Le groupe français total vient de passer la deuxième transaction en moins d'un mois dans le secteur du gaz naturel. Ainsi, après l'achat d'XTO par Exxon Mobil le 14 décembre, le géant pétrolier français Total annonce l'achat d'une participation dans l'américaine Chesapeake Energy (CHK). Total peut ainsi mieux se positionner dans le gaz de schiste (shale gas) en Amérique du nord. Le gaz de schiste désigne le gaz naturel classique qui, plutôt que d'être produit à partir de sources plus conventionnelles comme les gisements de grès ou de calcaire, provient de gisements composés en majeure partie d'argile litée et d'autres roches à grain fin. Cette opération permet au groupe pétrolier français d'ajouter 130 millions de barils à ses réserves prouvées, soit un gain de 1,3%. Mais surtout, le groupe va développer son expertise dans les hydrocarbures non conventionnels. Total, qui avait récemment subi quelques déconvenues au Moyen-Orient (Irak, Arabie-Saoudite) va renforcer ses positions aux Etats-Unis, où il n'était pas très présent. Les actifs acquis sont déjà productifs à hauteur de 60%, les 40% restants seront à développer dans les prochaines années. Le prix d'acquisition de ces réserves, de 5,60 dollars le baril, est comparable à celui acquitté par ExxonMobil au mois de décembre dernier. Cette offensive de Total est stratégique dans la mesure où elle devrait être suivie par d'autres opérations de croissance externe dans les hydrocarbures non-conventionnels. Ainsi, les investisseurs révisent la valeur du gaz non-conventionnel et/ou semblent croire que d'autres transactions dans le secteur sont à prévoir dans un avenir rapproché. Ainsi, pour Total, le gaz est l'énergie fossile dont la progression est la plus remarquable et elle pourrait croître de plus de 50% d'ici 2030. La direction de Total estime aussi que le gaz naturel est une des réponses au double défi énergétique et climatique. Il faut dire que le développement du gaz non conventionnel par les Etats-Unis est en train de bouleverser le marché mondial du gaz. Cette évolution, qui est due à des technologies innovantes dans le domaine, commence d'ores et déjà à se faire sentir sur le marché classique du gaz. Aussi, les pays exportateurs de gaz affichent ainsi une inquiétude quant à cette nouvelle donne qui à eu un impact sur les prix du gaz sur le marché mondial, et qui aura aussi des influences à l'avenir. D'où la nécessité de revoir les stratégies de ces pays concernant le prix du gaz et les conventions à long terme signées entre les pays dans ce cadre. A la lumière de cette conjoncture, de nouvelles propositions concernant cette question seront, en effet, au centre de l'intérêt de la prochaine réunion du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) qui aura lieu au mois d'avril prochain à Oran. Cette nouvelle tendance va provoquer à l'avenir un excédent dans l'offre sur le marché, qui va par la suite influer sur les conventions à petit et à long termes dans le secteur. Il convient de signaler que le gaz non conventionnel représente à peine 4 % des réserves mondiales de gaz, selon les estimations de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Mais il a assuré 12 % des volumes produits dans le monde l'an dernier. En 2030, le gaz non conventionnel devrait représenter près de 60 % de la production américaine de gaz, contre à peine 30% en 2000, selon l'AIE. Depuis 1990, la production de ce type de gaz a quasiment été multipliée par 4 aux Etats-Unis, pour atteindre 300 milliards de mètres cubes l'an dernier. Soit plus de la moitié des volumes extraits du sous-sol américain.