Le 12 février 1976, à quelque 400 km de ce qui sert depuis les camps de réfugiés, alors que l'Espagne ne s'était pas encore retirée du Sahara occidental, des horreurs sont commises. Le récit de Abdesslam Lahcen Omar, rescapé de la fosse commune de ce 12 février 1976, est poignant : «Le soldat me frappe et me dit : crie vive le roi. Je crie vive le roi... Puis, ils massacrent les autres et moi je pars.» A ses côtés, à Bruxelles (au Parlement, à la Commission, chez les collaborateurs du ministre belge des AE ou dans le cabinet de Madame Ashton, Relex UE) et venant de Genève, des enfants et des familles des victimes du massacre. Soutenus par Carlos Martin Beristain et Francisco Etxebarria Gabilondo, juriste et médecin, tous deux experts, qui veulent engager le combat de la responsabilité de l'Espagne dans cette affaire... Au Parlement européen, au cabinet de Mme Ashton, relations extérieures et sécurité commune de l'UE, ou chez les collaborateurs de Didier Raynders, «relex» du royaume de Belgique, les témoignages de Gabula Selma Daf et Mahmud Daf Buyemaâ (frère et sœur) sont poignants. Saisissants. Ils disent, preuves tangibles à l'appui et experts espagnols en appui juridique, la responsabilité pleine et entière du Maroc dans le massacre des Sahraouis du 12 février 1976. Pourquoi cette date est-elle importante et pourquoi Carlos Martin Beristain et Francisco Etxebarria Gabilondo, les experts d'Espagne engagent-ils la bataille de la fosse commune du 12 février 1976 ? Parce que, tout d'abord, c'est horrible, c'est l'horreur même, ensuite parce que cette découverte remet en cause un mensonge d'Etats. Marocain et Espagnol. Les Espagnols se sont retirés, certes c'était un retrait contraire à la morale et au droit, mais retrait tout de même le 27 février 1976, quinze jours, donc avant que le Maroc ne commette cet abominable crime. C'est donc la responsabilité de l'Espagne qui est engagée et les victimes sont espagnoles. A l'époque des faits, le Sahara occidental portait l'étendard colonial espagnol. La faille est donc réelle et les experts ont raison d'engager des procédures contre Madrid et contre Rabat. Gabula et Mohamed Daf ont été troublés mais tout de même soulagés d'apprendre que leur père a été assassiné en ce jour du 12/02/76. «Cela nous permet de faire, maintenant, notre deuil et de penser aux autres victimes, à notre peuple, à son indépendance.» Le plus attristant et grave en cette triste affaire et que la Commission justice et vérité installée, pour solder la période noire de Hassan II, soi-disant a commis en la circonstance plusieurs mensonges invalidant ses conclusions. Elle a donné de fausses informations en disant aux familles des victimes que leurs parents ont été transférés vers des prisons du Maroc et que là-bas leur trace a été perdue. Ensuite, ladite commission a révélé aux familles que leurs proches étaient décédés en détention, avec des «preuves» et «des témoins» crédibles. Que du bidon tout cela, et les enfants des Sahraouis massacrés le 12 février 1976 dans le Sahara espagnol ont ramené hier à Bruxelles des documents (les vrais) et témoignages accablants. Sans appel. Abdesslam Lahcen Omar, 13 ans à l'époque, est un survivant du massacre. «L'un des soldats m'a demandé de dire vive le roi, j'ai dit vive le roi et il m'a laissé partir... C'est ainsi que j'ai sauvé ma vie.» Le récit précis de Abdesslam, corroboré par les enquêtes, les expertises et les témoignages de survivants et de descendants de survivants, est pris au sérieux. Comment peut-il en être autrement pour tous les organismes onusiens des droits de l'Homme, les Etats européens, les ONG de défense des droits de l'Homme (Amnesty, Human Rights) tous ? Le 12 février 1976 ouvre une vraie brèche juridique.