Le président américain George W. Bush est arrivé, hier matin, à Abou Dhabi, aux Emirats arabes unis, troisième étape de sa tournée dans le Golfe, d'où il doit s'adresser aux Iraniens, dans ce que la Maison Blanche présente comme le grand discours de son voyage régional. M. Bush venait de Bahreïn, où il a effectué une visite officielle de deux jours. Au cinquième jour d'un périple placé sous le signe de ce qu'il appelle la “menace” iranienne, M. Bush, a pris son petit déjeuner avec quelque quelque 150 marins de la Ve flotte des Etats-Unis dont le quartier général est établi à Manama. Il a plaisanté avec eux et s'est servi en bacon et en pancake avant de s'asseoir à une longue tablée. La zone de responsabilité de la Ve flotte comprend les eaux stratégiques du Golfe et le détroit d'Ormuz, un goulot de quelques dizaines de kilomètres entre l'Iran et la péninsule arabique par où transite une part considérable du trafic pétrolier mondial et où s'est produit le 6 janvier un incident mettant aux prises les marines américaine et iranienne. Cet incident, dont les gouvernements américain et iranien donnent des versions très contradictoires, a causé un nouvel accès de tension rappelant les risques d'une confrontation entre les deux ennemis américain et iranien, objet d'une vive inquiétude pour les gouvernements du Golfe. Selon le Pentagone, des vedettes iraniennes ont harcelé trois bâtiments américains et menacé de les attaquer. Mais la confusion s'est instaurée sur les circonstances et la gravité du face-à-face. La Marine américaine a reconnu qu'il lui était impossible de savoir si un message de menace initialement rendu public par les Américains émanait bien des bateaux iraniens. Le journal Navy Times a rapporté que le message pourrait être l'œuvre d'un plaisantin s'amusant à perturber les communications entre les navires, et connu dans le secteur sous le nom de “Filipino Monkey” (singe philippin). Selon la porte-parole de la Maison Blanche Dana Perino, M. Bush n'a pas évoqué l'incident dimanche avec les marins de la Ve flotte. Mais le vice-amiral Kevin Cosgriff, commandant de la flotte, l'a fait lors d'une discussion avec M. Bush et a dit prendre l'affaire très au sérieux, a-t-elle rapporté. Affirmer sa détermination à contenir l'Iran chiite, dont l'influence grandissante inquiète les alliés sunnites des Etats-Unis, et à assurer la sécurité dans le Golfe est l'une des grandes priorités de M. Bush au cours de son voyage. Cependant, plus encore peut-être que les menées iraniennes, les pays arabes du Golfe redoutent les conséquences d'une nouvelle guerre américaine dans la région. M. Bush a réaffirmé lors de sa tournée que “toutes les options (étaient) sur la table”, mais aussi qu'il entendait épuiser les recours diplomatiques. Il a menacé mercredi l'Iran de riposte militaire en cas d'agression d'intérêts américains. Dimanche, à la fin d'un discours sur les libertés à Abou Dhabi, M. Bush devrait se tourner vers différents peuples de la région et parlera de nouveau aux Iraniens eux-mêmes, de l'autre côté du Golfe, pour leur dire “qu'il existe pour eux un avenir meilleur”, a dit la porte-parole de la Maison Blanche. Dans cette allocution prévue à 15h30 locales (11h30 GMT), M. Bush devrait aussi parler du Liban et, plus largement de démocratie et de lutte contre l'extrémisme. Il devrait aussi évoquer les efforts de paix entre Israéliens et Palestiniens. Pousser à un accord de paix et rallier les pays arabes à cette entreprise constituait l'autre priorité de la tournée de M. Bush, commencée mercredi en Israël et dans les Territoires palestiniens. Samedi encore, au Koweit, M. Bush avait dénoncé les agissements des Iraniens en Irak comme une entrave à la stabilisation d'un pays où pourtant, a-t-il dit, “l'espoir renaît”. “L'Iran doit cesser de soutenir les groupes spéciaux des milices qui attaquent les forces irakiennes et de la coalition, et qui enlèvent et tuent des responsables irakiens”, a-t-il dit lors d'une visite au camp Arifjan, base américaine par laquelle transitent les soldats combattant en Irak. Le général David Petraeus, commandant des forces américaines en Irak, a noté que si certaines attaques perpétrées avec des armes “portant la signature” iranienne avaient baissé ces derniers mois, elles ont de nouveau été multipliées par deux ou trois ces derniers jours.