Le nouveau président du Parlement Ali Larijani a averti hier que l'Iran pourrait revoir sa coopération avec l'AIEA après que l'agence de l'ONU eut déploré le refus de Téhéran de répondre à ses questions sur un possible volet militaire de son programme nucléaire.M. Larijani, responsable jusqu'à l'automne dernier des négociations sur le dossier nucléaire iranien avec les grandes puissances, a accusé l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de collusion avec ces dernières. C'est la première fois qu'un responsable iranien livre une attaque de ce genre contre l'agence onusienne. Il lui a notamment reproché d'avoir introduit des articles "ambigus" dans son rapport, qui a fait l'objet d'une diffusion restreinte lundi. Le rapport énumère une liste de documents fournis par des pays tiers et évoquant une "possible dimension militaire" du programme iranien. Selon l'AIEA, Téhéran s'est contenté de balayer ces "prétendues études" comme étant autant de "faux", et a refusé de l'éclairer sur d'autres informations en ce sens obtenues par l'agence. "Le Parlement ne permettra pas de telles tromperies et s'ils (l'AIEA et les grandes puissances) continuent sur cette voie, il interviendra dans le dossier et fixera une nouvelle ligne pour la coopération avec l'AIEA", a averti M. Larijani dans un discours devant la Chambre diffusé par la radio. "Cette attitude de l'Agence est regrettable", a ajouté M. Larijani en lui conseillant "d'éviter de se livrer à des jeux diplomatiques suspects (...) avec le groupe 5+1". Ce dernier, qui réunit les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie) et l'Allemagne, essaie d'obtenir depuis deux ans que l'Iran suspende son enrichissement d'uranium, sans succès malgré trois résolutions assorties de sanctions de l'ONU. Le groupe 5+1 doit prochainement remettre à Téhéran une offre "rafraîchie" de large coopération en échange d'une suspension des activités d'enrichissement. L'Iran a restreint notablement sa coopération avec l'AIEA en 2006, en représailles au transfert de son dossier par l'agence devant le Conseil de sécurité, après les réticences de la République islamique à s'expliquer sur son programme nucléaire. Téhéran s'est toujours gardé depuis d'attaquer les rapports de l'agence, préférant en souligner les parties positives et en minimiser celles qui lui nuisent. Cette attitude a changé avec le rapport de février dernier, plus critique, et surtout après la présentation par un haut responsable de l'AIEA Olli Heinonen des "prétendues études". Le grand quotidien Kayhan, censé refléter les vues des conservateurs au pouvoir, a accusé M. Heinonen de servir les intérêts des Etats-Unis et d'Israël. M. Larijani, élu, hier, à la tête du Parlement, a adressé un conseil en ce sens à l'AIEA: "Si elle veut une coopération plus sincère avec l'Iran il faut que ses rapports soient plus équilibrés et qu'elle ne cherche pas à créer un tapage médiatique." L'Iran a toujours démenti que son programme nucléaire ait comporté un volet militaire. Le directeur général de l'AIEA, Mohamed ElBaradei, a pourtant exprimé dans son rapport de "vives inquiétudes" sur le refus de Téhéran de livrer les informations qu'attend l'agence. Le texte de l'AIEA a été transmis au Conseil de sécurité de l'ONU ainsi qu'aux 35 membres du conseil des gouverneurs de l'AIEA, qui doit l'examiner au cours de sa prochaine réunion qui s'ouvre le 2 juin à Vienne.