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«Peu de journaux réservent une place à la culture»
Belkacem Rouache, Journaliste écrivain au Midi Libre
Publié dans Le Midi Libre le 14 - 04 - 2009

Un amoureux de la mer, ainsi se définit lui-même Belkacem Rouache. En fait, on peut dire qu'il a plusieurs cordes à son arc: journaliste, critique de théâtre et de cinéma, féru d'art plastique, il a aussi à son actif plusieurs publications dans le domaine de la poésie, du roman et de l'essai, dont l'un sur les orientalistes et un autre sur les femmes peintres. Enfin, on n'oubliera pas de parler de son autre hobby : l'audiovisuel, puisqu'il est l'un des rares scénaristes pour la télévision, avec des scénarios pour des feuilletons et des sitcoms, dont Pas de gazouz pour Azzouz et Chahra.
Un amoureux de la mer, ainsi se définit lui-même Belkacem Rouache. En fait, on peut dire qu'il a plusieurs cordes à son arc: journaliste, critique de théâtre et de cinéma, féru d'art plastique, il a aussi à son actif plusieurs publications dans le domaine de la poésie, du roman et de l'essai, dont l'un sur les orientalistes et un autre sur les femmes peintres. Enfin, on n'oubliera pas de parler de son autre hobby : l'audiovisuel, puisqu'il est l'un des rares scénaristes pour la télévision, avec des scénarios pour des feuilletons et des sitcoms, dont Pas de gazouz pour Azzouz et Chahra.
Midi Libre : Je voudrai d'abord m'adresser au journaliste, sinon au critique littéraire, de cinéma, théâtre, arts plastiques. Quelle place occupe la critique dans la presse algérienne ?
Belkacem Rouache : On ne peut vraiment parler de critique littéraire de cinéma, de théâtre, d'art plastique… Tant qu'il n'existe pas de revues spécialisées.
Dommage ! Quelques revues paraissent juste le temps d'être connues par le public et disparaissent comme le vent. Quant aux quotidiens, comme vous le savez, leur principal rôle est surtout l'information. Ils informent le public sur les nouveautés et sur l'actualité. Même pour ces activités culturelles, il faut une spécialisation car il n'est pas facile de présenter une œuvre littéraire, cinématographique, théâtrale ou picturale si on n'a pas une grande culture. De toute manière, il y a très peu de journaux qui réservent une place à la culture.
Critique mais aussi créateur, vous avez publié plusieurs livres dans différents genres littéraires (roman, poésie, nouvelles…); parlez-nous un peu de vos œuvres.
Ce n'est pas facile de parler de soi, mais je vais essayer. Très jeune, j'ai commencé à écrire la poésie, mon premier recueil de poésie intitulé Certitude incertaine, je l'ai écrit dans les années 1960-1970, je l'ai publié en 1982. D'ailleurs vous étiez le premier journaliste à présenter ce recueil dans le journal Algérie Actualités. Je garde d'ailleurs un très bon souvenir. Lorsque je suis entré à la salle de rédaction, j'avais trouvé feu Tahar Djaout, Abdelkrim Djaad et vous. Je vous ai présenté le recueil et on est sorti discuter dans un café.
Le deuxième livre, c'est un roman Le Naufrage rythmé qui a pour thème la crise identitaire, puis un autre recueil de poésie Tant que le soleil se lèvera et un recueil de nouvelles La Grotte suivi de Chants des sirènes paru en 2003 aux éditions ANEP, un livre L'enfant algérien pour l'UNICEF. Dans quelques mois je vais éditer un recueil de poésie et je prépare un roman.
On dit que vous êtes venu au cinéma par le biais de la littérature. Quelles sont les passerelles qui existent entre les deux arts ?
Effectivement, comme je l'ai souligné, j'ai commencé par la poésie, le roman, puis la nouvelle ( j'ai eu le premier prix de la Poésie en 1991 par le Centre culturel français et le premier prix de la Nouvelle de la ville d'Alger en 1997). Comme je vous disais, j'étais aussi très attiré par le cinéma, mais je savais qu'en Algérie le secteur de l'audiovisuel, d'une manière générale, était fermé pour les gens de l'extérieur et comme tout poète, je rêvais. Je savais que cette «chose» personne ne pourrait nous l'enlever, alors je me suis débrouillé des scénarios de films d'Alfred Hitchcock, de Spielberg et d'autres réalisateurs célèbres. Je les ai lus et c'est ainsi que j'ai appris à «construire» une dramatique. C'est aussi grâce à feu Mustapha Boubenider qui était en cette période directeur de production et qui m'avait introduit à l'ENPA (actuellement dissoute) et j'ai proposé mon premier scénario qui a été réalisé par Amar Tribèche.
