Rideaux baissés, cadenas fermés, un comportement qui demeure une habitude pour la majorité des commerçants algériens. La plupart, pour ne pas dire toutes les boulangeries et les magasins de proximité, étaient fermés hier à Alger. Une virée sur place nous a permis de constater une pénurie de pain et de lait. Même pour acheter une bouteille d'eau minérale, il nous a fallu traverser, en voiture, toute la place Audin à Alger-Centre. Un quinquagénaire nous a lancé : «Les boulangeries sont fermées, depuis la veille de l'Aïd El Adha, venez voir, il n'y a pas où acheter une baguette de pain.» Avant d'ajouter : «Pour avoir une baguette de pain, vous devez attendre une demi-heure, voire plus à la boulangerie Pasteur, de l'autre côté, derrière la faculté centrale.» On s'est rendu à cette boulangerie où on a constaté une grande affluence devant la porte. Une longue file longe le trottoir. La même situation a été remarquée à Belouizdad, où les boulangeries, épiceries et marchés de fruits et légumes sur l'avenue principale de ce quartier populaire étaient fermés. Un père de famille nous a révélé : «Les boulangers ferment à chaque fête de l'Aïd, ils n'emploient que des gens venus des wilayas de l'intérieur, et comme à chaque fois, ces ouvriers partent pour passer l'Aïd chez eux, ce que le gérant ne pourra pas leur interdire.» Il ajoute : «La main-d'œuvre qualifiée en boulangerie est rare de nos jours, c'est un métier qui est en voie de disparition, et les jeunes préfèrent le gain facile. C'est un métier dur pour eux.» Un autre citoyen, manifestement excédé, lance : «On a dû se déplacer à Bab Ezzouar pour nous ravitailler. Pour le pain, on l'a stocké au réfrigérateur, la veille de l'Aïd.» Son voisin intervient : «C'est grave, même pas une baguette de pain n'est assurée à la population, il faut punir tous les commerçants qui ne respectent pas la permanence.» Idem pour les habitants d'El Biar où la grande et l'ancienne boulangerie de la placette Kennedy, qui se trouve juste à côté de la mosquée du centre-ville, était fermée. Presque tous les magasins de la grande ruelle menant vers le commissariat de police d'ex-Châteauneuf étaient hors service. Un vieil homme rencontré à l'entrée de la gare ferroviaire Agha nous a répondu, après un long silence : «Vous dites si le lait et les produits alimentaires sont disponibles ? Et si le pain n'a pas connu un manque durant l'Aïd ? Pourquoi, vous êtes en Suède ou bien vous rêvez ?». Après avoir insisté, il ajoute : «Les présidents d'APC sont les premiers responsables de cette situation de pénurie de produits alimentaires, ils doivent veiller à assurer les besoins des citoyens. Qu'attendez-vous d'eux s'ils ne savent même pas gérer la disponibilité d'une baguette de pain ou d'un sachet de lait ?».