Il y a moins d'une semaine ils étaient à couteaux tirés, battant chacun le rappel de leurs troupes, se préparant à sonner l'hallali de l'«empêcheur de tourner en rond». Au stade où ils en étaient, pourtant, nulle partie n'était dans une position de bête blessée en attente du coup de grâce. L'un n'avait pas encore bouclé son deuxième mois comme Premier ministre alors que l'autre, puissamment porté par un courant fort et influent des patrons algériens, continuait d'engranger sans restriction des marchés publics volumineux. Même la crise économique et financière, consécutive au dévissement sans précédent du prix du baril, semble n'avoir eu que peu d'effet contraignant sur le groupe d'entreprises de Ali Haddad. Ce n'est pas une vue de l'esprit, ce dernier a un carnet d'adresses aussi volumineux et pesant que son carnet de commandes épaissi par les ODS de l'administration. C'est-à-dire la commande… publique. Puis subitement, alors que le ciel des affaires et des marchés publics était gros de nuages de mauvais augure, les communiqués peu amènes et les déclarations aux lourds sous-entendus, de part et d'autre, cessèrent. On sort le calumet de la paix faisant office de narguilé de la réconciliation et on s'invite à une grand-messe entre partenaires d'un même pacte économique et social conclu sous la férule du président de la République. Evidemment qu'un Deus Ex Machina est descendu du ciel avec sa machine faiseuse de miracles. Vous avez compris ou on doit aussi vous le nommer ? Regardez bien, les trois protagonistes du clash ne sont pas nés de la dernière pluie. Tebboune, c'est plus de quarante ans d'exercice du pouvoir, de l'administratif à la tête de wilayas aux maroquins dans des ministères importants. Sidi Saïd, indétrônable successeur de Abdelhak Benhamouda à la tête de la centrale syndicale doit sa survie comme patron de l'Ugta à quelques coups de pouce redoutables d'efficacité. Plusieurs fois, des syndicalistes comme lui ont pu réunir les majorités nécessaires pour le descendre de son piédestal. Ce fut en vain. C'est dire…Quant au troisième protagoniste, il pèse ce que pèsent ses marchés. Tebboune les estime à 450 milliards de dinars. C'est comparable à une puissance de voiture bélier capable d'ouvrir bien des portes. Non, il est impossible, ou du moins difficilement imaginable, que ces trois gros caractères aient pu décider de leur seul propre chef qu'ils vont se réunir demain dimanche. Et même plus, qu'ils vont fixer la date de la prochaine Tripartite et arrêter son ordre du jour. Finies les «amabilités» échangées via la presse, oubliées les menaces à peine voilées susurrées, on remise tout cela dans le placard des mauvais souvenirs tout et on continue à faire comme avant. Ce n'est peut-être pas la plus mauvaise des solutions à un différend entre «partenaires» qui, s'il devait s'installer dans la durée, ne manquerait pas d'impacter une conjoncture politique, économique et sociale déjà branlante. Et qui a surtout besoin de moins d'incertitudes et de plus de visibilité et de clarté. A. S.