté par le collectif «Manifeste rien», avec Virginie Aimone et Jeremy Beschon, qui met en scène la condition humaine à travers un pan de l'histoire de l'Algérie. Il est également prévu la projection du film de Mehdi Lallaoui Les Kabyles du pacifique relatant le pénible périple des déportés de 1871. S. B.