Le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, semble avoir tourné casaque dans la question concernant la création d'une Opep du gaz, après en avoir écarté l'hypothèse il y a quelques semaines au motif que la vente du gaz se fait par contrat de longue durée. Le ministre a affirmé, hier à Oran, que l'Opep du gaz pourrait voir le jour si des pays producteurs sont intéressés par l'idée émise par le géant russe du gaz, Gazprom. "On peut créer une Opep du gaz dans la mesure où des pays producteurs sont intéressés par cette idée", a déclaré M. Khelil à la presse à l'issue de la signature par Sonatrach et l'égyptien Orascom d'un accord pour la construction d'un complexe d'ammoniac et d'urée. "Pour le moment, c'est une réflexion que nous aurons à débattre lors de la prochaine conférence de Doha des pays producteurs et exportateurs de gaz", a-t-il ajouté. L'idée d'un "cartel du gaz", qui pèserait sur les prix, à l'instar de celui du pétrole, avait été évoquée pour la première fois en août dernier par le géant russe Gazprom, soulevant de vives inquiétudes parmi les clients européens de l'Algérie et de la Russie, notamment la France, l'Italie et l'Espagne. Le président russe Vladimir Poutine l'avait qualifié le 1er février d'"intéressante" et elle a été relancée récemment par l'Iran. Pour le président Bouteflika, la création d'un cartel des pays producteurs de gaz sur le modèle de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, "s'inscrit dans les tendances introduites par la mondialisation qui poussent les producteurs à se solidariser pour défendre leurs intérêts". Le ministre algérien de l'Energie et des Mines expliquait jusqu'à présent qu'une Opep du gaz était inutile, puisque les ventes de gaz se font "dans le cadre de contrats à long terme", généralement plus de 20 ans et que "les prix du gaz sont indexés sur le prix du pétrole". L'idée de la constitution d'un cartel du gaz fonctionnant sur le modèle de l'Opep a pris de l'épaisseur lors de la visite en Algérie de Valdimir Poutine au mois de mars 2006. Le principal résultat de cette visite aura été le renforcement de la coopération dans le domaine du gaz en particulier. Il a été dit alors que le bilan des négociations dans le domaine gazier aura, sur le long terme, une portée exceptionnelle pour la Russie. Selon le patron de Gazprom, Alexeï Miller, la Russie (à travers Gazprom) et l'Algérie (à travers la Sonatrach) exploiteront conjointement des gisements de gaz en Afrique du Nord. L'accord paraphé entre la Russie et l'Algérie a été interprété comme un pas important vers l'adhésion de l'Algérie au futur cartel des pays exportateurs de gaz. La présence de l'Algérie, que l'on tend en Europe à considérer comme le principal concurrent de la Russie sur le marché gazier européen, conférerait à l'alliance un statut suprarégional et renforcerait notablement la position de tous les participants aux négociations avec les consommateurs. Un conglomérat qui donne la Russie comme candidate à la posture de leadership au sein de cette structure interétatique encore informelle. Ce qui est redouté en Europe au regard de l'influence que pourrait détenir le pays de Poutine. Et apparemment les assurances des uns et des autres n'ont pas suffi à dissiper l'inquiétude. D'où la récurrence des questionnements.