Photo : Riad De notre correspondant à Constantine A. Lemili Les risques probables d'implosion du FCE au sens que l'édifice a été très vite ébranlé à la suite d'un retrait des entreprises publiques de son sein, semblent constituer le meilleur indicateur quant à la perception du code de gouvernance par des entreprises auxquelles il est initialement destiné. N'est-il pas dit dans la bible constituée par les patrons que «par principe, toutes les entreprises algériennes, sans exception aucune, sont concernées par la bonne gouvernance. Cependant, le présent code n'intègre pas les entreprises dont les capitaux sont intégralement étatiques et dont la problématique renvoie à une approche spécifique, relevant notamment du bon usage des deniers publics». Nous nous sommes donc rapprochés des manageurs des entreprises privées implantées dans la wilaya de Constantine pour connaître leur appréciation sur le «code de bonne gouvernance». Au-delà du fait qu'ils ont, à l'unanimité, exigé que soit préservée la confidentialité de leur identité, nous saurons que, dans leur majorité, et même s'ils se targuent du titre pompeux de capitaines d'industrie quand ils se bousculent au portillon lorsque débarque une délégation étrangère ou qu'il arrive qu'un ambassadeur visite la ville des Ponts, ils ne savent même pas ce qu'est «le code de gouvernance».Pour ceux qui sont membres du FCE, leur adhésion répond souvent à d'autres considérations. L'un d'eux nous dira que sa boîte «s'acquitte chaque année de 180 000 dinars, ce qui représente notre cotisation». En fait, nous saurons au cours de la discussion que l'adhésion n'a pour seule raison que l'appartenance à un gotha de patrons qui plus est représentatif au sens où il a langue avec le gouvernement et est en contact régulier et direct avec les organisations patronales étrangères et souvent les chancelleries, et, ce faisant laisse entrevoir des avantages. Exit donc l'un des principes moteurs du code de gouvernance selon lequel «la gouvernance d'entreprise renvoie à une démarche libre et volontaire de celle-ci, en vue d'introduire un maximum de rigueur et de transparence dans sa gestion, son administration et son contrôle». Un ancien cadre en poste dans un très important laboratoire de fabrication de produits pharmaceutiques, avec lequel nous avons pris attache nous répondra en affichant un étonnement sincère. «C'est sérieux quand vous parlez de code de gouvernance ? Qui serait naïf, exception faite des salariés qui s'accrochent vaille que vaille à leur poste en raison de la difficulté de trouver un emploi, au point de croire qu'un patron du secteur privé puisse se revendiquer de respecter un code de gouvernance ? Autrement dit, faire sien le respect de la morale l'éthique. Vous savez, tout au long des deux années que j'ai passées à servir mon ancien employeur, tout ce que j'aurai retenu, ce sont les coups fumeux, les montages financiers bidons, l'arnaque sur l'importation, l'exportation, le harcèlement administratif notamment à l'encontre du personnel féminin, les textes de loi méprisés, les licenciements abusifs, des semaines de 58 heures (l'heure du déjeuner incluse) et le meilleur, je vous le laisserai pour la fin, le SNMG à 15 000 dinars. Malgré le fait qu'il est censé être en vigueur depuis janvier dernier, il demeure toujours à 12 000 DA. J'ai quitté cette boîte le jour où j'ai dit tout ce que j'en pensais au propriétaire», dira-t-il. Pour avoir une idée de la réalité d'un code de gouvernance au sein des entreprises privées, nous nous sommes également rapprochés de l'inspection territoriale du travail. L'un des inspecteurs qui a accepté de nous en parler dira : «Le respect des textes ? Malheureusement si les travailleurs… les premiers concernés ne nous saisissent pas, comment voulez-vous que se justifie une quelconque verbalisation d'un employeur ? Mieux, même sur les lieux de travail, quand nous nous y rendons pour un contrôle inopiné, les travailleurs ne disent jamais rien.» Même si cela pourrait paraître arbitraire, nous en concluons que le fameux code de gouvernance n'est qu'une vue de l'esprit, une sorte de «machin» qui fait bien parce que cela fait de son temps… sans plus.