De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar L'avenir, qui arrive toujours trop vite, se conjugue, souvent, au présent. C'est aujourd'hui que se conçoivent les réalisations de demain. La génération montante est déjà là, et on ne saurait attendre pour la préparer aux défis qui sont les siens. Parler de relève revient finalement à évoquer une préoccupation du moment vécu. Cette «hantise» se pose avec d'autant plus d'acuité lorsqu'il s'agit d'art et de culture. Synthèse de tous les savoirs et de toutes les techniques possibles, cette discipline requiert une importance capitale dans le développement et l'émancipation de n'importe quelle société humaine. En plus de la connaissance théorique et historique, elle est le résultat de plusieurs expériences personnelles et collectives, et d'un savoir-faire qu'il convient d'acquérir et d'approfondir au quotidien. On ne forme pas un artiste ou un homme de culture. Aucun institut n'en est capable. Il est plutôt question d'une vocation individuelle qu'on doit absolument nourrir et accompagner. A défaut de comprendre cela, nos artistes et nos créateurs sont souvent marginalisés et participent très peu aux missions qui sont censées être les leurs. Les institutions publiques de la culture en Algérie se cantonnent dans une vision très bureaucratique qui s'accommode très mal avec l'esprit innovateur, voire même révolutionnaire, des véritables créateurs. Il va falloir penser à d'autres mécanismes pour créer cette synergie qui serait en mesure d'impliquer tous les acteurs et de venir en aide à toute bonne initiative. Il y a, cependant, des expériences qui ont donné des résultats satisfaisants, malgré le manque de moyens et de ressources financières. Dans un passé très récent, l'Ecole des beaux-arts d'Alger et l'Institut des arts dramatiques et chorégraphiques de Bordj El Kiffan ont réussi la gageure d'offrir un minimum de conditions à des gens qui n'ont pas démérité ensuite. Des monstres sacrés de l'art algérien authentique sont issus de ces deux écoles dont la réputation avait, à un certain moment, dépassé les frontières nationales. De nos jours, le marasme a aussi gagné ces deux fabriques de l'élite intellectuelle. Ce n'est pas tout à fait le désert, mais on en est loin du niveau des années 1970 et 1980. Ce vide a naturellement incité le mouvement associatif pour entreprendre des actions dans ce sens. Partout à travers le pays, on trouve des collectifs culturels qui offrent des formations et des initiations diverses pour encourager les vocations des amateurs. Ateliers de cinéma, compagnies autonomes de théâtre, concours de chant et de musique, encadrement de petites divisions de dessins et de peinture, à chaque association son concept propre. De l'aveu même des pouvoirs publics, l'expérience commence déjà à donner ses fruits. Pour ne citer que l'exemple de la wilaya de Béjaïa, les Journées cinématographiques (Project' heurts), les Rencontres du film documentaire (Cinéma et Mémoire), les Poésiades d'Aït Smaïl (Adrar N'Fad), le Carrefour culturel de la Soummam (Etoile culturelle d'Akbou), entre autres initiatives associatives, font déjà des émules. En plus de l'animation, des dizaines de stagiaires sont annuellement accompagnés et soutenus pour concrétiser leurs œuvres et projets. Profitant de cette expérience, les établissements culturels étatiques se sont lancés ces dernières années dans des actions similaires. La maison de la culture a organisé, récemment, une première édition du Festival national de la chanson kabyle en accordant beaucoup d'intérêt aux amateurs. Le Théâtre régional a, à son tour, initié un mini-festival de théâtre pour enfants en sillonnant toute les localités de la wilaya. La formule, qui a parfaitement polarisé l'attention du public et de tous les acteurs du secteur, mérite toute l'assistance de l'administration et des sponsors. L'appel est lancé.