De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Plus de 90% des malades admis ou consultés font fi des frais fixés par l'Etat pour redresser un tant soit peu les efforts financiers consentis dans les hôpitaux. La contractualisation entre en vigueur peu à peu. La sensibilisation est hautement requise pour obliger notamment les salariés assurés à présenter leur carte CHIFA aux bureaux d'entrée des hôpitaux afin de justifier les soins prodigués et donc les faire facturer. Gérer l'argent de l'Etat investi dans les hôpitaux, rationaliser la gestion des ressources sous leurs formes matérielles, humaines et financières, c'est ce qui constitue le souci d'une partie de la réforme hospitalière dans le cadre de laquelle s'inscrit la contractualisation dans les différentes structures de santé publique. La démarche activée en 1998 reste toutefois à l'état quasi embryonnaire dans de nombreuses structures sanitaires, à l'exception de quelques hôpitaux désignés comme établissements pilotes, où cependant elle est souvent à l'état de démarrage. Trois départements ministériels, santé, travail et solidarité), en accord avec les caisses d'assurances, définissent ladite contractualisation, outre la plate-forme précédant sa mise en œuvre, c'est-à-dire la préparation des bureaux d'entrée, la formation du personnel qui prendra le relais entre la structure de santé publique et le «pourvoyeur-assureur». Le seul problème qui persiste est relatif au mode de la prise en charge des personnes démunies. Quel sera le type de «remboursement» vis-à-vis de cette frange non assurée ? La wilaya de Constantine a entamé ce dispositif «partiellement» depuis près de trois mois. Choisie comme wilaya pilote pour activer progressivement cet nouveau mode de gestion hospitalière, la capitale de l'Est s'y implique en attendant la finalisation incessamment de ce projet entamé à la faveur de la réforme hospitalière prônée et mise en branle par le président de la République, et relayé par les ministres qui se sont succédé à la tête du secteur. «Depuis la mise en œuvre de la gratuité des soins au niveau des structures hospitalières et cela remonte à 1974, le support de gestion au sein des organismes de santé publique a enregistré un abandon», analyse une source du CHU Benbadis. Cette mauvaise gestion des ressources qui a longtemps sévi a grevé les caisses de l'Etat. Mais pas seulement, elle a ouvert aussi la voie à des comportements rédhibitoires, tels les passe-droits et le laisser-aller qui ont creusé les déficits. «Rares sont les citoyens qui s'acquittent des frais de soins ou d'hospitalisation. Malgré les tarifs affichés et allant de 50 à 100 DA selon le type de soin ou de spécialité offert», confirme la même source. Ce qui a engendré une insatisfaction chez les bailleurs de fonds que sont la CASOREC et les caisses étatiques qui en payent le lourd tribut. Ainsi, ce constat a amené les pouvoirs publics à mettre en place un nouveau mode de management et de gestion pour rentabiliser les hôpitaux et par ricochet garantir essentiellement aux patients des soins de qualité. «C'est un mode de gestion et de financement des soins des hospitalisations dans les établissements publics et ce, dans le but d'avoir une gestion rationnelle des ressources humaines, matérielles et financières», explique le directeur des activités pédagogiques et médicales, le professeur Abdou, qui est en charge du volet des contractualisations. Pour l'heure, il faut savoir que le CHU de Benbadis dépense sans compter dès lors que les pouvoirs publics mettent le paquet. «Plus de 90% des malades ne payent même pas le dinar symbolique pour les soins qu'ils bénéficient», affirme une source concordante. L'approche susmentionnée consiste en l'élaboration d'un triptyque associant les ministères de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, du Travail et de la Sécurité sociale et de la Solidarité nationale. Si, pour les deux premiers départements le consensus aura été trouvé pour fixer les axes autour desquels s'articule la contractualisation, il reste à trouver une voie favorable pour les démunis dont les soins hospitaliers sont assurés par le troisième département, en collaboration avec les Directions de l'action sociale de chaque wilaya. Le ministre de la Santé, Djamel Ould Abbès, est appelé à sceller cette alliance pour permettre à la contractualisation d'être effective dans les hôpitaux. Concrétisation qui prendra certainement du temps, car «le changement mis en place doit être évalué progressivement au fur et à mesure de son application», atteste notre même source, indiquant que, pour ce faire, il faut s'apprêter à des étapes intermédiaires comme la réhabilitation des bureaux d'entrée, qui est une opération nécessitant une informatisation et une formation du personnel. «Cela se traduit par le traitement du dossier du patient dont l'identification des assurés sociaux (IDAS) pourra faciliter la facturation», explique le Pr Abdou qui estime que, sur ce plan, le CHU a déjà entamé cette identification grâce aux cartes CHIFA. Et la CNAS a doté la structure du support informatique requis pour lire les cartes. En ce qui concerne les démunis sociaux, c'est l'ancienne formule qui est toujours appliquée dans l'acquittement des factures. Afin de concrétiser ce volet de la réforme hospitalière, le CHU Benbadis entend réhabiliter la fiche navette qui suit le malade et sur laquelle se trouve un résumé standard de santé qui mentionnent les pathologies pour lesquelles le patient a été traité. S'agissant du coût des soins, il s'avère que l'Etat a opté pour le prix moyen de journée d'hospitalisation par établissement et par service (médecine, chirurgie, spécialité coûteuse…). La contractualisation ne vise pas seulement une rationalisation, voire une récupération des pertes sèches occasionnées aux hôpitaux. A terme, elle entraînera une évaluation rationnelle de tous les services dont les retombées seront bénéfiques sur la qualité des soins. En d'autres termes, le CHU «demande des comptes aux services et aux médecins».