Depuis qu'il est à la tête du département de la Santé, Djamel Ould Abbès ne manque pas une occasion pour affirmer qu'il va passer au peigne fin le secteur de la santé et le débarrasser de ceux qui lui nuisent. Sa dernière décision portant sur le limogeage de 15 directeurs de CHU et 20 autres directeurs de santé de wilaya vient conforter ses dernières déclarations. Effectivement, il était temps de sévir et de prendre des décisions fermes pour mettre fin à l'anarchie ambiante et à la mauvaise gestion qui prévalent au sein des structures de santé, en particulier des hôpitaux publics. Mais ces opérations «conjoncturelles» sont-elles suffisantes ?On se rappelle que, il y a de cela quelques mois, le prédécesseur de Ould Abbès, Saïd Barkat, avait entrepris une opération du même genre qui avait, entre autres, amené au limogeage du directeur du CHU Mustapha-Pacha. Mais ces changements n'ont pas produit le déclic tant attendu dans le secteur de la santé. En fait, tous les ministres qui se sont succédé à la tête du département de la Santé n'ont pas trouvé de «remède» au malaise que vit le secteur depuis des décennies. Il faut dire que le secteur de la santé est sinistré depuis quelque temps déjà, sans que cela n'émeuve nos dirigeants et nos responsables de la santé. Qui de nous n'a pas vécu une situation de détresse extrême dans un hôpital public ? Laisser-aller, dysfonctionnements, mauvais accueil, pannes récurrentes du matériel médical, pénurie de médicaments sont légion. Il est aussi regrettable de voir certains médecins devenir de véritables affairistes. Ils n'hésitent pas à orienter leurs malades vers leurs cliniques privées ou vers celles de leurs collègues. Cet affairisme d'un nouveau genre est très dangereux car il utilise le malade à des fins mercantilistes. Le serment d'Hippocrate a été dévoyé au service de véritables «transactions commerciales» et le mot n'est pas assez fort. Il suffit de faire un tour dans certaines cliniques d'hémodialyse pour se rendre compte de la mainmise de la mafia de la dialyse dans notre pays. A vrai dire, le malade est traité dans la majorité des cliniques privées comme une vulgaire marchandise. Aucun contrôle par les pouvoirs publics ne semble être exercé sur ces structures qui ne respectent pas le moindre cahier des charges. Le cas le plus édifiant est constaté dans des cliniques d'ophtalmologie où des erreurs médicales sont constamment relevées. Mais comme dit l'adage, au pays des aveugles, le borgne est roi. Cette situation est dramatique et relance le débat sur les réformes annoncées depuis des années dans le secteur de la santé. Des réformes qui ont du mal à voir le jour. Il est loisible de constater que les interminables promesses annoncées pour «booster» le secteur sont restées lettre morte. Tout comme les sommes colossales déboursées dans l'achat d'équipements médicaux. Des équipements auxquels le malade n'a pas droit. Car avoir accès à une IRM ou à un scanner dans un hôpital public relève, le plus souvent, du parcours du combattant. Le piston et le favoritisme étant scandaleusement répandus. L'on se demande dès lors ce qu'il est advenu des centaines de millions de dollars dont a bénéficié le secteur de la santé, et qui n'ont pas eu l'effet escompté sur la qualité des soins, encore aussi médiocres. Le malade se sent toujours aussi lésé dans ses droits, les plus élémentaires. Il n'a pas accès à des soins de qualité. Outre les changements «occasionnels» annoncés par les différents ministres de la Santé, le citoyen s'attend aujourd'hui à une véritable révolution dans le domaine. Il est dans l'expectative et se pose moult questions. Djamel Ould Abbès tiendra-t-il ses engagements ? Peut-on continuer encore à faire confiance aux pouvoirs publics, sachant que pour les hauts responsables du pays, le problème ne se pose pas du moment qu'ils peuvent se soigner ailleurs ? Il est temps de réfléchir à des mesures pérennes à même de redynamiser et d'humaniser le secteur de la santé. A. B.