Synthèse de Hassan Gherab Après le coup d'Etat militaire du 18 février 2010 qui a renversé le président Mamadou Tandja, quelque 6,7 millions d'électeurs nigériens doivent élire un nouveau président à l'occasion d'un scrutin censé redonner le pouvoir aux civils. Des élections législatives sont également organisées dans 116 circonscriptions. Le chef de la junte au pouvoir depuis un an, le général Salou Djibo, qui n'est pas candidat, ni d'ailleurs aucun officier de la junte, a donné, hier à 8 heures, le coup d'envoi du scrutin dans un bureau de vote à Niamey, capitale du Niger. Les bureaux de vote, ouverts pour la présidentielle couplée aux législatives, fermeront à 19 heures. Après avoir glissé son bulletin de vote dans l'urne, le général Djibo a évoqué son sentiment «de satisfaction et d'espoir». «C'est un nouveau commencement pour le Niger, un départ qui permettra aux nouveaux dirigeants de se consacrer au développement», a déclaré le président du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie.Cinquante ans après l'indépendance de cette ancienne colonie française, un des pays les plus pauvres du monde et miné par les coups d'Etat, dix candidats sont en lice, dont la première femme prétendant à la Présidence. Quatre hommes font figure de favoris. En tête, l'opposant historique Mahamadou Issoufou, qui a remporté les municipales le 11 janvier dernier, espère que «l'heure de la victoire a sonné», son slogan de campagne. Mahamane Ousmane, premier président démocratiquement élu (1993-1996) est le deuxième prétendant sérieux. Face à ces deux candidats, Seini Oumarou, ancien Premier ministre de Tandja (2007-2009), portera les couleurs du Mouvement national pour la société du développement (MNSD), le parti de Tandja. Hama Amadou, un autre ancien Premier ministre de Tandja (2000-2007) tombé ensuite en disgrâce, est le quatrième favori dans cette course présidentielle.Dans une alliance de dernière minute pour contrer M. Issoufou, six candidats, dont M. Oumarou, ont annoncé former une coalition censée renforcer les chances de victoire du MNSD. MM. Oumarou, Amadou et Ousmane se sont même engagés à soutenir celui d'entre eux qui arriverait au second tour, prévu le 12 mars prochain, alors que l'investiture du nouveau président est, elle, fixée au 6 avril. Cette alliance a aussitôt été dénoncée par leurs rivaux comme une initiative visant à faire revenir le pays à l'ère Tandja, actuellement en prison pour de présumées malversations. La position des candidats et partis hostiles à Tandja est confortée par leur victoire aux élections municipales du 11 janvier et la position de la junte qui a refusé d'invalider les résultats, en dépit de problèmes de logistique ayant empêché de nombreux électeurs de voter.Les mêmes problèmes d'organisation pourraient ressurgir durant cette élection présidentielle et susciter des contestations plus fortes. Avant le début du scrutin, la commission électorale avait déjà déclaré que des fausses cartes d'identité avaient été vendues avant le vote, sans en préciser le nombre. La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a bien envoyé plusieurs centaines d'observateurs, mais ils ne pourront pas couvrir les bureaux de tout le pays. L'Union européenne a également dépêché des émissaires, mais pas dans le nord du pays, territoire aux mains des terroristes d'Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).Ainsi, s'ils étaient nombreux à soutenir la destitution de Tandja, certains doutent cependant que l'élection puisse résoudre les problèmes du pays et mettre un terme au cycle des coups d'Etat, contrecoups d'Etat et manœuvres politiques. Pays d'Afrique de l'Ouest situé au sud du Sahara, le Niger a connu trois coups d'Etat entre 1974 et 1999. Le pays frappé par la sécheresse et la désertification est riche en uranium mais figure parmi les moins développés selon l'index des Nations unies, avec un taux de 70% d'illettrisme parmi sa population, et le plus fort taux de natalité au monde.