Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Le faste caractérisant les réunions de famille qui coïncident avec la fin du Ramadhan a fini par mettre à genoux les plus prévoyantes des ménagères kabyles qui ont bien résisté, par des calculs impénétrables, pendant le reste de ce mois. Il y a eu tellement de manques et de tracas à régler durant la dizaine de jours des préparatifs de la fête de l'Aïd et de la rentrée scolaire, avec notamment les nouveaux «réglages» de Benbouzid, ministre de l'Education, qui ne sont toujours pas les bienvenus parmi la communauté scolaire, que la riposte des victimes a été faible, à l'exception des enseignants, poussés à l'extrême pauvreté, qui ont pu s'offrir une belle rentrée des classes inaugurée par une grève et des journées de protestation. Comment ne pas réagir ainsi alors que, pendant trente jours, les factures de plus en plus salées s'entassaient sans que les responsables de famille voient une amélioration dans leur menu. On mange la même chose, presque des plats «ordinaires» avec parfois deux à trois fois les prix habituels. «A voir la note de ce qu'on a dépensé du premier jour jusqu'à l'Aïd, on croirait qu'on était logé dans un cinq étoiles, qu'on mangeait des crevettes royales et du caviar tous les jours», exagère, peut-être, Ahcene, la cinquantaine, retraité de la fonction publique à Tizi Ouzou. Les prix des fruits et légumes affichés samedi et dimanche derniers à l'occasion de la fête de l'Aïd, même dans les grandes surfaces connues pourtant pour leurs prix «raisonnables» ont sûrement achevé le peu de patience qui maintenait debout devant les étals de l'alimentation générale Dda Ahcene. La pomme de terre à 48 DA le kilo, la courgette à 75 DA, la carotte à 80 DA, la tomate à 90 DA, le raisin à 140 DA, le melon à 55 DA, le poulet à 320 DA et la viande rouge à 800 DA. Il s'agit là de tarifs moyens basés sur ceux affichés dans plusieurs points de vente de la wilaya de Tizi Ouzou. Le problème de pénurie de produits alimentaires tel que vécu par le passé pendant de longues années ne s'était pas posé pendant le mois de Ramadhan à travers les localités de la wilaya de Tizi Ouzou où la disponibilité de certains articles «exotiques» n'a pas fait défaut. Une grave inflation des prix avait dominé les marchés de gros et de détail de la région où l'on avait relevé un seul manque du côté des clients, abattus : pénurie de liquidités. «Avant le problème était le contraire de cette situation, il y avait de l'argent, la vie n'était pas tellement chère mais les produits alimentaires, même de base, faisaient défaut, les pénuries de semoule, de sucre et de gaz par exemple, étaient souvent déclenchées sur presque tout le territoire national», se souvient un père de famille qui, sans trop regretter cette époque, se demande comment les choses ont changé aussi rapidement sans que l'Etat intervienne pour réguler les transactions et punir les spéculateurs. «Vous croyez que les gens vont se taire longtemps avec ces augmentations des prix des produits qu'on dit subventionnés ; le pays est supposé créer des richesses qui peuvent satisfaire les besoins de tous les pays d'Afrique du Nord ; nous sommes une région très riche, alors pourquoi cette pauvreté ? Il est clair qu'il y a de la corruption et une non-gestion des ressources. Ainsi, tôt ou tard les gens vont sortir dans la rue», prévient un enseignant de lycée dans la daïra de Aïn El Hammam, membre d'un syndicat autonome.