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Une bonne année économique 2010
Publié dans Le Maghreb le 24 - 12 - 2009

Docteur Abderrahmane MEBTOUL, professeur d'Université Expert International L'année 2009 a vu aussi la loi de finances complémentaire qui a réorienté toute la politique du gouvernement principalement sur les infrastructures avec une tendance au renforcement du secteur d'Etat et le problème posé à travers cette instabilité juridique est ce la bonne voie ce d'autant plus qu'elle est liée à un Accord de libre échange avec l'Europe applicable depuis le 01 septembre 2005 devant aller vers un dégrèvement tarifaire zéro horizon 2014? Ainsi durant l'année 2009 de profondes divergences rendues publiques entre l'Algérie et ses principaux partenaires commerciaux notamment la majorité des pays occidentaux y compris les USA sur leur inquiétude face à l'instabilité juridique et au retour vers le dirigisme étatique des années 1970, à ne pas confondre avec le rôle stratégique de l'Etat régulateur en économie de marché concurrentielle. Et ce après des mesures d'ordre commercial (30%70% pour le commerce nationaux/étrangers avec une période de cacophonie sur la notion de rétroactivité, 51/49% pour l'industrie/services du passage du REMDOC au CREDOC, la suppression du crédit à la consommation, le ministre du commerce reconnaissant récemment mais avec retard que ce passage sans transition pénalise bon nombre de MI/PME qui n'ont pas assez de trésorerie et qui risquent d'aller vers la sphère informelle. Car, hélas les dernières statistiques douanières (les 10 mois de 2009) ne donnent qu'un ralentissement de 3% de la valeur des importations (soit 1,2 milliard de dollars), nous orientant vers 38/39 milliards de dollars contre 40 milliards en 2008, somme dérisoire alors que nous avons assisté à une déflation des prix au niveau mondial (- baisse des prix, donc inflation importée presque nulle) et à une récolte intérieure exceptionnelle (pluviométrie). Qu'en sera-t-il s'il y a retour de l'inflation au niveau mondial entre 2010/2014 ? Donc ces mesures ont eu une portée limitée ne s'étant pas attaqué à l'origine de la hausse des importations qui est l'inefficacité de la dépense publique. III- L'ANNEE 2009 , RETOUR DE L'INFLATION, L'EROSION DU POUVOIR D'ACHAT DE LA MAJORITE ET UNE AUGMENTATION DU SMIG DE 3000 DINARS Autre élément de l'année 2009 l'augmentation du SMIG de 3000 dinars mais là aussi il faut détruire un mythe qui n'a pas de fondement scientifique de l'origine de l'inflation qui est de retour amenuisant le pouvoir d' achat des Algériens : selon l'ONS , 1,6% en 2006, 2,5% en 2007, 4% en 2009, allant vers 6% en 2009, posant d'ailleurs le problème du taux d'intérêt bancaire qui devrait être supérieur de 2 à 3 points par rapport au taux d'inflation et surtout la méthode de calcul de l'indice des prix par l'organisme officiel de la statistique ONS. Cela revient donc à poser clairement les problèmes de l'impact de l'inflation comme vecteur de concentration du revenu national au profit d'une minorité de couches rentières , la majorité des ménages consacrant entre 2008/2009 plus de 80% de leurs revenus pour les produits de première nécessité (dont l'indice des prix officiel pour 2009 l'évalue entre 15/20% de hausse, seul taux significatif pour ces ménages) et donc sur leur pouvoir d'achat . Aussi, l'inflation ne peut être comprise sans l'analyse des mécanismes de la régulation d'ensemble,liant mode d' accumulation et répartition du revenu par couches sociales et que toutes les études faites jusqu'à présent montrent que l'inflation en Algérie n'est pas d'origine essentiellement salariale, notre pays ayant le taux de salaire le plus faible du MENA (rapport entre masse salariale et PIB avec et sans hydrocarbures) Dans ce cadre, je voudrai apporter les précisions suivantes : a- Faute d'enquêtes précises renvoyant hélas au système d'information surtout sur la répartition du revenu par couches sociales déterminantes pour toute politique salariale fiable, information qui s'est totalement effritée en Algérie pouvant conduire à des erreurs de politique économique se chiffrant en milliards de dollars, il faut effectivement être nuancé. Mais existent des signes non trompeurs à travers tout le territoire national de la concentration de revenus au profit d'une minorité de couches rentières et une paupérisation de larges couches de la population. b.