Une semaine après le début des consultations sur les réformes politiques, l'instance présidée par Abdelkader Bensalah a recueilli des dizaines de propositions aussi divergentes que consensuelles allant dans le sens du changement, bien que certaines d'entre elles n'aient fait qu'appuyer parfois avec zèle - c'est le cas de certaines formations qui ne s'attendaient pas à être invitées - les décisions déjà prises et mises en application. Jusque-là, pas moins de 9 formations politiques et 4 personnalités en plus de quelques organisations de la société civile ont défilé devant la commission. S'il est vrai que la révision de la Constitution, «loi suprême, mère de toutes les lois», comme l'ont décrit les intervenants, s'est taillé la part du lion dans les discussions, il n'en demeure pas moins que plusieurs autres thèmes ont aussi été abordé comme le choix du régime politique qui sied au pays ainsi que les autres lois à réviser. Loi électorale, loi sur les partis, participation de la femme à la vie politique, dossier jeunesse ou encore loi sur l'information ont été évoquées globalement. L'ordre de «passage» des lois devant le parlement selon le calendrier annoncé par le chef de l'Etat n'est cependant pas du goût de certaines formations politiques qui estiment que les réformes doivent commencer par la révision de la Constitution. C'est le cas notamment du Mouvement de la société pour la paix (MSP), dont le président Soltani a demandé à ce propos que «les priorités changent». Affichant sa volonté de s'impliquer dans le processus de consultations en cours pour faire aboutir des réformes politiques, un «tournant décisif dans l'histoire de l'Algérie, Soltani s'est exprimé sur nombre de thèmes majeurs, à commencer par la réforme constitutionnelle, l'adoption d'un régime parlementaire et l'organisation d'élections «transparentes et régulières». Pour Louisa Hanoune du PT, le report de l'adoption de la nouvelle constitution jusqu'après les élections législatives est un «choix judicieux» et «une reconnaissance» que le parlement actuel «n'a ni légitimité ni crédibilité». Cette vision est amplement partagée par l'ex-membre du HCE, Khaled Nezzar, invité en tant que personnalité politique qui est allé plus loin en demandant au président de la République de légiférer par ordonnance jusqu'à ce qu'il y ait un parlement élu démocratiquement. S'agissant de la nature du système politique, le régime parlementaire, qui consacrera une véritable séparation des pouvoirs, semble amplement l'emporter pour le moment au détriment du régime présidentiel en attendant l'entrée en lice d'autres personnalités et partis dont l'avis de certains à ce propos est déjà connu, comme le FLN et le RND, deux partis de l'Alliance favorables au système présidentiel, contrairement au MSP qui a prôné le système parlementaire. Un système parlementaire synonyme pour certains de dissolution du sénat (MJD) ou du renforcement des prérogatives de ce dernier (MEN, Infitah…). Des propositions pour garantir la séparation des pouvoirs D'autres petites formations qui soutiennent beaucoup plus qu'elles ne proposent demandent même un système présidentiel renforcé par un poste de vice-président (Zeghdoud du RA). La limitation du mandat présidentiel «garantissant l'alternance au pouvoir» est également partagée par beaucoup d'intervenants, à l'instar du général Nezzar qui propose pour mener à bien ces réformes «une commission indépendante qui sera chargée d'élaborer tous les projets de loi en questione. eLa relève des défis qui attendent l'Algérie ne se fait pas à travers le changement des lois», a estimé pour sa part l'ex-chef du gouvernement, Sid Ahmed Ghozali, qui considère que «ces mêmes lois n'ont pas été respectées durant la décennie précédente». Le mouvement El-Islah a, quant à lui, remis à l'instance de consultations des propositions portant sur la création de mécanismes «viables» à même de parachever les réformes dans le cadre d'un consensus entre tous les acteurs activant sur la scène politique et sociale, alors que Mohamed Saïd, ex-candidat à l'élection présidentielle de 2009 dont le parti n'est toujours pas agréé, souhaite «une réelle volonté» dans la conduite des réformes qui répondent aux aspirations du peuple. L'accent a été également mis, au cours d'une quinzaine de consultations sur le rôle de la société civile, et des jeunes, considérés comme un «partenaire essentiel» dans le processus de la bonne gouvernance et un «acteur principal» dans la réussite des réformes politiques engagées, comme il a été question de soutenir les efforts de lutte contre la corruption (Farouk Ksentini) et la réforme du système de gouvernance, l'élargissement des libertés et des droits de l'homme et l'ouverture du champ médiatique évoqués par quasiment tous les intervenants. Plusieurs autres partis et personnalités importantes sont attendus, annonce-t-on du côté de la présidence, alors que certaines ont, rapporte-t-on, décliné l'invitation, à l'image de Me Mustapha Bouchachi de la LADDH qui devait être reçu mercredi. Pour rappel, les consultations se déroulent à huis clos au siège de la présidence de la République. Les hôtes de la commission Bensalah sont reçus séparément pour des séances dont la durée a oscillé entre 30 minutes (Ghozali) et 90 minutes. A l'issue de la séance, l'invité se présente devant un pupitre installé dans une salle séparée de la salle d'audience et fait son «compte rendu» aux journalistes qui n'ont cependant pas le droit de l'interroger. Les consultations se poursuivront jusqu'à fin juin et les membres de la commission élaboreront alors un «rapport final détaillé» qui reflèterait «fidèlement» les avis et les propositions émis par les participants et qui devra être soumis au président de la République. Le chef de l'Etat le présentera à son tour au gouvernement qui élaborera, sur cette base, des projets de loi à soumettre à l'APN dès septembre prochain.