S'il y avait une dizaine d'hommes comme Mustapha Boubenider, je pense que le cinéma en Algérie serait florissant, parce qu'il voulait introduire du sang neuf, mais les fonctionnaires de cet établissement nous considéraient comme «corps étranger» et c'était pour cette raison qu'il avait été mis à l'écart, il aimait beaucoup les jeunes, c'était un chercheur de talent. Il voulait même créer un atelier d'écriture, mais hélas !
Le monde de l'audiovisuel n'est-il pas un peu fermé ?
Justement, je pense que c'est pour cette raison que le cinéma et même le théâtre n'ont pas évolué. Le dramaturge Chérif Ayad m'avait dit un jour que les comédiens voulaient à tour de rôle mettre en scène les pièces qu'ils avaient écrites. Vous voyez comment fonctionne le théâtre en Algérie ? Je dirai que le théâtre et le cinéma n'évolueront pas tant qu'ils ne s'ouvriront par sur le monde extérieur, c'est-à-dire les écrivains et les autres métiers artistiques. Pour ma part, j'ai écrit le premier sit-com algérien Pas de gazouz pour Azzouz réalisé par Amar Tribèche, un feuilleton Chahra réalisé par Bachir Belhadj, un téléfilm Cri des mouettes et un feuilleton est en voie de préparation.
Quelques évènements culturels ont dopé la production en Algérie: il y a eu l'Année de l'Algérie en France, Alger capitale de la culture arabe 2007, bientôt il y aura le Festival panafricain; de telles manifestations sont-elles importantes pour les créateurs et les artistes ?
C'est bien d'organier des festivals en Algérie, ils permettent de créer une dynamique, de donner du travail aux professionnels du 7e art, mais il ne faut pas perdre de vue que le cinéma est une industrie, il faut la formation dans les différents métiers, il faut des salles de cinéma, la distribution, la publicité. La même chose pour le théâtre, la musique...
L'argent est le nerf de la guerre, dit-on.
Quels sont les rapports entre la culture et l'argent ?
C'est bien dit, on ne fait pas de l'art pour l'art. On est impuissant sans argent et on ne peut rien faire. Dans les années 1980, le cinéma en Algérie était financé en grande partie par l'argent qui provenait de la billetterie. Actuellement, il n'y a plus que 12 salles qui fonctionnent. Par ailleurs, j'ai appris qu'elles seront reprises par le ministère de la Culture. C'est une bonne chose si elles seront affectées aux professionnels avec un cahier des charges. Il existe également d'autres sources de financement sous la forme de sponsoring, mais cette tradition n'est pas encore implantée dans notre pays.
Vous avez écrit plusieurs recueils de poésie. Or, ne cesse-t-on de répéter, les éditeurs refusent de prendre la poésie. Vous pensez que la poésie n'a pas son public?
La poésie a toujours son public, mais tout dépend de la qualité et du genre. Les fleurs du mal de Baudelaire a encore son public. Nazar Kabbani, Adonis ….
Les éditeurs n'ont pas tout à fait tort. Mais je pense que lorsqu'ils trouvent de bons textes, ils sont preneurs. De toute manière, ils sont obligés pour survivre de mettre en avant l'aspect financier. Aussi, la vente de livres poésies, romans ou autres œuvres dépend de la promotion. En Algérie, les médias ne jouent pas le jeu. Beaucoup d'écrivains ont été inconnus dans leur pays, mais il a suffi qu'ils passent dans une chaîne de télévision étrangère pour qu'ils soient célèbres, puis la presse et les médias algériens répandent l'information comme l'écho des montagnes.
Au début du pluralisme, en 1989 certains avaient espéré que la société civile allait prendre à bras le corps
la culture et qu'une dynamique culturelle était possible. N'y a-t-il pas une certaine déception en la matière?
Je dirai que même la société civile a failli à son devoir. La culture est une affaire de tous. Par ailleurs, ces dernières années, on constate que la scène culturelle et artistique enregistre beaucoup d'activités. Cependant, ce qui manque le plus, c'est la création. La plupart de ces activités sont des spectacles. Je pense que les structures de l'Etat doivent surtout encourager la création et l'originalité. Par exemple, l'université devrait contribuer à la recherche et à la critique dans les différents domaines de la vie culturelle, alors qu'elle est pratiquement absente, hormis certains cas isolés qui écrivent des livres non seulement dans le domaine culturel, mais aussi économique; politique, sociologique...
Vous êtes aussi un homme de radio, puisque vous animez une émission hebdomadaire sur la culture. Parlez-nous de cette expérience.
