Contrairement à ce que l'on croit, au conservatoire, on n'apprend pas que la musique. On commence d'abord par la diction et la déclamation, ce qui est destiné aussi bien pour les futurs comédiens que les chanteurs. Dans tous les conservatoires du monde, on apprend la diction, le théâtre, le chant et la musique. Ce qui montre que les chanteurs sont formés pour pouvoir jouer des rôles au théâtre et que les comédiens aient la capacité de chanter. Même si beaucoup de comédiens ne sont pas passés par les conservatoires, beaucoup d'entre eux, ont prouvé leurs dons en chantant. S'il est normal qu'un chanteur offre sa belle voix pour jouer dans des comédies musicales ou opérettes comme l'avaient fait Luis Mariano, Elvis Presley et les grands danseurs Fred Astaire et sa compagne Ginger Rogers qui ont inspiré plus tard John Travolta et Olivia Newton John dont le film «Saturday night fever» avait fait fureur à la fin des années 1970, il est plus rare que des comédiens enregistrent des disques et fassent même des succès. Rachid Ksentini, le pionnier En Algérie comme ailleurs, se sont surtout les comiques qui osent chanter. En France, on avait bien aimé les chansons de Bourvil, Fernand Raynaud, Fernandel et Jean Gabin qui avait eu un grand succès avec sa chanson philosophique «Maintenant, je sais». En Algérie, On ne cite pas Mahieddine Bachtarzi qui avait commencé par la chanson andalouse avant de se mettre au théâtre, mais plutôt du grand Rachid Ksentini qui, dans de nombreux sketchs chantait avec Marie Soussan. Rachid Ksentini qui a ouvert la voie à beaucoup d'autres comédiens avait enregistré plusieurs succès dont «Chtah Chtah ya loulou», «Tal Edhor», «Baba El Kbir» et «Dengou dengou». Il est à rappeler que Rachid Ksentini qui reste parmi les artistes les plus complets était comédien, chanteur, parolier et musicien puisqu'il jouait à la guitare et au Banjo. Bien que les paroles de ses chansons étaient toutes écrites dans un style humoristique, il se permettait de beaux préludes, ce qui prouvait qu'il pouvait même devenir un bon chanteur de Chaâbi s'il l'avait voulu. Sid Ali Fernandel (Houat) dont l'ancienne plage La Vigie à l'ouest d'Alger porte le nom et qui a fait ses débuts dans la troupe Redha Bey au début des années 1940, n'aurait pas beaucoup enregistré de chansons. La télévision algérienne ne passe pratiquement que Belek Metrig dans laquelle on le voit en tenue de policier faire la circulation en sifflant. Rouiched avait également interprété plusieurs chansons dont Eddenia Blektef, mais il n'aurait enregistré sur disque que les trois chansons «L'Anisette», «Marie Katsou» et «Ya Hadj». Mohamed Touri avait également enregistré plusieurs disques dont «Cheri Hannouni», «Somba somba terro» et «La loterie algérienne», une chanson publicitaire. Les comédies musicales Au lendemain de l'indépendance, c'est le comique Djafer Beck qui a choisi la chanson pour s'exprimer, d'abord pour fêter le départ des français, ensuite pour dénoncer certains maux sociaux ou conseiller notre jeunesse. En effet, en 1962, le comédien et fantaisiste avait enregistré «La Ilaha ilellah» et «Eddinaha». Il continuera dans les années 1970, sur sa lancée avec «Ya Djelloul Errouk and Roul» et «Alif Ba Ta» sur une musique composée par Saïd Bestandji. Le comédien Mohamed Hilmi qui écrivait ses pièces et comédies musicales avait également bien fait de chanter puisqu'il avait toutes les qualités, notamment une belle voix. On se souvient de «Ana El Ouahdania» et ses reprises à sa façon des grands succès des années 1970 dont «Ya Lhouta» de Rabah Driassa et «Ya Laâdra» de Abdelkader Chaou. Mohamed Hilmi s'est permis d'enregistrer sur disque 45 tours deux chansons en kabyle. Les comédies musicales de Hilmi nous avaient permis également de découvrir la voix de la grande comédienne Yasmina qui était connue pour ses rôles dramatiques. Le grand metteur en scène Hadj Omar qui était un brillant comédien au théâtre avait lui aussi brillé en chantant dans des enregistrements télévisés. Hadj Abderrahmane qui a fait ses débuts à la RTA en tant que cameraman avant de devenir le grand Inspecteur Tahar a également réussi en chantant dans ses pièces et films que sur scène. D'ailleurs, dans ses chansons, il était bien accompagné par son ami Yahia Bnemabrouk alias ‘L'apprenti', notamment dans le film «Les vacances de l'inspecteur Tahar». Le sens inverse On a vu des chanteurs jouer dans des pièces de théâtre, notamment des sketchs comme ce fut le cas pour El Hachemi Guerouabi, Abderrahmane Aziz ou Blaoui Houari, mais c'est surtout l'inverse qu'on a remarqué. Il ya des chanteurs qui ont carrément choisi de changer de spécialité. C'est le cas de Mustapha El Anka, le fils du pionnier du Chaâbi qui avait enregistré au moins un 45 tours avant de se spécialiser dans le théâtre. Abdelmadjid Meskoud a, quant à lui, abandonné le 4e art pour une grande carrière de chanteur alors qu'il avait même, fait partie de la grande troupe de théâtre TTP que dirigeait Hassan Hassani. Meskoud a eu aussi le mérite d'avoir écrit la chanson humoristique «Dja lma» interprétée par le comique Souileh. Enfin, un bon comédien doit avoir une bonne diction et une voix forte, ce qui lui permet souvent de chanter, ce qui n'est pas donné pour beaucoup de chanteurs de jouer dans une pièce théâtrale, bien qu'il y a toujours des exceptions dans tous les domaines.