Il ne se passe pas un festival auquel participe "Garagouz" d'Abdenour Zahzah, sans que ce dernier ne revienne avec un trophée. C'était pareil en 2003 pour "Rachida " de Mina Bachir Chouikh qui a collectionné des dizaines de trophées, et plus tard en 2007 avec " Mascarade" de Lyès Salem, récipiendaire d'autant de prix. Effet boule de neige ? Contagion ?Un prix hiérarchise certes un produit de l'esprit, mais autant de consensus est-elle la preuve irréfutable de la qualité d'une œuvre ? Nietzsche disait qu'il faut d'abord prouver la valeur de ceux qui décrètent et même le sens de ces valeurs là ! Compliqué. à peine était-il revenu glorifié du festival du cinéma et de la télévision de Ouaga (Fespaco) que "Garagouz " empoche cette semaine deux autres prix. C'était au 21e Festival du cinéma africain, d'Asie et d'Amérique latine de Milan. Deux trophées ont été remis solennellement à " Garagouz " : le Prix CINIT de l'Association nationale pour la culture cinématographique et le prix SIGNIS pour la tolérance, selon son producteur Laïth Media. Créé en 1991, à Milan, le Festival du Cinéma africain a pris le nom de Festival du Cinéma africain, d'Asie et d'Amérique Latine à partir de 2004, élargissant ainsi la sélection aux films provenant des trois continents. La programmation cinématographique de la 21e édition du Festival, qui s'est déroule du 21 au 26 mars, a mis en compétition des longs-métrages, longs documentaires, courts métrages africains et des fictions africaines. Cet événement cinématographique représente une occasion de rencontre et d'échange entre les réalisateurs des trois continents. Au Fespaco, dans la catégorie court métrage, c'était le même "Garagouz " de Zahzah qui naguère travaillait sur le documentaire " Un parcours algérien " d'Hervé Bourge avait raflé le premier prix. Au 28ème Festival tous courts d'Aix en Provence (France) qui s'est déroulé en décembre dernier, le même film revenait avec deux distinctions : le Prix du public et le Prix du jury. Ce court métrage de 24 minutes produit en septembre 2010, avait ainsi cumulé 3 prix en moins de trois mois, le premier étant le Prix du public du Midi Libre lors de la 32ème édition du Festival du cinéma méditerranéen de Montpellier en octobre. Ce qui touche dans cette œuvre qui entre autres avait signé le fameux documentaire "Franz Fanon, mémoire d'asile, rendant hommage à l'un des psychiatres les plus engagés de son temps, c'est incontestablement son côté humain. Algérie des années 90. Le glaive devenait une loi et la vie est décapitée nuit et jour dans les sentiers indigents du pays. Funèbres dévinrent alors les contrées qui se vêtirent alors d'étoffes couleur charbon. Au milieu de ce funeste chaos, un père marionnettiste et son fils apprenti sillonnent les villages algériens "pour y apporter un peu de joie et de rêve". C'était comme si l'on plantait une anémone au milieu d'un charnier. "Garagouz" raconte justement les déboires de ce papa trop humain qui veut faire triompher la vie sur la mort, les rires sur les sanglots…. C'était pas sans peine. Le récit de Zahzah et nous l'avons déjà dit ressemble étrangement à la fabuleuse fable d'Hector Mallot, "Sans famille ". A bord de leur camionnette bleue, le père et le fils comme Vitalis et Rémi dans " Sans famille " sillonnent les routes abruptes de l'Algérie profonde pour apporter de la chaleur aux petits cœurs blessés. Distraction, magie, les deux troubadours généreux sont tout comme Rémi confrontés à la dure réalité de certains individus incultes, aveuglés par leur ignorance ou par leur obscurantisme. Les deux artistes devront transcender l'amertume des écueils de l'existence pour poursuivre leur noble mission contre vents et marées. Voila donc une petite lutte anonyme parmi tant d'autres qui donne à réfléchir. Garagouz était visible le mois dernier à la filmathèque Zinet de Riad El Feth. Abdenour Zahzah avait alors confié lors de cette projection que " ce film est un hommage à ces gens qui n'ont pas abandonné leur métier malgré des pressions sociales, politiques ou autres en soulignant que "le sujet du film est la résistance par la culture, que ce soit l'écriture, le théâtre ou le cinéma ou toute autre activité". Le court métrage réalisé avec le soutien du Fonds d'aide aux techniques et à l'industrie cinématographique (FDATIC) du ministère de la Culture et le concours de l'Institut culturel italien d'Alger participait à Kiev au 40e Festival international du cinéma, où il est nominé pour la meilleure mise en scène par l'Académie des arts de l'Europe. Début 2000, Abdenour Zahzah qui est originaire de Blida et qui n'était alors qu'un amateur dans le 7ème art avait signé un mémorable documentaire, " Franz Fanon, mémoire d'asile ", rendant ainsi hommage à l'un des psychiatres les plus engagés de son temps. Avec " Garagouz ", sa première fiction, Abdenour Zahzah, auteur, par ailleurs, d'une dizaine de films documentaires, peut arborer les galons d'un vrai cinéaste.