Le Kosovo, inquiet de l'arrestation en France à la demande de la Serbie de l'ex-chef rebelle Ramush Haradinaj, a accusé vendredi Belgrade de vouloir provoquer tensions et conflits dans les Balkans. Plusieurs centaines de vétérans ont manifesté dans le calme devant l'ambassade de France à Pristina, déployant des banderoles en anglais et en français: Cherchez les criminels en Serbie, Haradinaj est un libérateur, N'insultez pas le Kosovo. La France doit choisir entre le Kosovo et la Serbie, a prévenu un ancien combattant, Besim Tahiri, 39 ans. Haradinaj est une légende vivante, Nous attendons que la France le libère aussi vite que possible, a renchéri un autre, Binak Sylaj, 41 ans. La justice serbe accuse Ramush Haradinaj de crimes de guerre contre des civils lors du conflit de 1998-99 entre les forces de Belgrade et la rébellion albanaise kosovare de l'UCK (Armée de libération du Kosovo). Cette guerre, qui a fait 13.000 morts, devait conduire à la sécession de cette région puis à son indépendance en 2008. Brièvement Premier ministre en 2004-05, Ramush Haradinaj avait été acquitté en 2012 par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Désormais leader d'un parti d'opposition au président Hashim Thaçi, il a été arrêté mercredi à l'aéroport de Bâle-Mulhouse (est de la France) où il venait d'arriver. Il a été incarcéré dans l'attente de sa prochaine comparution devant des magistrats français, dans un délai de dix jours ouvrables à compter de l'interpellation. Le Premier ministre kosovar Isa Mustafa a exprimé vendredi l'inquiétude du gouvernement. L'interpellation a été menée en vertu d'un mandat d'arrêt international délivré par la justice serbe en 2004. Ce mandat est politiquement motivé et inamical de la part de Belgrade, a accusé Isa Mustafa. Ces mandats serbes contre des responsables kosovars, complètement illégaux, ont pour conséquence claire de provoquer des tensions, des conflits, et de remettre en cause le processus européen dans la région et plus largement, a mis en garde Isa Mustafa. Haradinaj n'est pas recherché pour des raisons politiques, mais à cause des crimes de guerre graves commis contre des Serbes, a répliqué le ministère serbe de l'Intérieur Nebojsa Stefanovic. Sur Twitter, le Premier ministre albanais Edi Rama a qualifié d'absurdité l'arrestation de Ramush Haradinaj. La Serbie ne reconnaît pas l'indépendance du Kosovo. Mais un accord de normalisation des relations entre Belgrade et Pristina a été conclu en 2013, sous l'égide européenne. Ramush Haradinaj, adversaire de cette normalisation, était le chef d'une unité, les Aigles noirs, soupçonnés d'avoir torturé et tué dans l'est du Kosovo des dizaines de personnes, serbes, roms ou encore kosovars albanais accusés de collaboration.