1 200 médecins algériens vont quitter le pays pour aller faire leur métier et «surtout» leur vie en France. Le chiffre est précis parce qu'il ne concerne qu'une liste, une destination, un... mode opératoire pour quitter le pays, une évaluation des connaissances et une période. Parmi toutes ces données, il y en a deux sur lesquelles il faudra peut-être s'arrêter. La première est l'évaluation des connaissances, l'examen pour faire simple. Il serait intéressant de savoir combien d'autres compatriotes, praticiens de la santé ont subi cette épreuve et y ont été recalés, la sélection en l'occurrence étant particulièrement rigoureuse et le cycle de formation ordinaire en médecine dans notre pays ne préparant pas vraiment à ce genre de compétition. Pour tout dire, ceux qui ont franchi cet écueil sont d'abord les meilleurs de leur graduation. Ce sont ensuite ceux qui ont accédé à des opportunités de formation à distance et pu mettre à jour leurs connaissances, souvent dépassées, quand elles ne sont pas obsolètes. Il y a ensuite l'espace-temps. Histoire de mettre les mots dans leur sens, disons « la conjoncture ». Cette liste de médecins candidats à l'exil professionnel et surtout à l'exil tout court n'est pas la conséquence politique et managériale de ces deux ou trois dernières années. C'est le résultat de longues et calamiteuses accumulations qui ont toutes leurs «bilans de conjoncture». La différence est que les Algériens n'en ont pas toujours pris connaissance de manière aussi nette, même s'ils n'en avaient pas besoin pour en savoir l'essentiel de différentes façons dont la plus évidente est qu'ils vivaient ça dans leur... chair. Imputer donc la situation exprimée par ces 1 200 médecins à l'équipe aux affaires du pays est injuste. Si les choses ne vont pas mieux aujourd'hui, ce n'est pas une bonne raison de faire des cadeaux à deux décennies d'errements dont on découvre chaque jour un peu plus le caractère criminel. On en arrive donc aux... chiffres. Si les Algériens ont la surprise sincère et la colère légitime de voir autant de ceux qui les soignent quitter le pays, c'est d'abord parce qu'ils se posent cette question : ce n'était déjà pas très brillant pour notre santé avant. Avec tous ces toubibs qui partent, ça va être pire, non ? Et puis ces évidences : les médecins n'ont ni moins ni plus de raisons de changer de pays. S'ils ne sont pas matériellement les plus malheureux, ils n'ont pas non plus le niveau de vie de leur rang. Si leurs perspectives de promotion ne sont pas toujours prometteuses, elles ne sont en rien différentes des autres pans de l'activité nationale. S'il n'y avait que ce chiffre pour les inquiéter, les Algériens devraient peut-être les revoir. En imaginant combien d'autres médecins n'ont pas réussi leur examen et vont donc se déployer autrement pour partir, combien s'y sont déjà... pris autrement et combien attendent simplement un visa ! Comme beaucoup de monde, quoi. Les mauvaises langues diront «comme tout le monde». S. L.