La Cour europ�enne des droits de l�homme valide l'interdiction du voile � l'universit�. Une �tudiante turque qui revendiquait le port du foulard islamique � l'universit� d'Istanbul a �t� d�bout�e par la Cour europ�enne des droits de l'homme de Strasbourg qui a estim�, ce jeudi, que l'interdiction n'allait pas � l'encontre des droits fondamentaux d'une population, m�me majoritairement musulmane, vivant dans un pays la�que. Les faits d�une d�cision in�dite dont les retomb�es seront grandes sur l�ensemble des droits nationaux des pays europ�ens, y compris des plus permissifs parmi eux (les pays du continent qui interdisent le port du voile dans les administrations ou les �coles sont minoritaires) sont les suivants : Leyla Sahin, une �tudiante en m�decine conteste le r�glement interne tr�s strict de l'universit� d'Istanbul interdisant l'admission en cours d'�tudiantes portant le foulard. La plaignante estime que la circulaire de 1998 du recteur d'Istanbul, interdisant aux �tudiantes le port du voile islamique, est contraire au droit � �manifester librement sa religion, en public ou en priv� tel qu'il est garanti par l'article 9 de la Convention europ�enne des droits de l'homme. Partie poursuivre ses �tudes � Vienne, o� le port du voile est autoris� dans l'enseignement sup�rieur, la jeune femme porte �galement plainte contre son pays d�origine pour �atteinte � la libert� d'instruction� et �discrimination religieuse�. Sur le fond, la Cour europ�enne des droits de l'homme (CEDH) a d�bout� Leyla Sahin en d�pit de son affirmation d'avoir d� interrompre ses �tudes de m�decine � la suite de la circulaire du rectorat d'Istanbul, confirmant en appel sa d�cision de juin 2004. La Cour a de nouveau conclu � la non-violation par la Turquie de l'article 9 de la Convention europ�enne des droits de l'homme, portant sur la libert� de pens�e, de conscience et de religion. Le triptyque �l�galit�, l�gitimit� et n�cessit� est longuement invoqu� par la Grande Chambre de la Cour europ�enne des droits de l�homme qui estime que l'interdiction du foulard dans les universit�s turques peut �tre consid�r�e comme �n�cessaire � la protection du syst�me d�mocratique�. Certes, les juges rel�vent, au passage, que l'interdiction du voile constitue bel et bien une �ing�rence� de l'Etat dans la libre expression de la religion, mais ils estiment, cependant, qu'il s'agit d'une restriction �conforme � la loi, l�gitime et n�cessaire�. Bien mieux, la Cour met en cause la primaut� de la charia dans un monde que l�on croyait relever du domaine du sacr� dans un pays de confession musulmane : �Dans un pays o� la majorit� de la population, manifestant un attachement profond aux droits de la femme et � un mode de vie la�que, adh�re � la religion musulmane, une limitation du port du foulard peut r�pondre � un besoin social imp�rieux.� A l'instar des juges constitutionnels turcs dont l�arr�t avait �t� contest� par la plaignante, la Cour estime que �lorsqu'on aborde la question du foulard islamique dans le contexte turc, on ne saurait faire abstraction de l'impact que peut avoir le port de ce symbole, pr�sent� ou per�u comme une obligation religieuse contraignante sur ceux qui ne l'arborent pas�, affirment les juges soulignant en outre que �ce symbole religieux avait acquis au cours des derni�res ann�es en Turquie une port�e politique�. La Cour rappelle aussi le fait que �le principe de la�cit� est la consid�ration primordiale ayant motiv� l'interdiction du port d'insigne religieux dans les universit�s� et que �les valeurs de pluralisme, de respect des droits d'autrui et en particulier de l'�galit� entre hommes et femmes sont enseign�es et pratiqu�es�. Tel qu�entendu ici, le principe de la�cit� �interdit � l'Etat de t�moigner une pr�f�rence pour une religion�, mais vise aussi � �prot�ger l'individu contre des pressions ext�rieures �manant de mouvements extr�mistes�. Au vu de ces consid�rations, les magistrats affirment alors �pouvoir comprendre que les autorit�s comp�tentes consid�rent comme contraire � ses valeurs d'accepter le port d'insignes religieux y compris que les �tudiantes se couvrent la t�te d'un foulard islamiste dans les locaux universitaires�. La Cour a �galement conclu � la non-violation du droit � l'instruction (article 2 du protocole n�1 de la Convention europ�enne des droits de l'homme) invoqu� par Leyla Sahin, en soulignant que l'interdiction du foulard � l'universit� n'avait �pas port� atteinte � la substance m�me du droit � l'instruction de la requ�rante�. Cet arr�t avec son argumentaire tr�s rigoureux reprenant pour l'essentiel celui de juin 2004 fera de fait jurisprudence. D�j� une premi�re fois au d�but des ann�es 80 des �tudiantes turques avaient �t� d�bout�es. Peine perdue pour le gouvernement de l'AKP (Parti de la justice et du d�veloppement) issu du mouvement islamiste � et dont la plupart des �pouses des ministres, dont celle du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, sont voil�es � qui esp�rait pouvoir s'appuyer sur une d�cision de la Cour pour imposer au camp adverse, notamment � l�arm�e, un assouplissement de la l�gislation interdisant le port du foulard dans la fonction publique, � l'�cole et � l'universit�. Et c�est paradoxalement en se drapant du voile des libert�s que les islamistes turcs comptaient d�fendre le port du voile dans les deux institutions : �La Turquie ne peut aller nulle part avec des interdictions de ce genre�, a affirm� le chef de la diplomatie turque Abdullah G�l, estimant que �personne ne doit se vanter de d�fendre les interdictions�. D�finitif, cet arr�t fera jurisprudence en Turquie et suscitera l�uniformisation des l�gislations nationales europ�ennes aujourd�hui minoritairement hostiles au port du foulard que la Cour a bien pris soin de mentionner (France, Arm�nie, Azerba�djan). A bon entendeur.