Les Algériens ont, par millions, quasiment à une unanimité nationale sans précédent dans l'histoire de l'Algérie indépendante, exprimé, hier vendredi, aux quatre coins du pays et dans la capitale en particulier, un refus franc, catégorique et sans appel, à la candidature de Abdelaziz Bouteflika pour un cinquième mandat à la tête du pays. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Un rejet populaire d'autant plus réel du candidat, de son bilan et de l'ensemble de son système que cette insurrection, d'un pacifisme et d'un civisme inédits, n'est portée par aucune entité de quelque nature que ce soit : le face-à-face est désormais entre le pouvoir et le peuple algérien. Sans aucune tutelle partisane, pas même celle de l'opposition dans son ensemble, cet historique élan populaire met le pouvoir en très mauvaise posture, presque désarmé et sans marge de manœuvre possible pour s'en sortir «à l'ancienne». Les réponses voulues «spectaculaires» de Bouteflika, contenues dans son message du 3 mars dernier, sont d'ores et déjà caduques, balayées d'un trait par le tsunami de ce vendredi 8 mars. Faire passer le cinquième mandat comme le non moins contestable quatrième, via un processus électoral classique relève, cette fois, du domaine du miracle dans une Algérie foncièrement déterminée à en barrer la route. C'est d'ailleurs à se demander comment, après les trois gigantesques révoltes populaires nationales du 22 février, du 1er et, surtout, du 8 mars, le pouvoir compte organiser une campagne électorale, tenir l'élection et faire triompher son candidat. Un candidat dont l'impopularité est extraordinairement majoritaire dans tout le pays. Certes, ce serait pour le moins faire preuve d'une puérile naïveté que de croire que le pouvoir lâchera prise si facilement, pour accéder aux revendications, notamment celle, centrale, exigeant le départ de Bouteflika et de l'ensemble de son système. Il est d'ailleurs à parier que les tout prochains jours réserveront beaucoup de «surprises», en l'occurrence des annonces et des décisions pour tenter de «renverser la vapeur». Mais il est clair qu'il faudrait de véritables réponses fortes, des décisions autrement plus fortes en fait, que «les six engagements» du 3 mars. A plus forte raison que, depuis le 22 février dernier, Bouteflika et le pouvoir sont comme sans aucune base sociale avec des partis de l'Alliance complètement tétanisés, des organisations de masse essoufflées et débordées par leurs propres bases respectives et une direction de campagne, plus occupée à se «reconstruire» et à convaincre ses propres troupes, qu'à véritablement mener campagne pour son candidat… K. A.