- J'ai démontré dans mes différentes contributions que les salaires sont loin d'être à l'origine du processus inflationniste en Algérie si l'on s'en tient aux données de l'ONS et que la raison principale est la faiblesse de la régulation d'ensemble amplifiée par l'inefficacité de la dépense publique. La première raison du retour à l'inflation est la dépense publique clôturée entre 2004/2009 à plus de 200 milliards de dollars US comme rappelé précédemment qui n'est pas du tout proportionnelle aux impacts économiques et sociaux. Car, les infrastructures ne sont qu'un moyen accessoire du développement et les expériences négatives de l'Espagne et la semi faillite récente de Dubaï doivent faire réfléchir le gouvernement algérien. Cependant je maintiens effectivement du fait de la non maîtrise de la régulation, et donc au manque de visibilité et de cohérence dans la politique socio-économique , une augmentation inconsidérée risque de mettre en péril les PMI/PME qui ne peuvent supporter une trop grande augmentation , constituant la majorité du tissu productif et les orienter sur la sphère informelle, d'accélérer l'importation du fait de la faiblesse de la production locale et d'accentuer le processus inflationniste du fait d'effets psycho sociologiques mis en relief nettement par l'économiste Keynes ( effet cumulatifs d'anticipation). La deuxième raison est l'assainissement des entreprises publiques entre 1991/2008, plus de 3000 milliards de dinars et plus 325 milliards de dinars lois de finances 2009/2010 (plus de trois cent mille milliards de centimes) 70% des entreprises publiques étant revenus à la case de départ selon les rapports officiels. c- Et vient seulement en troisième position la masse salariale de très loin. Pour preuve les salaires comme l'atteste sa baisse vertigineuse dans le produit intérieur brut depuis 20 ans actuellement inférieur à 20% contre une moyenne de plus de 50% dans les pays développés et pays émergents oubliant que le salaire est créateur de valeur, n'est pas la cause fondamentale de l'inflation comme nous l'avons montré chiffres à l'appui par ailleurs dans le cadre d'un audit que j'ai eu l'honneur de diriger pour le compte des pouvoirs publics entre 2006/2007. C'est surtout l'envolée des dépenses improductives et le gaspillage des ressources financières qui sont les causes essentielles du retour à l'inflation. Selon le professer Mohamed MUZETTE chercheur au CREAD, une récente étude sur le marché du travail en Algérie (2009) indique que l'évolution de la rémunération totale des salariés (RS) s'est caractérisée par une baisse tendancielle de son poids dans le revenu national disponible (RND). La baisse, de près de 6 points de pourcentage entre 2001 et 2006, a bénéficié à l'excédent net d'exploitation, qui constitue la rémunération du capital, dont la part dans le RND a progressé de près de 10 points de pourcentage, pour se situer à 66% du RND. Par rapport au Produit intérieur brut (PIB), les proportions de la RS sont de 23% et 17,7% respectivement en 2001 et 2007. A titre de repère, ce ratio était de près de 50% en 2005 pour toute la zone euro (moyenne). De même, le poids des revenus salariaux dans le revenu brut des ménages (RBM) est aussi sur une tendance baissière (35,5% en 2001 et 34,5% en 2006), baisse qui a profité aux indépendants dont poids des transferts monétaires est resté stable à un peu plus de 20%. Il me semble qu'il faille comme l'a montré le grand économiste polonais KALECKI dans la dynamique de la croissance de différencier le salaire appliqué à la création de valeur du traitement( T) qui constitue un transfert de valeur , encore que les travaux du PNUD sont plus fins à propos de l'indice du développement humain , les traitements de l'éducation et la santé contribuant à terme à la création de valeur. Nous aurons alors dans le modèle dynamique amélioré de Kalecki T1 (éducation/santé essentiellement) et T2 ce dernier devant être limité au maximum car constitué en majorité de ce que les marxistes appellent des emplois improductifs, encore qu'avec les services qui deviennent de plus en plus marchands, la dichotomie emplois productifs/improductifs traditionnelle doit être dépassée. Pour le cas Algérie, la problématique des salaires ne peut être isolée de la réforme globale en incluant l'approche institutionnelle et cela renvoie au concept de bureau de Max Weber nécessaire dans toute économie mais dans un sens négatif en Algérie car destructeur de richesses s'autonomisant en tant que pouvoir bureaucratique. IV-CONCLUSION : LE DEFI DE L ALGERIE 2010/2014 La mondialisation dans sa version contemporaine renvoie non seulement à des interactions internationales d'ordre économique mais aussi à des interactions de type religieux et culturel, politique idéologique et militaire, et dont la crise d'octobre 2008 qui est loin d'être terminée préfigure d'importants bouleversements géo stratégiques et socio-économiques tenant compte du futur défi écologique, horizon 2015/2020. L'Algérie devra s'y adapter si elle veut éviter sa marginalisation croissante, tant politique qu'économique surtout avec l'épuisement inéluctable des hydrocarbures. C'est pourquoi toute stratégie d'adaptation ou de réponse à ce phénomène doit embrasser l'ensemble de ses composantes et de ses manifestations, notre participation volontaire et active à l'ordre international en construction devant être appréhendée et retenue comme un objectif de toute première importance. Notre adaptation est un problème de sécurité nationale et donc un défi pour les générations futures, évitant le retour suicidaire du volontarisme étatique des années 1970. Aussi, le défi essentiel est de dynamiser la production et les exportations
hors hydrocarbures et passer d'une économie de rente à une économie productive. Cela passe par une plus grande cohérence et visibilité dans la démarche de la régulation globale et donc par la bonne gouvernance. Cela passe par les deux fondamentaux du développement du XXIème siècle tenant compte de l'insertion dans les nouvelles mutations mondiales, une meilleure gouvernance centrale et d'entreprise et le savoir loin des empois rentes. L'Algérie doit tirer les enseignements de la crise hypothécaires et d'une manière particulière la semi faillite financière et immobilière des principaux pays qui ont misés uniquement sur les infrastructures à l'image de l'Espagne ou de Dubaï. Car, il s'agit de réorienter en urgence l'actuelle politique fondée essentiellement sur les infrastructures qui ne sont qu'un moyen du développement souvent clefs en main sans transfert du savoir-faire sous le prétexte fallacieux du respect des délais en orientant le financement vers le savoir et les activités productives. Il s'agit de poser les véritables problèmes à savoir l'approfondissement de la réforme globale pour un véritable développement durable tenant compte du nouveau défi écologique et du nouveau modèle de consommation énergétique qui se mettra en place au niveau mondial entre 2015/2020. Et seules des réformes internes, permettront de modifier le régime de croissance pour atteindre une croissance durable hors hydrocarbures condition de la création d'emplois à valeur ajoutée, mettant fin progressivement à cette croissance volatile et soumise aux chocs externes, les dépenses monétaires sans se préoccuper des impacts et l'importance des réserves de change, n'étant pas synonymes de développement car fonction, du cours des hydrocarbures. Or, paradoxalement, l'avancée ou l'accélération des réformes en Algérie est inversement proportionnelle au cours du pétrole, paradoxalement étant freinée lorsque les cours s'élèvent. Et nous revoilà au fondement du système rentier au sens toujours négatif car la rente peut être une bénédiction ou une malédiction, voir le déclin de l'Espagne pendant plus de deux siècles après l'épuisement des découvertes d'or et la rente agricole comme nous l'enseigne l'expérience des pays capitalistes qui a permis par la suite une dynamique de développement. C'est donc un enjeu vital pour les générations futures d'autant plus qu'il est admis que l'Algérie sera un importateur net de pétrole dans moins de 18 ans et un importateur net de gaz dans moins de 25 ans ayant seulement 1% des réserves mondiales de pétrole et 3% pour le gaz devant tenir compte de la forte consommation intérieure. Or 18/25 ans c'est demain l'Algérie étant indépendante depuis plus de 47 ans. Bonne année 2010 pour notre pays en espérant qu'elle sera meilleure à l'avenir pour l'Algérie qui a toutes les potentialités pour devenir un vecteur actif au sein e l'espace euro- méditerranéen et arabo- africain, son espace social naturel, car le bilan de l'année 2009 est mitigé. 21 décembre 2009 A.M. NB- Voir les interviews dans Chourouk du 20 décembre 2009 des professeurs en sciences économiques de Abderrahmane Mebtoul et Abdelmajid Bouzidi sur l'inflation et la détérioration du pouvoir d'achat des Algériens. suite et fin.

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