Le tarissement des sources de financement du terrorisme revient, ces derniers jours, comme un leitmotiv dans les déclarations des chancelleries étrangères. Brusque revirement de situation, tous les diplomates, occidentaux et moyen-orientaux, plaident à l'unisson dans ce sens, en pointant un doigt accusateur vers le minuscule émirat du Qatar. S'agit-il d'une réelle prise de conscience ou juste un artifice de langage pour apaiser la crise qui affecte aujourd'hui le Conseil de coopération du Golfe (CCG) ? Le doute est permis. Quand l'Algérie, à la fin des années 1990, appelait le monde entier à l'assèchement de la trésorerie des groupes extrémistes transnationaux qui l'étouffaient, peu d'échos lui ont été réservés. Les terroristes recueillaient, alors, à tour de bras des fonds sur les trottoirs de Londres, Paris, Hambourg, Washington et partout ailleurs. Nul ne s'était opposé au massacre systématique des populations algériennes. A la fin des années 2000, l'Algérie a aussi proposé la criminalisation du payement des rançons aux groupes terroristes, sans bénéficier de l'appui nécessaire des grandes puissances de ce monde. Il a fallu convaincre l'UA et le groupe des 77, avant que l'Assemblée générale de l'ONU n'adopte, enfin, une résolution à ce sujet qui, toutefois, sera publiquement violée par de nombreux Etats dont des membres permanents du Conseil de sécurité. A la lumière de ce bref éclairage, quel crédit accordé à cette curieuse levée des boucliers diplomatiques ? Presque aucun. La présentation de Qatar comme le seul et l'unique bailleur du terrorisme renseigne sur le peu de sérieux de cette campagne. Tous les terriens savent que les vrais sponsors de la barbarie sont bien plus puissants et plus influents que ce micro Etat qui sert aujourd'hui de bouc émissaire. Les Américains, les saoudiens, les Européens et les israéliens ont infiniment de reproches à se faire dans l'entretien de cette terreur qui a jeté des millions d'êtres humains à la mer. L'histoire retient que ce fléau a été créé en Afghanistan durant les années 1980 par les Etats-Unis et leur alliés dans la région (saoudiens, pakistanais et israéliens, en première ligne). Par la suite, d'autres grandes puissances ont aussi manipulé cette bête immonde pour servir leurs intérêts. Le Qatar n'est, en fait, qu'un pion insignifiant sur l'échiquier. Pour faire un peu plus sérieux, il va falloir que ces grands commanditaires du terrorisme fassent nettement œuvre de repentance et se mettent sérieusement à revoir, de fond en comble, leur politique d'ingérence et de manipulation de l'islamisme politique dans toutes ses déclinaisons. Mais cela reviendrait à leur demander de renoncer volontiers à leur hégémonie dans une région hautement stratégique. Peu probable, donc, qu'ils acceptent un tel sacrifice. Alger accueille aujourd'hui un atelier international consacré à la lutte contre l'extrémisme violent et le terrorisme au moment où des prêcheurs officiels au Moyen-Orient continuent impunément de répandre leur venin à travers la télévision et les médias. Non, bien avant de parler d'argent, il faut, en premier, faire taire ces provocateurs autorisés. K. A.