A Blida, la mosquée Saoudi se distingue par son architecture, sa situation en plein centre-ville et, surtout, par la présence quotidienne du muezzin et récitateur du noble Coran Abdelkader, dont la voix et le style sont incomparables. A plus de 90 ans, Abdelkader El Bouleïdi continue d'attirer les fidèles grâce à sa voix douce et à son style algérien qui se rapproche de l'andalou. La voix douce et belle de ce religieux, qui continue à affirmer qu'il est un supporter de l'USMB, nous rappelle le bon vieux temps quand on attendait l'appel à la prière dans un style purement algérien, avant le tir du coup de canon annonçant la rupture du jeûne. Il faut dire que beaucoup de familles, notamment les nostalgiques, continuent à attendre l'Adhan à la radio au lieu de la télévision pour écouter la belle voix de Cheikh Abdelkader El Bouleïdi ou bien d'Ahmed Serri. Cette préférence est due à leur belle voix et, surtout, au style typiquement algérien de ces deux muezzins. Même si les récitateurs du noble Coran et les muezzins d'Orient, notamment d'Egypte, sont très appréciés, on se demande pourquoi rares sont les chaînes de télévision qui nous permettent d'écouter l'appel à la prière et la psalmodie du noble Coran dans un style algérien. Chaque pays a ses récitateurs célèbres, alors pourquoi pas l'Algérie ? La Turquie est très fière de ses muezzins Fevzi Msir, Aziz Bariyeli et Ali Riza Sahin. En Egypte, tout le monde connaît l'histoire de Cheikh Abou El Aynayne qui n'avait que 17 ans lorsqu'il est devenu parmi les dix meilleurs récitateurs du noble Coran de la Radio égyptienne. Elève de Cheikh Rif'at, Abou El Aynayne est considéré comme une véritable pyramide aux côtés du célèbre maître du Tedjwid , Abdelbasset Abdessamed, ou Cheikh Djebril, qui a appris le noble Coran alors qu'il n' avait que 9 ans. L'Egypte, l'Arabie saoudite et tous les pays d'Orient sont très fiers de leurs grands maîtres de la psalmodie. Même si ces grands récitateurs nous appartiennent aussi et qu'on apprécie, il ne faut pas mépriser les nôtres, car tout un style de récitation risque fort de disparaître. Qui se souvient de Baba Amar ? On se demande pourquoi les chaînes de télévision algériennes n'essaient pas d'obtenir des enregistrements d'Abdelkader El Bouleïdi et ceux de Baba Amar. On se souvient que durant les années 1960-1970, du muphti d'Alger Baba Amar qui passait quotidiennement à la télévision en «assis tailleur» pour réciter le noble Coran tous les soirs avant le Maghreb. Il faut dire que durant et avant cette période, une bonne partie des récitateurs et des muezzins préféraient le style algérien notamment andalou. Les anciens habitants de Bouzaréah se souviennent bien des airs andalous du Adhan de Cheikh Lakhal Kezadri. A la radio, c'était le grand peintre Omar Racim qui faisait l'appel à la prière. D' ailleurs, sa voix et sa manière de lancer l'appel à la prière ressemblent beaucoup à celle d'Ahmed Serri. Cette ressemblance est due vraisemblablement au fait que les grands chanteurs andalous tels que Mahieddine Bachtarzi ou Ahmed Serri ont appris cet art dans les groupes de Qessadine (chanteurs religieux), qui se rencontraient, notamment, durant les soirées de Ramadhan dans les mosquées ou ans les mausolées, tels que Sidi Abderrahmane Ethaâlibi ou dans les zaouïas. On doit rappeler qu'autrefois, le chant religieux était un rite presque quotidien chez certaines familles d'Alger, de Blida et de Médéa. Durant les années 1980, il y a eu un petit retour vers le Adhan de style algérien à Alger. On se souvient de l'irremplaçable virtuose du banjo et chanteur de chaâbi Naguib qui faisait l'appel dans un style typiquement andalou dans le mode Ghrib. Le chanteur Hachemi Guerouabi avait également été sollicité pour le Adhan durant la même période. Avec sa très belle voix, le wkil (gérant) et imam du mausolée de Sidi M'hammed Bouqabrine, à Belouizdad, reste l'un des rares à garder cette manière de faire l'appel à la prière. La plupart d'entre eux préfèrent les modes Ghrib et Zidane mais il paraît qu'il y a des enregistrements dans d'autres modes andalous tels que le âraq et le Djarka. D'autres muezzins et récitateurs d'Alger ont de très belles voix même si le style diffère, notamment Cheikh Sari à Bouzaréah et Cheikh Zouaoui (frère du maître du chaâbi) de la mosquée de Skala. Alger, Blida, Tlemcen et beaucoup de villes d'Algérie, dont celles du Sahara, regorgent de belles voix. La télévision et le ministère des Affaires religieuses devraient penser à leur faire appel. Le chanteur et religieux Cheikh Ghafour et Cheikh Abdelkader El Bouleïdi seraient les mieux placés pour ces enregistrements. On pourrait, également, organiser un concours d'Adhan et de récitation du noble Coran dans le style algérien.