Il a une gueule bouffeuse d'écran et des doigts de fée. Libre comme le vent, Safy Boutella ne parle jamais à longueur d'année sur les ondes de radios ou à la télé, mais apparaît au grand jour quand il a quelque chose à offrir. Vous le verrez d'ailleurs, aujourd'hui et demain, au Théâtre de verdure fêtant son quart de siècle de carrière avec un spectacle qu'il a signé. L'artiste complet proposera son nouveau produit en présence de musiciens qui ont croisé sa route et d'invités-surprise. Il aura disparu de notre scène depuis déjà plus de deux ans, alors qu'il avait paraphé, à l'occasion du festival international de la jeunesse, son grandiose spectacle, La source devant 250.000 spectateurs au stade du 05-juillet. Safy Boutella avait, alors, intégré au milieu d'une chorégraphie contemporaine et traditionnelle (celle des touareg), un impressionnant jet d'eau éclatant de lumière. Le pionnier de la musique, dont le nom est associé à d'innombrables œuvres aussi bien cinématographiques, télévisuelles, publicitaires, que musicales, continue sans cesse d'explorer l'immense champ du rythme. Né le 6 janvier 1950 à Pirmasens dans l'ex-RFA, compositeur et poly-instrumentiste, ancien élève du Berklee College of Music de Boston aux États-Unis, Safy Boutella est révélé au public avec Kutché, l'album inaugural de l'aventure internationale du raï, qu'il signe avec Cheb Khaled en 1986. Quatre ans plus tard, il enregistre Mejnoun, un opus en forme de manifeste, produit en France par Label Bleu. L'album évoque une déambulation entre sable et asphalte. Résolument urbain, le jazz de Safy Boutella a des sonorités de sable, de bois et de fer-blanc, entre attaques furieuses et foisonnement de battements hypnotiques. “ Ni métissée, ni world”, sa musique est une exploration permanente entre Orient et Occident. Auteur d'un très grand nombre de compositions pour le cinéma, la télévision et la publicité, il a, également, signé les arrangements d'artistes comme Amazigh Kateb & Gnawa Diffusion ( Inaal ding dingue dong, album Algéria, 1996) Amel Wahby (El-Khiyala, album Yabeit, 1998), Djamel Allam (album Gouraya, 1999), le Marocain Abdy (album Galbi, 2000) et Nawel El-Zoghbi (Habib Dialy, Bladi, album Layali, 2000). Safy Boutella joue du jazz algérien. Son deuxième album, Mejnoun, veut dire possédé en français, est une composition originale et audacieuse, un bouquet coloré aux senteurs subtiles, dont l'essence est la culture arabe. Safy Boutella a toujours apporté un bol d'air vivifiant à la musique moderne arabe. A la musique universelle, devrait-on dire, car son inspiration s'envole bien au-delà des frontières. Tandis que la musique algérienne s'essouffle à force d'exploiter le raï, Safy Boutella fait figure de sauveur. Il invente une musique à son image, rebelle aux normes et plurielle. En 1984, dés son retour de Boston où il a bouclé des études de musique, Safy Boutella occupe le poste de chef de section musique, chant et danse à l'entreprise Sonatrach, où il s'occupe d'une école de musique et d'une école de danse pour les enfants des travailleurs. Dans le même temps, il compose plus d'une trentaine de compositions de musiques de films pour le cinéma, la télévision et de musiques le théâtre. Co-auteur en collaboration avec Nadia Mecheri-Saada (Ethnomusicologue) d'un rapport sur la situation musicale et chorégraphique en Algérie et devant servir pour la création d'une “ Commission nationale pour la musique et la danse ”. C'est lui qui a composé une œuvre commandée à l'occasion du 30e anniversaire du déclenchement de la Révolution de Novembre. Composition contemporaine originale intitulée Actions musicales pour une pensée majeure, interprétée par un orchestre symphonique, un chœur de 170 voix mixtes et trois troupes folkloriques du Sahara (Djanet. Tamanrasset et adrar). Artiste complet, Safy Boutella a interprété des premiers rôles dans plusieurs films notamment dans La nuit du Crime, long métrage fiction du marocain Nabyl Lahlou.