, c'est une excellente chose. S'il dérange, c'est qu'il est sur la bonne voie. La sérénité avec laquelle il se déroule, calme, pacifique, bon enfant, souriant, décrispé, prouve (si besoin est) qu'il est la voie de l'Histoire, cette histoire qui, aujourd'hui ou demain, accouchera de l'Algérie que le peuple souhaite. Il dérange au point où certains actent, déjà, l'échec du Hirak, comme si le Hirak était un match de football, duquel devraient fatalement sortir un vainqueur et un vaincu. Cette vision manichéenne n'est pas la bonne. Le Hirak est une manière civilisée de lutter sur le terrain de la revendication, afin de monter un projet de société, eu égard à 57 ans de fuite en avant, de gabegie, d'échec de politiques importées, de magouilles, d'enrichissement sans cause et de répression. Un peu à la manière d'un Gandhi qui, du summum de « sa » non-violence, a réussi à bouter hors de l'Inde une Angleterre conquérante. Oui, j'ose ce parallèle ! Ceci pour dire à ceux qui prédisent déjà la mort du Hirak, et qui vont jusqu'à signer son acte de décès, se trompent lourdement. Car le Hirak n'est pas circonscrit exclusivement aux sorties du mardi et du vendredi. Le Hirak aura, d'ores et déjà, mis en place un mécanisme de lutte, qui fera date en Algérie. Il écrit une philosophie nouvelle de l'action militante de la société. Il n'est pas destiné à une confrontation violente avec le système (ou le pouvoir). Dès sa naissance, du reste, le mot principal fut cette expression « Silmya ». Il n'y a pas eu un seul jour où les manifestants s'en sont pris aux forces de l'ordre ; à chaque fois que ces dernières allaient au charbon, comme à Oran, le cri de « Silmya » résonnait comme un cri de paix. Alors, ceux qui croient (et qui l'écrivent) que le Hirak a échoué bêtement, car – disent-ils, le temps ne joue pas en sa faveur mais joue en faveur du pouvoir. Tout dépend de l'optique historique par laquelle on prend ce mouvement citoyen. Le Hirak dérange, c'est une excellente chose. S'il dérange, c'est qu'il est sur la bonne voie. Il n'y a qu'à voir le jeu du pouvoir, consistant à libérer quelques détenus d'opinion, d'en garder d'autres (sans raison, à mon sens), puis d'arrêter des hirakistes, pratiquement chaque vendredi. Ce bégaiement du pouvoir prouve, me semble-t-il, que le Hirak est sur la bonne voie. Les oiseaux de mauvais augure ne manqueront pas de hululer sur le passage des hirakistes. C'est de bonne guerre ! Attention, je ne leur conteste pas le droit de faire leur triste bilan. Mais, j'ai le droit de leur dire que votre appréciation est loin de la réalité. Encore une fois, le Hirak a créé une dynamique salvatrice pour notre pays. Le peuple s'est réveillé, il n'a plus peur, il usine ses espoirs, il travaille son avenir, il aime son pays. Quant aux chagrinés du bulbe, ils devraient être sur place, constater de visu la noblesse de la gestuelle hirakiste et les mots d'ordre lancés, çà et là. Quant aux chagrinés, ils devraient se mettre à la place des détenus d'opinion. Quant aux chagrinés, ils devraient se mettre à la place des bastonnés, sans raison. Le ministre de la Santé, bien sûr l'actuel, est génial. Franchement, je le trouve génial. A peine installé dans son bureau, il envoie aux hôpitaux une note. Une note que je trouve, tout simplement, géniale. Fallait-il la faire, cette note ? Elle coule de source. Tenez-vous bien : « Pas d'abus de téléphone pendant les heures de travail », « les déplacements en tenue en dehors de la structure », « l'absentéisme ». Et notre ministre, génial qu'il est, réinventa le fil à couper le beurre. Ces machins, portés par cette note, relève de la vérité de La Palice. Ces notes existent depuis l'existence de l'administration algérienne. Pourquoi, dès lors, rééditer cette note. Cette note ne sert à rien. Surtout quand je vois, sur site, l'état dans lequel se trouvent nos hôpitaux. Le manque d'hygiène. Le manque de matériel. Le manque de moyens. La cohue. La congestion des hôpitaux. J'ai vu, de mes propres yeux, un blessé se faire suturer à la lumière d'un téléphone portable. Parce que les plafonniers étaient presque aveugles. Oui, j'ai vu cette scène. Autre chose, bien malin celui qui peut faire la différence entre un médecin, une infirmière, une aide-soignante et/ou une femme de salle. Alors, la note, c'est vraiment un geste bureaucratique de trop. Désolé, il faut réinventer l'hôpital algérien. Ceci me fait penser à ces jeunes, qui se placent à des endroits stratégiques de la ville ou de l'autoroute, vêtus de chasubles, tenant entre les mains un carton sous forme d'urne, demandant de l'argent aux passantes et passants, afin de soigner un malade de leur village à l'étranger. Sur l'urne en carton est scotché un papier officiel, signé généralement du maire et de présidents d'associations. Je fais, maintenant, le rapprochement avec notre hôpital. Ou nos hôpitaux. Pourquoi ne se soignent-ils pas en Algérie ? Il n'y a pas de spécialistes pour cette pathologie, disent-ils. Et alors ? Si c'est le cas, les pouvoirs publics doivent les transférer à l'étranger. Pourquoi faire une quête publique ? Il y a un ministère de la Santé. Il y a un Croissant-Rouge. Au lieu de faire des notes, il faut se pencher sur ces cas d'espèce. Puis, localement, il y a une Direction de la santé qui, me semble-t-il, est en mesure de juger de l'ampleur de chaque cas. Je précise que ces jeunes bénévoles font un travail gigantesque ; qu'il pleuve ou qu'il vente, ils sont là, demandant la pièce, pour permettre à un Algérien malade d'aller se soigner à l'étranger. En France. En Turquie. En Belgique. En Tunisie. Je trouve cela terrible. Ah, si le Val-de-Grâce leur était ouvert ! Depuis un moment, les réseaux sociaux sont utilisés par certains, pour déverser leur haine sur les uns et les autres. Ils sont connus. Il est inutile que je les cite dans cet espace de parole. Le dernier en date a fait un saut dans l'inconnu, lui, le commis de l'Etat. Il accuse, tout bonnement, Abane Ramdane d'être un traître. Rien que ça ! Oh, je ne vais pas entrer dans le sacro-saint droit de réserve. Les réseaux sociaux autorisent toutes les dérives. Ce monsieur a-t-il les compétences intellectuelles pour s'autoriser une telle affirmation ? Dispose-t-il de documents d'époque ? A-t-il fait des recherches sur ce plan ? Quelle mouche l'a piqué pour aller dans cette aventure ? A quel dessein politique a-t-il obéi ? Il faut le reconnaître, l'amazighophobie fait des siennes. Il faut que cela cesse ! Y. M.