Le Salon de l'agriculture, rendez-vous mondial du monde paysan, s'est ouvert hier à Paris sur fond de chute des revenus. Le ministre Français de l'Agriculture Bruno Le Maire et le nouveau commissaire européen à l'Agriculture, Dacian Ciolos, un Roumain dont la candidature était soutenue par Paris, ont parcouru les allées de la porte de Versailles. Quelques 700.000 visiteurs sont attendus jusqu'au 7 mars pour cette 47e édition du Salon, qui accueillera 1.045 exposants en provenance de 25 pays dont quatre nouveaux, la Norvège, la République démocratique du Congo, la Belgique et le Canada. Quelques 3.500 animaux seront exposés. Jean-Michel Lemétayer, président du premier syndicat agricole français FNSEA, proche de la droite, s'est pourtant dit déçu de l'absence du chef de l'Etat ce week-end. "Le président Sarkozy a beaucoup de difficultés avec la campagne, avec le monde paysan", a-t-il dit vendredi. Jacques Chirac, qui passait des heures chaque année au Salon de l'agriculture quand il était à l'Elysée, devrait s'y rendre cette semaine, et Dominique de Villepin, devenu rival de Nicolas Sarkozy depuis le procès Clearstream qui les a opposés, a prévu d'y passer six heures mercredi. En 2008, l'apostrophe "Casse-toi pauvre con" de Nicolas Sarkozy à l'adresse d'un passant qui refusait sa main tendue dans les allées du Salon, avait troublé le monde politique et contribué à brouiller l'image présidentielle. Cette année, c'est retour de boomerang et déprime générale dans le secteur agricole européen. "Le retournement de 2008 a été brutal et la situation a encore empiré en 2009", résume le ministère de l'Agriculture. Une baisse moyenne du revenu de 34%, qui atteint 53% pour les fruitiers ou 54% pour les éleveurs laitiers. "Une crise sans précédent", répète Bruno Le Maire, ministre depuis juin, qui inaugure samedi son premier salon, en compagnie du nouveau commissaire à l'Agriculture, le Roumain Dacian Ciolos. En cause, "la baisse généralisée des prix agricoles", analyse le ministère. Des prix mondiaux qui font du yo-yo et fragilisent les agriculteurs. C'est une sorte de coupable à la fois idéal et vaguement invisible. Le marché mondialisé et ses alliés spéculateurs feraient valser les cours sans se soucier des paysans, ni des conditions de production. Ce qui est sûr, c'est que les pays émergents ont perturbé l'équilibre mondial. "En quelques années, la Chine est devenue un importateur agricole majeur. Et, vu l'ampleur de son marché, la moindre décision de politique intérieure peut faire flamber les cours", analyse Jean-Christophe Bureau, économiste à AgroParisTech. Le Brésil, lui, est devenu un exportateur majeur, de soja ou de poulet, qui concurrence les exportations françaises. Ces variations attirent les spéculateurs, qui les amplifient "Aujourd'hui on spécule sur tout, déplore Bruno Le Maire, le cacao, le thé, le lait." L'Europe a quelques avantages (infrastructures, recherche) mais peine à lutter.