Photo : Sahel Par Badiaa Amarni La lancinante question des matériaux de construction, surtout du ciment, reste plus que jamais d'actualité, et ce, malgré la décision prise par le gouvernement d'importer un million de tonnes pour ne pas risquer de compromettre les nombreux projets lancés dans la construction et même dans les infrastructures de base. Reposée encore une fois, à l'occasion du Salon international du logement et de l'immobilier (LOGIMMO), qui s'est déroulé la semaine dernière dans l'enceinte du parking de la Tour d'affaires ABC Algeria (Hilton), cette difficulté reste entière et les professionnels du secteur de la construction ont évoqué le problème des chantiers à l'arrêt. Même si leur nombre n'est pas réellement identifié, il reste qu'«ils sont des centaines» à se retrouver dans cette situation avec toutes les répercussions que cela peut avoir sur les délais de réalisation qui pénalise à la fois le promoteur et le postulant au logement. Pour tenter de faire face à ce problème, beaucoup d'entrepreneurs essayent chacun à sa manière de trouver une solution, et, parfois, les autorités locales s'impliquent. Tous s'accordent à dire qu'ils achètent le ciment en deuxième ou troisième main, ou simplement au marché parallèle pour contourner cette difficulté. Promoteurs privés, surtout, mais aussi ceux appartenant au secteur public, restent impuissants devant cette problématique de la pénurie du ciment qui «survient pratiquement tout au long de l'année». Un responsable au niveau de l'OPGI de Mostaganem assure qu'aucun chantier n'est à l'arrêt dans toute la wilaya. Cela étant, il confirme que les quantités livrées par les entreprises du ciment de la région ne sont pas suffisantes pour couvrir les besoins, ce qui pousse la plupart des sociétés de construction à acheter en deuxième main à un prix qui atteint, parfois, les 600 DA le sac. Généralement, explique-t-il, l'OPGI établit le tonnage du ciment que nécessite tel ou tel projet et remet à l'entreprise qui décroche le marché un certificat qu'elle-même présente à la cimenterie qui procède à la division des quotas sur le nombre des mois des délais de réalisation. Les autorités locales à la rescousse Au niveau de l'OPGI de Tlemcen aussi, on nous informe de l'existence des pénuries qui se produisent de temps en temps mais aussi des mesures prises par les autorités locales pour les contrecarrer. Le chef de projet au niveau du stand de cet organisme rappelle que le ciment est un problème national, et que l'Etat a pris des mesures pour satisfaire tous les partenaires, en avantageant des importateurs pour introduire des quantités suffisantes sur le marché national afin d'assurer pour de bon le déroulement des chantiers. A Tlemcen comme partout ailleurs, des interventions du wali pour mettre en avant les chantiers prioritaires ont permis d'atténuer la pression. «Il est intervenu dans ce sens au niveau des usines du ciment pour prioriser les programmes de l'Etat, notamment le logement social», nous explique le responsable du stand de l'OPGI de Tlemcen rencontré au LOGIMMO 2009. Des arrêts de chantier, «cela arrive souvent», selon lui, et les entrepreneurs «sont pris par les délais qui sont en plus impardonnables». Parfois, quand un promoteur est obligé de couler une dalle, «il achète en deuxième main, mais le plus souvent nos entreprises savent travailler et programment des quantités suffisantes en se rapprochant des usines». Parfois, et c'est une autre solution adoptée, «les entreprises s'entraident entre elles en prêtant et en se prêtant mutuellement des quantités de ciment». Sur d'éventuels surcoûts, notre vis-à-vis dit que le montant de réalisation ne change pas mais que ce sont juste les délais de réalisation qui se rallongent. Et encore, le rallongement du programme à cause de la pénurie de ciment «n'est permis que sur une décision du ministère de l'Habitat ou du gouvernement». Les articles du marché contracté ne prévoient pas le prolongement de délais concernant la pénurie de ciment, et ce, quelles que soient les contraintes. Le chantier doit être mené jusqu'au bout. Les promoteurs privés, les plus touchés Du côté des promoteurs privés, le même problème survient si ce n'est avec plus d'acuité. La pénurie des matériaux de construction, notamment le ciment et la brique aussi, constitue un point noir de ces entrepreneurs. Pour la promotion immobilière Aboura, à Alger, qui réalise des logements promotionnels et des hôtels dans le cadre du développement du tourisme en Algérie, des quotas mensuels au niveau des cimenteries de Meftah et de Chlef avec lesquelles elle est conventionnée sont délivrés. «Mais à chaque fois, il ya une diminution des quotas sans compter les retards dans la livraison ou encore la hausse des prix au marché parallèle», nous indique Mlle Sadi, responsable commerciale. La gestion des chantiers devient très difficile et des retards conséquents dus à ces pénuries sont relevés. «Parfois, les retards pour la livraison des logements vont jusqu'à une année, mais nous faisons de notre mieux pour que nos chantiers ne soient pas à l'arrêt.» Plus que cela, «nous prenons sur nous ce problème pour ne pas le répercuter sur les clients même en termes de prix qui restent fixés malgré des surcoûts que prend en charge l'entreprise». Notre interlocutrice n'a pas manqué d'évoquer les difficultés d'acquisition des assiettes de terrain qui reviennent «trop cher», ce qui se répercute sur le prix du m2 qui oscille entre 70 000 et 90 000 DA. Des facilitations sont sollicitées. Un autre responsable d'une entreprise privée, qui a préféré s'exprimer dans l'anonymat, parle encore de «mafia du ciment». Il s'interroge «comment des gens arrivent à se procurer encore des bons de ciment s'il ya pas une complicité avec des gens à l'intérieur des usines, pour revendre le produit au marché noir». La solution doit émaner des services de contrôle et de régulation qui doivent «s'y mettre pour faire leur boulot comme il se doit et cesser d'accuser les honorables professionnels du bâtiment». Car les plus grands perdants dans toute cette affaire, «c'est nous, car nous sommes tenus par des délais vis-à-vis des maîtres d'ouvrage». Et de conclure que, n'était la mafia du ciment, l'Etat ne serait pas obligé d'aller importer ailleurs. Bien d'autres problèmes ont été soulevés par les professionnels du secteur à l'occasion du LOGIMMO, entre autres la flambée, parfois, d'autres, produits à l'exemple de l'acier qui a connu l'année dernière une grande flambée (11 000 DA la tonne au lieu d'un prix initial entre 4 800 et 5 200 DA). L'Etat se doit de prendre toutes les mesures nécessaires à même de résoudre ce problème des matériaux de construction pour mener à terme tous les projets inscrits et ceux déjà lancés, ou en voie de lancement.