Les Bourses européennes ont terminé en baisse de 1% à 2% jeudi, touchant des plus bas de deux ans - à l'exception de Londres qui recule plus modérément - tandis que Wall Street accentue ses pertes, après les annonces jugées décevantes de la Réserve fédérale américaine (Fed) la veille. Comme prévu, la Fed a relevé l'objectif de taux des fonds fédéraux d'un quart de point, à 2,25%-2,50%. Mais elle a déçu certains investisseurs en maintenant une trajectoire des taux à la hausse, quoiqu'à un rythme moins soutenu qu'auparavant, en dépit des incertitudes sur la croissance. Les responsables de la Fed prévoient désormais deux hausses de taux l'année prochaine, contre trois projetées en septembre, et une en 2020. Cette petite révision à la baisse du nombre de hausses anticipées en 2019 n'a pas suffi à rassurer les investisseurs qui se sont repliés sur des valeurs refuge comme les obligations. À Paris, l'indice CAC 40 a perdu 1,78% à 4.692,46 points et le Dax allemand 1,44%. Le Footsie britannique ne perd que 0,72%, moins que les autres places européennes, à la suite de la réunion de politique monétaire de la Banque d'Angleterre qui semble vouloir continuer à prendre en compte la fragilité de son économie et s'abstenir de relever ses taux tant que les incertitudes liées au Brexit continueront de peser. L'indice EuroStoxx 50 a laissé pour sa part 1,66%, le FTSEurofirst 300 1,37% et le Stoxx 600 1,38%. Ce dernier est partie pour réaliser sa plus mauvaise performance depuis 2008, ayant perdu 13,5% depuis le début de l'année. Le recul depuis le début de l'année est de 17,9% pour le Dax, de 12,7% pour le FTSE, de 11,7% pour le CAC et 15% environ pour la Bourse de Milan. "Il semble que les investisseurs sur les marchés à risque souhaitaient une position plus accommodante de la Fed vu l'obsession de la récession qui domine le sentiment de marché", dit Salman Ahmed, responsable de la stratégie d'investissement au niveau mondial chez Lombard Odier Investment Managers.
Valeurs Toutes les valeurs du CAC 40 ont terminé dans le rouge et quasiment toutes celles de l'EuroStoxx 50 perdaient du terrain à la clôture des marchés. Sur le plan sectoriel, l'ensemble des indices européens ont fini en repli, à commencer par ceux des ressources de base (-2,74%) et du pétrole et du gaz (-2,63%), pénalisés par la baisse des cours des métaux et du brut. Les groupes miniers britanniques Rio Tinto, BHP et le spécialiste du négoce de matières premières Glencore ont cédé entre 2% et 3,3%. ArcelorMittal a reculé de son côté de 3,88%. Airbus a chuté de 4,44% après des informations selon lesquelles le département de la Justice américaine a ouvert une enquête pour soupçons de corruption sur le constructeur aéronautique européen. Crédit agricole a lâché 4,00% et Deutsche Bank 7,04% tandis que l'indice bancaire a cédé 2,48%. La Commission européenne soupçonne les deux banques, ainsi que deux autres, d'entente sur le marché secondaire des obligations libellées en dollars entre 2009 et 2015, ce qui pourrait leur valoir de lourdes amendes. DBV Technologies a dégringolé de 69,79% après avoir annoncé mercredi soir le retrait volontaire de sa demande d'autorisation de mise sur la marché du Viaskin Peanut, son traitement phare contre l'allergie à l'arachide, après des discussions avec l'autorité de santé américaine FDA.
Les indicateurs du jour Au Royaume-Uni, les ventes au détail au Royaume-Uni ont augmenté de 1,4%, bien plus qu'attendu, en novembre grâce aux promotions liées au "Black Friday" mais leur tendance de fond reste faible à moins de 100 jours de la sortie annoncée du pays de l'Union européenne. Aux Etats-Unis, les inscriptions hebdomadaires au chômage ont légèrement augmenté la semaine dernière, restant près de leur plus bas de 49 ans touché la semaine précédente, tandis que la croissance de l'activité dans le nord-est des Etats-Unis a fortement ralenti en décembre, selon l'enquête de conjoncture mensuelle de la Réserve fédérale de Philadelphie.
