L'auteur d'origine camerounaise, considérant les sommes colossales dépensées à l'occasion de ce grand-rendez sportif, soulève des interrogations sur les drames sanitaires et les efforts qui devront être fournis pour l'émancipation économique globale des citoyens les plus pauvres dans le pays de Mandela Par Sihem Ammour Eugène ébodé, auteur d'origine camerounaise, présent lors du deuxième Festival panafricain d'Alger (Panaf 2009), auteur de la Transmission, ouvrage réédité par le ministère de la Culture, présent également au Salon international d'Alger pour promouvoir la littérature africaine et encourager l'accessibilité du livre aux lecteurs africains, a marqué de sa plume l'organisation de la première Coupe du monde sur le continent africain, notamment en ouvrant son blog à la réflexion sur la Coupe du monde 2010. Dans sa chronique intitulée «Mon panthéon des footballeurs africains», où il a dressé une liste de «ces athlètes d'exception qui nous ont fait rêver ou qui continuent à soulever l'enthousiasme des foules dans les stades et en dehors», il entame son écrit en soulignant : «En accueillant la Coupe du monde de football en 2010, l'Afrique du Sud permet enfin au continent africain d'entrer dans le cercle envié des organisateurs de l'un des événements les plus importants au monde. Au-delà des aspects sportifs, de la maîtrise des manifestations proprement dites, quels effets aura ce raout planétaire dans un pays encore en transformation, après avoir accompli une révolution politique capitale sous l'inspiration de Nelson “Madiba” Mandela.» Toutefois, l'auteur d'origine camerounaise, suite aux sommes colossales dépensées à l'occasion de ce grand-rendez sportif, soulève des interrogations sur les drames sanitaires et les efforts qui devront être fournis pour l'émancipation économique globale des citoyens les plus pauvres dans le pays de Mandela. Il ajoute dans cette optique : «Plus largement, quel bénéfice autre que symbolique l'Afrique tirera-t-elle de la Coupe du monde ? La valse des millions, de plus en plus folle, qui animent les “transferts de joueurs” ne va-t-elle pas finir par tuer un sport devenu absurde car trop déraisonnable ? Que dire du football féminin et de la situation du sport féminin en général en Afrique ? Pourquoi le football, malgré le très beau succès du Ventre de l'Atlantique de Fatou Diome, inspire-t-il si peu les romanciers et les romancières ?» Rappelons que le football est la deuxième grande passion du talentueux écrivain africain qui, dans sa jeunesse, avait été sélectionné dans l'équipe nationale juniors du Cameroun. Malgré ses succès sportifs, il avait abandonné sa carrière de footballeur pour des études supérieures en France. Il publiera, à l'âge de 40 ans, son premier roman la Transmission chez Gallimard, nominé à plusieurs prix littéraires. En 2007, le prix Eve Delacroix lui a été décerné par l'Académie française pour son roman Silikani, également publié chez Gallimard. L'année précédente, il avait été primé dans son pays natal par le grand prix de la révélation littéraire 2005. Récemment encore, plus précisément le 28 mai dernier, il a été décoré de la médaille de chevalier des arts et des lettres de la République française remise par Jean-Marie Sevestre, P-DG de la librairie Sauramps et vice-président de Languedoc livre et lecture. Ce dernier avait souligné dans son éloge qu'Eugène Ebodé, admirateur de Pouchkine, de Borgès et de Rabelais, écrit et milite pour trois causes essentielles : le relais entre les générations, c'est le sens de son roman la Transmission. Le dépassement des concurrences mémorielles, c'est l'idée centrale du poème épicé le Fouettateur (publié chez Vents d'ailleurs). La musique comme enchantement, tel est le contenu du roman Silikani, un livre hommage aux musiciens. Avant d'ajouter : «Ecrire, c'est rester combatif. C'est ce qu'il conserve des ultimes conversations d'avec son défunt père et des conseils aux allures d'injonction de sa mère.» Quant à Eugène Ebodé, il a déclaré dans sa réponse à cet éloge : «La médaille qui m'est attribuée ce jour doit aussi beaucoup à un contexte dans lequel les discriminations doivent être prises en compte. Il reste encore du chemin à faire pour traverser l'océan des discriminations fondées sur la race, le sexe, le statut social, l'accès au bonheur et à la pleine citoyenneté. Chevalier ou pas, je rêve simplement d'un emploi et d'un toit pour tous.» Il a également ajouté : «Soyons acteurs de la solidarité et de la générosité […]. Tel est le couple qui brisera les reins aux xénophobes, aux adeptes des replis identitaires associés aux mêmes délires que les apôtres de l'ordre mercantile. C'est une civilisation de coopération qu'il faut construire. Nos sociétés sont diverses et nos cultures variées. Mais elles peuvent avancer de conserve. Ma mère l'exprimait par un proverbe bantou : “Si les doigts de la main sont différents et de taille inégale, ils sont beaux, ils sont inséparables et ils sont faits pour coopérer.”» Dans l'esprit de la coopération et de la solidarité avec les lecteurs africains, Eugène Ebodé espère que son «prochain roman sortira d'abord en Algérie, ainsi que je l'ai indiqué pendant le Panaf. Les éditions Apic ont reçu mon manuscrit et font le nécessaire pour que cette publication soit rapidement effective.»