L'Union européenne a sensiblement accru ses investissements directs (IDE) dans son voisinage méditerranéen, selon les dernières statistiques publiées par Eurostat, l'Organisation statistique communautaire, qui portent sur l'année 2006. Dans un contexte marqué par un volume croissant d'IDE destinés aux Pays partenaires méditerranéens (PPM, 40 milliards d'euros en 2006), les entreprises européennes ont fortement accru leurs efforts d'investissement dans cette zone. Les IDE européens y ont, en effet, atteint les 15,3 milliards d'euros en 2006, soit un doublement par rapport à l'année précédente, représentant 6 % du montant total des IDE sortant de l'UE. La distribution de l'investissement européen est cependant très inégale sur le pourtour méditerranéen : la Turquie capte 10,5 milliards d'euros à elle seule, suivie de l'Egypte 3,3 milliards d'euros, ce qui laisse un maigre reliquat pour les autres PPM du Maghreb et du Machrek. Les stocks d'IDE de l'Union européenne dans les PPM, qui ont atteint 68 milliards en 2006, montent en forte concentration vers la Turquie et les pays du Maghreb. Les principaux pays d'origine des investisseurs européens sont la France (vers les pays du Maghreb), le Royaume-Uni (vers le Machrek), l'Allemagne (vers la Turquie) et les Pays-Bas (vers la Turquie et Israël). Selon Eurostat toujours, le taux de retour sur l'investissement des projets d'entreprises européennes en Méditerranée s'élèverait à 12,3% en augmentation de 50 points de base par rapport à 2005, à comparer avec le taux moyen calculé pour la totalité des actifs investis hors de l'UE qui serait proche de 8,8%. Au regard du rapport 2008 sur l'investissement, édité par la Cnuced, la Méditerranée a consolidé son attractivité en tant que site d'investissement direct étranger (IDE). Bien qu'il a été enregistré un léger recul des IDE en général, ceux destinés aux partenariats méditerranéens de l'Union européenne (UE), sont restés conséquents. Le flux des IDE, destiné à la Méditerranée, n'a représenté, en 2007, que 3,15 % des IDE dans le monde, contre 4,3 % en 2006 (hors Libye). Aussi, la Méditerranée est-elle repassée sous la barre des 4 %, ce qui correspond, d'ailleurs, à son poids démographique relatif. Néanmoins, à la lumière de la crise financière dont nul ne peut, aujourd'hui, mesurer l'impact, la crainte que les IDE régressent davantage dans la zone, est omniprésente. Mais, selon le même document de la Cnuced et le réseau Anima, cette crainte devrait être atténuée, et largement. Selon les deux organismes, l'attractivité de la Méditerranée se consolidera davantage. Et, pourtant, on ne s'attend pas, en tout cas en 2008 et dans l'immédiat, à une reprise des IDE, ralentissement de la croissance économique mondiale oblige ! Des projets maintenus en Afrique du Nord Les pays de la Méditerranée continueraient à résister tout comme ils l'ont fait en 2007. En effet, les prévisions de la Cnuced tablent sur une baisse globale des IDE de l'ordre de 10 %. Mais les pays de la Méditerranée continueraient à bénéficier du repli des Fonds souverains et investisseurs du Golfe sur leur voisin méditerranéen, avec pour filières phares, le tourisme, l'agroalimentaire, l'énergie et les industries extractives. En effet, selon le premier organisme, une enquête annuelle sur les perspectives 2008/2010 en matière d'IDE dans le monde confirme une tendance rapide à l'international des multinationales. En d'autres termes, les multinationales poursuivront, au cours des trois prochaines années, la répartition des ventes, outils de production, répartition de leur main-d'œuvre. D'ailleurs, 75% des dirigeants interrogés dans le cadre de l'enquête n'ont pas l'intention de changer leurs projets en Afrique du Nord sur la période 2008/2010. Mieux encore, environ 20% pensent augmenter modérément leurs investissements dans cette région et 3% préparent des augmentations importantes. Quant au second organisme, le réseau Anima, l'Observatoire Mipo (Méditerranéan Investissement projects Observatory), il a déjà recensé 565 projets d'investissements étrangers pour l'année 2008. A rappeler que le MIPO constitue une base de données qui évalue, depuis 2002, toutes les annonces de projets d'IDE dans les pays méditerranéens. Les secteurs attractifs des IDE, il s'agit notamment des indétrônables, soit l'immobilier, l'énergie, le tourisme et les services financiers, ont trouvé depuis peu des challengers de taille, à savoir les secteurs de la métallurgie, des logiciels, des services informatiques et des composantes automobiles. Des niches sont aussi à surveiller, comme les hôpitaux privés (notamment en Algérie, Turquie et Tunisie), et la Recherche et Développement. Selon une autre ressource, les investissements directs étrangers (IDE) dans les pays de la rive sud restent soutenus, malgré la baisse du nombre de gros projets. Tassement de la croissance en 2009 "Les pays des rives sud et est de la Méditerranée devraient connaître un tassement de leur croissance en 2009 mais celles-ci restera bien supérieure à celle de l'Europe", pronostique Ania Thiemann, analyste de The Economist qui vient d'organiser à Marseille une table ronde sur l'investissement en Méditerranée. "Les pays de la rive sud de la Méditerranée maintiennent leur attractivité en 2008, en dépit d'un environnement marqué par l'instabilité et l'incertitude", ajoute Bénédict de Saint-Laurent, coordonnateur du réseau Anima qui regroupe une cinquantaine d'agences de développement de la zone. Selon ce dernier, la zone comptera, en 2008, 800 projets d'investissements directs étrangers (IDE), pour un montant de 39 millions d'euros (52,5 milliards de dollars). La Cnuced table, pour sa part, sur un montant proche de 50 milliards contre 55 en 2007 et 59 en 2006. Cette consolidation s'explique par la raréfaction des grandes opérations de privatisation et des mégaprojets immobiliers. Il y a, en revanche, beaucoup plus de projets industriels et de service de moindre envergure. Le montant moyen a chuté de 83 à 47 millions d'euros. Le Maghreb représente 29 % des flux (contre 20 % en 2007), le Machrek recule à 21 % (contre 42 %) et les autres pays, notamment la Turquie, se taillent la part du lion. Ces investissements proviennent d'Europe, 23 % des pays du Golfe et 14 % d'Amérique. Parmi les projets annoncés on cite le pôle métallurgique de Bellara (Algérie). Selon une enquête de la Cnuced, plus de 75 % des dirigeants sondés n'ont pas l'intention de changer leurs projets en Afrique du Nord pour 2008/2010. 20% pensent augmenter modérément leurs investissements dans cette région et 3% préparent des augmentations très importantes. Ainsi, Haribo France veut se développer dans cette zone à partir de son usine marseillaise. "Notre intérêt est motivé par la jeunesse de la population et par l'optimisation d'investissements publicitaires faits en France", indique Jean-Philippe André, président du directoire d'Haribo France. Dans un autre domaine, Lafarge veut poursuivre son développement dans cette zone, où il est déjà bien implanté. Il a racheté, l'an dernier, la société Orascom en Algérie pour plus de 10 milliards d'euros.