Changes Le dollar est tombé à un plus bas d'un mois, en baisse de 0,4% face à un panier de devises de référence, malgré les perspectives de nouvelles hausses de taux outre-Atlantique, ce qui s'explique par la crainte d'un coup de frein à la croissance américaine. Parallèlement, l'euro avance de 0,4% autour de 1,1423 dollar. Le sterling gagne 0,34% face au dollar après le statu quo annoncé par la Banque d'Angleterre (BoE) et l'annonce de ventes au détail britanniques en hausse plus forte que prévu en novembre. Les incertitudes liées au Brexit se sont "considérablement amplifiées" durant le mois écoulé et la baisse des cours pétroliers amènera sans doute l'inflation en deçà de l'objectif de 2% prochainement, a pourtant averti la BoE, qui a maintenu son taux directeur à 0,75%. La couronne suédoise est en forte hausse face à l'euro après la décision de la Riksbank de relever son taux directeur pour la première fois depuis plus de sept ans.
Taux L'aversion au risque déclenchée par les décisions et le discours de la Fed profite aux marchés de taux. Les rendements des obligations d'Etat européennes reculent dans le sillage de ceux des obligations du Trésor américain la veille. Celui des Treasuries à 10 ans évolue près de 2,76%, contre 2,77% mercredi soir, après avoir touché un creux de plus de huit mois à 2,748%. Le dix ans allemand remonte un peu, à 0,228%, après un creux de 0,203% en séance, son plus bas niveau depuis fin mai. La reprise de la hausse des taux à court terme réveille les craintes d'une inversion de la courbe des taux, historiquement annonciatrice d'une récession. Le rendement des Treasuries à 2 ans est remonté à 2,67% contre 2,64%.
Wall Street termine en forte baisse Wall Street a terminé en forte baisse mercredi, les investisseurs estimant que le ton employé par la banque centrale américaine après une hausse de ses taux et un abaissement de ses perspectives pour l'an prochain n'était pas assez conciliant. Selon les résultats définitifs à la clôture, l'indice vedette de la Bourse de New York, le Dow Jones Industrial Average, a perdu 1,49% pour terminer à 23.323,66 points. L'indice Nasdaq, à forte coloration technologique, a lâché 2,17%, à 6.636,83 points. L'indice S&P 500, quant à lui, a cédé 1,54% à 2.506,96 points. Ces trois indices ont tous terminé à leur plus bas niveau de l'année. A l'issue d'une réunion particulièrement scrutée par les investisseurs, la banque centrale américaine (Fed) a décidé d'augmenter ses taux directeurs d'un quart de point, les fixant désormais dans une fourchette entre 2,25% et 2,50%, et ce malgré l'opposition virulente du président américain Donald Trump. "Les considérations politiques ne jouent absolument aucun rôle" dans les décisions de la Fed, a martelé Jerome Powell, président de la Fed depuis moins d'un an et qui a essuyé de violentes critiques de l'hôte de la Maison Blanche. L'institution a en revanche revu à la baisse ses perspectives de hausses de taux pour l'an prochain, de trois à deux, en raison notamment d'une décélération de la croissance économique à l'étranger et de récents troubles sur le marché boursier. Dans ce contexte délicat, la Fed a en outre abaissé ses prévisions de croissance et d'inflation aux Etats-Unis pour 2018 et 2019. Elle table désormais sur une croissance de 3% cette année et de 2,3% l'an prochain, contre respectivement 3,1% et 2,5% lors de ses projections de septembre. Malgré cette prudence, "les investisseurs ne sont pas satisfaits de voir que la Fed compte augmenter ses taux deux fois l'an prochain", et donc poursuivre son resserrement monétaire, compte tenu des risques actuels qui pèsent sur l'économie, a indiqué Sam Stovall, de CFRA. Les investisseurs surveillent la perspective de ralentissement américain comme le lait sur le feu depuis plusieurs semaines. Cette crainte a été à l'origine de lourdes pertes à Wall Street ces derniers jours. En tout état de cause, M. Powell "était dans une situation perdant-perdant", a estimé Jack Ablin, de Cresset Wealth Advisors. "Ou bien il revoyait à la baisse ses prévisions de croissance et les marchés se seraient inquiétés, ou bien il ne changeait rien et là les investisseurs y auraient vu le signe d'un resserrement monétaire trop brutal", a analysé le spécialiste. Sur le marché obligataire, le taux sur la dette à dix ans des Etats-Unis se repliait nettement, à 2,779% vers 21H25 GMT, contre 2,818% mardi à la clôture, et celui à 30 ans à 2,990%, contre 3,068% la veille. Ces taux sont particulièrement sensibles aux perspectives de croissance et d'inflation aux Etats-Unis.