Effectivement, la radio algérienne m'avait sollicité pour la conception d'émissions culturelles. J'ai conçu 5 émissions dont Alouane wa Taabir (couleurs et expressions) diffusée à la Chaîne I. Elle traite du thème des arts plastiques, c'est la première fois qu'une émission de ce genre passe à la radio.
Par cette émission, je voulais surtout vulgariser cet art et faire connaître les artistes peintres algériens. Il y avait aussi Naghmat Bladi où on essayait de faire connaître les maîtres de la chanson algérienne et les différents genres musicaux. Il y avait également Ciné-citar, une émission sur le cinéma et le théâtre, ainsi que Cyber el founoun et Riouak el Fen. C'est une très bonne expérience et je dirai que la radio est une bonne école.
Midi Libre : Je voudrai d'abord m'adresser au journaliste, sinon au critique littéraire, de cinéma, théâtre, arts plastiques. Quelle place occupe la critique dans la presse algérienne ?
Belkacem Rouache : On ne peut vraiment parler de critique littéraire de cinéma, de théâtre, d'art plastique… Tant qu'il n'existe pas de revues spécialisées.
Dommage ! Quelques revues paraissent juste le temps d'être connues par le public et disparaissent comme le vent. Quant aux quotidiens, comme vous le savez, leur principal rôle est surtout l'information. Ils informent le public sur les nouveautés et sur l'actualité. Même pour ces activités culturelles, il faut une spécialisation car il n'est pas facile de présenter une œuvre littéraire, cinématographique, théâtrale ou picturale si on n'a pas une grande culture. De toute manière, il y a très peu de journaux qui réservent une place à la culture.
Critique mais aussi créateur, vous avez publié plusieurs livres dans différents genres littéraires (roman, poésie, nouvelles…); parlez-nous un peu de vos œuvres.
Ce n'est pas facile de parler de soi, mais je vais essayer. Très jeune, j'ai commencé à écrire la poésie, mon premier recueil de poésie intitulé Certitude incertaine, je l'ai écrit dans les années 1960-1970, je l'ai publié en 1982. D'ailleurs vous étiez le premier journaliste à présenter ce recueil dans le journal Algérie Actualités. Je garde d'ailleurs un très bon souvenir. Lorsque je suis entré à la salle de rédaction, j'avais trouvé feu Tahar Djaout, Abdelkrim Djaad et vous. Je vous ai présenté le recueil et on est sorti discuter dans un café.
Le deuxième livre, c'est un roman Le Naufrage rythmé qui a pour thème la crise identitaire, puis un autre recueil de poésie Tant que le soleil se lèvera et un recueil de nouvelles La Grotte suivi de Chants des sirènes paru en 2003 aux éditions ANEP, un livre L'enfant algérien pour l'UNICEF. Dans quelques mois je vais éditer un recueil de poésie et je prépare un roman.
On dit que vous êtes venu au cinéma par le biais de la littérature. Quelles sont les passerelles qui existent entre les deux arts ?
Effectivement, comme je l'ai souligné, j'ai commencé par la poésie, le roman, puis la nouvelle ( j'ai eu le premier prix de la Poésie en 1991 par le Centre culturel français et le premier prix de la Nouvelle de la ville d'Alger en 1997). Comme je vous disais, j'étais aussi très attiré par le cinéma, mais je savais qu'en Algérie le secteur de l'audiovisuel, d'une manière générale, était fermé pour les gens de l'extérieur et comme tout poète, je rêvais. Je savais que cette «chose» personne ne pourrait nous l'enlever, alors je me suis débrouillé des scénarios de films d'Alfred Hitchcock, de Spielberg et d'autres réalisateurs célèbres. Je les ai lus et c'est ainsi que j'ai appris à «construire» une dramatique. C'est aussi grâce à feu Mustapha Boubenider qui était en cette période directeur de production et qui m'avait introduit à l'ENPA (actuellement dissoute) et j'ai proposé mon premier scénario qui a été réalisé par Amar Tribèche.
S'il y avait une dizaine d'hommes comme Mustapha Boubenider, je pense que le cinéma en Algérie serait florissant, parce qu'il voulait introduire du sang neuf, mais les fonctionnaires de cet établissement nous considéraient comme «corps étranger» et c'était pour cette raison qu'il avait été mis à l'écart, il aimait beaucoup les jeunes, c'était un chercheur de talent. Il voulait même créer un atelier d'écriture, mais hélas !
Le monde de l'audiovisuel n'est-il pas un peu fermé ?
