De notre correspondant à Oran Samir Ould Ali Samedi 21 février dernier, le monde de l'éducation est (encore une fois) ébranlé par le meurtre d'un collégien de 17 ans, homicide commis par l'un de ses camarades du même âge. Le drame a eu lieu aux Amandiers (ouest de la ville), quartier chaud réputé pour être le théâtre de nombreuses scènes de violence. Début janvier, un jeune homme de 25 ans est mortellement blessé à coups de couteau par deux individus dans le quartier de Gambetta, quartier situé dans l'est de la ville. Motif de l'agression : le refus du jeune homme de se laisser dépouiller de son argent et de son téléphone portable. Qu'importe le motif pour lequel le collégien agresseur s'en est pris à son camarade de classe (il s'agirait de jalousie), il faut plutôt s'interroger sur les raisons qui amènent les écoliers à se rendre en cours armés de couteaux. Comme il faudra bien se demander pourquoi, dans leur vie de tous les jours, de plus en plus de jeunes algériens sont équipés de couteaux, de poignards, de sabres, de tournevis… Surtout, il conviendrait de s'interroger sur l'origine de toute cette violence et sur l'impuissance de la société à s'en défaire. Pas de pitié pour les agresseurs Si les Amandiers, Gambetta, Sidi El Houari, Derb et autres El Hamri, l'USTO et St-Pierre sont considérés comme étant les plus chauds quartiers de la ville d'Oran, le phénomène des agressions s'est désormais élargi à l'ensemble des quartiers, quel que soit leur «standing». La cité Point du jour, quartier résidentiel ordinairement calme et serein, a été le théâtre de plusieurs agressions, ces dernières années. Du collégien qu'on déleste de son mobile, supposé être de haute qualité, à la ménagère qu'on soulage de son porte-monnaie, en passant par les jeunes filles qu'on tente d'intimider, les agresseurs ne doutent plus de rien et opèrent même, parfois, en plein jour. Plus encore, ces derniers temps, quatre villas ont été cambriolées en l'espace d'une semaine, à la grande stupeur des habitants de la cité : «Personne n'est plus à l'abri, déplore un pharmacien exerçant dans le quartier. On est en danger même chez soi !» Ce n'est pas pour rien que plusieurs propriétaires ont installé des caméras de surveillance dans leurs maisons, que les femmes font attention à ne pas porter de bijoux trop clinquants et que les habitants n'hésitent plus à se faire justice eux-mêmes : «Quand un agresseur ou un voleur est pris en flagrant délit, il paie pour tous les autres», ont coutume de menacer les jeunes du quartier. C'est ainsi qu'à plusieurs reprises, des malfaiteurs ont reçu la raclée de leur vie, celle dont ils se souviendront certainement à jamais : «Un agresseur a eu la malchance d'être arrêté par des habitants du quartier. Il a été sérieusement corrigé et je ne crois pas qu'il se hasardera encore dans la cité», témoigne une femme du quartier. Dans tous les quartiers d'Oran, c'est la même situation : on ne livre que très rarement l'agresseur ou le voleur aux services de police, on préfère le corriger soi-même : «A quoi cela sert-il de les remettre à la police s'ils sont libérés quelques jours plus tard. Après une bonne raclée, ils réfléchiront à deux fois avant de s'aventurer par ici», explique-t-on parmi les jeunes «justiciers». Des chiffres toujours en hausse. L'année passée, les services de la sûreté de wilaya ont traité près de 14 700 affaires relevant de la criminalité, soit une augmentation de 4 000 par rapport à 2007, année durant laquelle le nombre des affaires était de 10 557. Selon le bilan 2008 présenté par la police judiciaire, il a été enregistré 2 084 affaires de coups et blessures volontaires, 23 viols, 22 enlèvements et séquestrations ainsi que 2 331 affaires de vols. En outre, 45 affaires d'homicide volontaire, 5 homicides involontaires et 1 assassinat ont été traités par la police qui précise avoir arrêté 10 998 personnes. De son côté, le groupement de la Gendarmerie nationale a mené 136 opérations coup de poing à travers les quartiers chauds de la ville, ce qui a permis l'arrestation de plus de 4 300 personnes dans le cadre de 54 275 affaires traitées en 2008. Les interventions de la gendarmerie ont permis d'identifier 327 véhicules et d'arrêter 86 personnes pour des délits liés au vol, à l'usage et la détention de stupéfiants et au port d'armes prohibées. C'est ainsi que, depuis bientôt dix ans, la wilaya d'Oran se classe parmi les trois premières villes les plus touchées par la criminalité malgré les multiples campagnes d'interpellation lancées soit par la police, soit par la gendarmerie. Pour l'année 2009 encore, hormis les deux crimes cités plus haut, les services des urgences médicochirurgicales indiquent réceptionner quotidiennement une moyenne de quinze cas d'agression. Pour le seul mois de janvier, la police a interpellé 3 674 personnes pour un examen de situation, lors de 950 opérations de lutte contre la criminalité et la délinquance. Sur l'ensemble des interpellés, 77 ont été déférés devant la justice, 20 étaient déjà recherchés et 4 individus en possession d'armes prohibées.