Le geste d'un Sénateur, ex-ministre de souveraineté, est assez éloquent sur le sentiment profond d'une partie de l'Establishment français vis-à-vis de l'Algérie et des Algériens. Merci Monsieur Longuet d'avoir délié votre bras pour dire tout vulgairement ce que beaucoup de vos semblables disent à travers des euphémismes. Merci d'avoir crevé l'abcès français qui puait depuis un 5 juillet 1962. La France ne demandera jamais pardon à ses victimes. Car faut-il qu'elle se pardonne à elle-même, qu'elle se regarde dans le miroir de l'Histoire pour assumer tout son passif colonial. La France pourra-t-elle se pardonner d'avoir déshonoré les principes de la Révolution de 1789, d'avoir bafoué la déclaration des droits de l'Homme qu'elle a, elle-même, enfantée pour l'Humanité ?La France officielle est trop arrogante pour admettre cette honte qui lui colle à la peau, qu'elle incarne désormais. L'Algérie doit comprendre dorénavant qu'il est vain de demander à la France de se repentir, car la repentance est le fait des seigneurs, des nobles, des justes. Le geste de Longuet est un geste par procuration qui a assouvi la rancœur et la haine d'une grande partie de l'Establishment qui n'a pas manqué de se frotter les mains lorsqu'un sénateur a osé le dernier bras qui déshonore toute la France. Les quelques réactions de désapprobation de ce geste sont en deçà du geste et de ce qu'il a provoqué en Algérie comme indignation et mépris vis-à-vis de la France officielle. D'autant plus que la droite et la gauche sont d'accord au moins, sur la non reconnaissance des crimes coloniaux. Cinquante ans après, l'Algérie continue à unir la France dans la guerre des mémoires. Désormais, la balle est dans le camp algérien maintenant que les choses sont claires et que les intentions de l'Etat français se sont clarifiées davantage. Le pardon est un signe d'amitié et de respect. La France refuse d'admettre ses torts et refuse de facto, d'être l'amie de l'Algérie. A ce titre, rien n'oblige l'Algérie à chercher des relations privilégiées et stratégiques avec un Etat arrogant. La prochaine visite de Hollande à Alger, si elle a lieu, tombe de fait dans la banalité grâce à cette attitude hautaine d'une classe politique schizophrène qui condamne le colonialisme et l'esclavage et s'interdit tout acte de repentance d'un Etat dont tous les crimes ont été commis en son nom et sur ses ordres. Mieux encore, le même Etat qui se réfère aux valeurs de la Révolution de 1789, s'en va-t-en guerre pour prêcher la démocratie, les droits de l'Homme et la liberté des peuples tout en offrant un bras d'honneur aux peuples que la France à colonisés, opprimés, spoliés et massacrés. La boussole perd le Nord avec cette logique qui discrédite les valeurs universelles de liberté, de justice et d'égalité des peuples. Même si l'Algérie doit faire table rase du passé, la France d'aujourd'hui fait tout pour incarner ce passé et garder les mémoires vives. En dépit de la gravité du geste, Longuet a fait rire les Algériens. A. G.