À une époque où le marketing sportif connaît une période faste et devient même un facteur important, voire décisif dans le développement du sport et sa promotion, le sport algérien reste loin de cette politique économique pouvant s'avérer salvatrice. Qui devrait lui donner un nouvel élan dans un pays qui peine grandement à subvenir aux besoins de toutes les disciplines. Ailleurs, le sport est tout autant capricieux, mais il finit toujours par générer des dividendes que ce soit en termes aussi bien économique que sportif. Laurent Damiani, président de Sporsora (association des acteurs de l'économie du sport), constate «Aujourd'hui, on dénombre six sports majeurs à travers le monde qui sont le football, le rugby, le tennis, le cyclisme, la voile et la Formule 1. Ces sports représentent près de 80% du sponsoring sportif. Viennent ensuite les sports "émergents" comme le golf qui bénéficie de l'attrait d'un grand événement ou la natation avec les succès d'une génération dorée. Puis les sports de niches comme la moto, le patinage, le judo, ... où seules les marques issues de ces univers, souvent des marques techniques, sont présentes en dehors des grands événements. Soulignons tout de même qu'une disparité prévaut à l'intérieur même des "grands" sports : le succès du tennis est principalement lié à Roland Garros, le cyclisme au Tour de France, le rugby à l'équipe de France. Notons aussi que ces événements ou "têtes d'affiche" servent de points d'appuis pour proposer aux partenaires une plateforme de communication intégrant des événements de second rang qui seraient "invendables" seuls». Le sport roi détient logiquement la grande part du marché sponsoring partout dans le monde. Une discipline qui vend très cher, mais en Algérie, les choses sont à l'antipode de ce qui se fait ailleurs. Bien que des opérateurs nationaux tentent de venir en aide au secteur, la gestion et les compétences humaines restent inadéquates avec les intentions affichées par la Fédération algérienne de football qui tente, en vain, de faire entrer la balle ronde nationale dans une dimension universelle. Qui n'avance pas, recule... Ce qui se passe dans nos clubs depuis que l'opération professionnalisation a été lancée est très préoccupant. Des revenus en nette baisse et des dépenses en hausse vertigineuse, les responsables, qu'on dit pourtant sans le sou, n'hésitant pas à s'arracher ce qu'il y a de mieux en matière de joueurs en y mettant des paquets d'argent tombé du ciel (comme par miracle) au moment où leurs clubs alignent les déficits. Sauf que nos rares pépites commencent, pour celles qui le peuvent, à fuir un championnat qui n'attire ni les investisseurs ni le public. Le marché des transferts, comme on peut le constater, dévoilant bien des choses. Un football qui baigne dans l'informel et l'argent brassé d'on ne sait où est utilisé n'importe comment. Des sommes à 7 voire 8 chiffres apparaissent désormais dans les journaux et ne choquant presque plus. Un Eldorado et des personnages qui se font des fortunes dans un championnat (très) pauvre en spectacle. Les dirigeants traînent de faramineuses ardoises envers leurs prestataires de services entre transporteurs, hôtels ou restaurateurs, sans parler de dépenses dont on ne parle jamais. Mais, surtout, ne règlent presque jamais leurs joueurs jusqu'au dernier dinar. Pas un seul club, ou presque, qui soit à jour dans le paiement de ce qui, en principe, est dû aux joueurs. La banqueroute s'impose-t-elle comme la solution face à cette situation ? Les quelques partenaires de clubs de football, les équipementiers notamment, sont confrontés à cette phobie nommée «contrefaçon». L'une des principales sources de revenus pour les clubs, le marketing, et par ricochet le marchandising, n'est pas ce qui se fait de mieux en Algérie. Pas de droits protégés sur la marque donc et l'argent public qui se fait rare, coule de moins en moins dans les caisses vides (du moins c'est ce qui est ressassé à longueur de saison pas toujours calmes) des clubs. Pour ne rien arranger, le contrat décroché par la Ligue de football professionnel avec l'Entv ne va pas au-delà d'une somme «symbolique» évaluée à 210 millions de dinars. Pour illustrer la disparité qui existe dans l'environnement du sport-roi, la fédération distribue le même forfait -une somme dérisoire- pour tous les clubs quel que soit le nombre de fois où leurs matchs sont retransmis à la télévision. Un «déséquilibre» qui renforce le manque de transparence et le flou dans lequel la balle ronde est plongée au risque de suffoquer d'un moment à l'autre. Cette bulle qui ne cesse d'enfler risque de gagner en proportion et peut exploser à tout moment pour mettre en lumière bien des secrets et des cahiers des charges jamais respectés par la majorité des clubs. Jusqu'à quand cette situation va-t-elle perdurer ? À quand le grand nettoyage ? Des solutions s'imposent avant que notre football, déjà sous perfusion, ne sombre dans un coma profond qui pointe le bout de son nez. Grosses dépenses, décadences et perte de cadence Le constat interpelle. Le retard qu'accuse cette opération de professionnalisation est évident. Des clubs déficitaires à coup de milliards pour cause de recettes largement inférieures aux dépenses. Résultat logique : tous les indices indiquent que la formule devrait être revue pour mettre le doigt où ça ne va vraiment pas et rectifier le tir. Le spectre de la faillite rôde de plus en plus sur les Sociétés sportives par actions (Sspa), qui représentent les clubs professionnels. La situation financière est (très) critique. Etonnement, personne ne songe à mettre la clé sous le paillasson. Avec cette clé, on arnaque, on détourne de l'argent et on ferme les portes devant la compétence, empêchée par divers subterfuges, de se mettre au service de cette bonne volonté d'aider la balle ronde algérienne à entrer dans une nouvelle dimension, surtout dans son volet gestion. Aujourd'hui, la «Ligue 1 Mobilis» est devenue un espace où l'on monnaie son «talent». Les joueurs s'investissent moins, produisent peu et gagnent plus. Au final, c'est le niveau qui prend un sérieux coup et la réputation de notre football qui perd en crédibilité auprès d'autres pays. La mayonnaise tarde à prendre alors que l'argent versé dans le sport le plus pratiqué au monde ne cesse d'amplifier. Le nerf du football gonfle et risque d'exploser d'un moment à l'autre. Cependant, contrairement ou curieusement, l'instance footballistique algérienne devient un exemple en matière de gestion. Devenue une fédération libre avec ses propres sources de financement, la FAF souhaite que les différents teams qui sont sous son aile empruntent la même voie avec une politique de marketing et une gestion financière bien étudiées. Il faudra donc frapper avec une main de fer si l'on souhaite redresser la barre et mettre tout le monde dans le rang. Appliquer tout simplement les lois en vigueur. Facile à dire, mais tellement difficile à appliquer. C'est en tout cas l'impression générale qui se dégage de ces quatre 1res années de professionnalisation toujours au point mort. M. T.