Justement, je pense que c'est pour cette raison que le cinéma et même le théâtre n'ont pas évolué. Le dramaturge Chérif Ayad m'avait dit un jour que les comédiens voulaient à tour de rôle mettre en scène les pièces qu'ils avaient écrites. Vous voyez comment fonctionne le théâtre en Algérie ? Je dirai que le théâtre et le cinéma n'évolueront pas tant qu'ils ne s'ouvriront par sur le monde extérieur, c'est-à-dire les écrivains et les autres métiers artistiques. Pour ma part, j'ai écrit le premier sit-com algérien Pas de gazouz pour Azzouz réalisé par Amar Tribèche, un feuilleton Chahra réalisé par Bachir Belhadj, un téléfilm Cri des mouettes et un feuilleton est en voie de préparation.
Quelques évènements culturels ont dopé la production en Algérie: il y a eu l'Année de l'Algérie en France, Alger capitale de la culture arabe 2007, bientôt il y aura le Festival panafricain; de telles manifestations sont-elles importantes pour les créateurs et les artistes ?
C'est bien d'organier des festivals en Algérie, ils permettent de créer une dynamique, de donner du travail aux professionnels du 7e art, mais il ne faut pas perdre de vue que le cinéma est une industrie, il faut la formation dans les différents métiers, il faut des salles de cinéma, la distribution, la publicité. La même chose pour le théâtre, la musique...
L'argent est le nerf de la guerre, dit-on.
Quels sont les rapports entre la culture et l'argent ?
C'est bien dit, on ne fait pas de l'art pour l'art. On est impuissant sans argent et on ne peut rien faire. Dans les années 1980, le cinéma en Algérie était financé en grande partie par l'argent qui provenait de la billetterie. Actuellement, il n'y a plus que 12 salles qui fonctionnent. Par ailleurs, j'ai appris qu'elles seront reprises par le ministère de la Culture. C'est une bonne chose si elles seront affectées aux professionnels avec un cahier des charges. Il existe également d'autres sources de financement sous la forme de sponsoring, mais cette tradition n'est pas encore implantée dans notre pays.
Vous avez écrit plusieurs recueils de poésie. Or, ne cesse-t-on de répéter, les éditeurs refusent de prendre la poésie. Vous pensez que la poésie n'a pas son public?
La poésie a toujours son public, mais tout dépend de la qualité et du genre. Les fleurs du mal de Baudelaire a encore son public. Nazar Kabbani, Adonis ….
Les éditeurs n'ont pas tout à fait tort. Mais je pense que lorsqu'ils trouvent de bons textes, ils sont preneurs. De toute manière, ils sont obligés pour survivre de mettre en avant l'aspect financier. Aussi, la vente de livres poésies, romans ou autres œuvres dépend de la promotion. En Algérie, les médias ne jouent pas le jeu. Beaucoup d'écrivains ont été inconnus dans leur pays, mais il a suffi qu'ils passent dans une chaîne de télévision étrangère pour qu'ils soient célèbres, puis la presse et les médias algériens répandent l'information comme l'écho des montagnes.
Au début du pluralisme, en 1989 certains avaient espéré que la société civile allait prendre à bras le corps
la culture et qu'une dynamique culturelle était possible. N'y a-t-il pas une certaine déception en la matière?
Je dirai que même la société civile a failli à son devoir. La culture est une affaire de tous. Par ailleurs, ces dernières années, on constate que la scène culturelle et artistique enregistre beaucoup d'activités. Cependant, ce qui manque le plus, c'est la création. La plupart de ces activités sont des spectacles. Je pense que les structures de l'Etat doivent surtout encourager la création et l'originalité. Par exemple, l'université devrait contribuer à la recherche et à la critique dans les différents domaines de la vie culturelle, alors qu'elle est pratiquement absente, hormis certains cas isolés qui écrivent des livres non seulement dans le domaine culturel, mais aussi économique; politique, sociologique...
Vous êtes aussi un homme de radio, puisque vous animez une émission hebdomadaire sur la culture. Parlez-nous de cette expérience.
Effectivement, la radio algérienne m'avait sollicité pour la conception d'émissions culturelles. J'ai conçu 5 émissions dont Alouane wa Taabir (couleurs et expressions) diffusée à la Chaîne I. Elle traite du thème des arts plastiques, c'est la première fois qu'une émission de ce genre passe à la radio.
Par cette émission, je voulais surtout vulgariser cet art et faire connaître les artistes peintres algériens. Il y avait aussi Naghmat Bladi où on essayait de faire connaître les maîtres de la chanson algérienne et les différents genres musicaux. Il y avait également Ciné-citar, une émission sur le cinéma et le théâtre, ainsi que Cyber el founoun et Riouak el Fen. C'est une très bonne expérience et je dirai que la radio est une bonne école.


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